C’était le thème développé le 21 août 2012 par la chaîne "Arte" dans une émission intitulée « Tchernobyl: une histoire naturelle ? ». La faune et la flore reconquiert la « zone interdite ». Peut-on, pour autant, conclure, comme le prétend ce reportage, que « la nature semble avoir repris ses droits » et parler d’une « absence bénéfique de l’humain » ?

Source : Arte.fr du 21.8.2012

Commentaire « les2ailes.com »

1)   Que disais l’émission ?

L’émission[1], comme souvent dans les medias, avait un but provocateur et tout intérêt à étonner pour assurer son audimat.

  • L’observation de la nature à Tchernobyl, 25 ans après l’accident de 1986

À  Tchernobyl, la zone interdite abrite de nombreuses espèces d’animaux sauvages, dont certaines totalement absentes avant l’accident. Plusieurs ours, des rennes, des blaireaux, des lynx s’y sont installés, il est très fréquent de voir des sangliers, des biches, des cerfs ou des chevreuils. Les oiseaux nichent même sur le sarcophage de béton qui recouvre le réacteur défunt à des niveaux de radioactivité un million de fois la normale.
Le commentateur indique que tous ces animaux semblent en parfaite santé. La zone de Tchernobyl abriterait en particulier une espèce de mammifère extrêmement rare, quasiment éteinte sur la planète tellement elle est chassée par l’homme : le cheval de Przewalski.
Quant à la végétation, on assiste au même phénomène : Celle-ci est exubérante : des lilas sont en pleines fleurs, des arbres poussent à l’intérieur même des HLM de Pripyat. Lentement mais surement les vestiges de ce que fut la ville idéale soviétique sont engloutis par la forêt. Chaque village est devenu une véritable jungle. Comme pour les animaux, les radiations semblent n’avoir aucune conséquence sur la végétation.

  • La nature se moquerait-elle des radiations ?

La chaine de télévision a fait appel à une scientifique spécialiste des chevaux de Przewalski qui dit : « Je pense que c’est un paradis ici pour les chevaux ».
Un début d’explication possible serait, par exemple, que les mulots ont eu une quarantaine de générations. Ce qui leur aurait laissé le temps de s’adapter. Ils sont hautement contaminés, mais « ont l’air normaux et en parfaite santé ». Dès lors, comment expliquer ce paradoxe ?

  • La phase aigüe de la contamination

Il semble évident qu’au moment de l’accident, les organismes vivants n’étaient pas préparés à ce type de contamination, surtout à des doses aussi fortes. Dans les jours et les mois qui suivirent la catastrophe, on observa d’innombrables cadavres d’animaux, d’insectes, de fleurs, et des dizaines de millions de plantes mortes d’herbes, d’arbres se comptaient par dans la zone interdite.. et probablement des milliards de microorganismes et bactéries ont dû être affectés.

  • Une phase d’adaptation

Le commentateur de l’émission explique que  « du fait des retombées en tâches de léopard, des zones quasiment indemnes en côtoyaient d’autres totalement vidées de leurs faunes, exterminées par la violence des doses de radioactivité. A la différence des bombes nucléaires qui sont des flashes et irradient de façon très courtes, les radionucléides de Tchernobyl, tombés au hasard, continuent de rayonner en toute discrétion tant qu’ils ne se sont pas tous désintégrés jusqu’à devenir des atomes stables. Aujourd’hui, après plus de deux décennies, moins de 3% d’atomes radioactifs subsistent dans la zone interdite de Tchernobyl ».
Malgré tout, les animaux qui restent sont là pour très longtemps et leurs comportements dans la nature sont autant d’énigmes pour les scientifiques. La zone de Tchernobyl est entrée dans une nouvelle phase, celle que les scientifiques appellent « phase-de-radioactivité-chronique-mais-de-faible-dose ».
On constaterait des différences de résistance d’une espèce à l’autre, selon la taille des génomes et selon les taux d’absorption de calcium et de potassium de chaque espèce.
En effet, par exemple, les bouleaux résisteraient et ne montreraient aucunes mutations, alors que les pins meurent ou montrent des phénotypes mutés. Cela serait dû aux différences de tailles des génomes : plus petits chez les bouleaux, ils auraient moins de chance d’être heurtés par les radiations.
Par ailleurs, les organismes vivants n’ont aucun moyen de faire la distinction, pendant leur digestion, entre d’une part le potassium ou le calcium et d’autre part  des éléments radioactifs comme le strontium90 ou let césium137). Il y a donc une variabilité d’intoxication, selon les plantes, en fonction de leurs besoins de calcium et de potassium

  • Des études en laboratoire pour essayer de comprendre

Le commentateur d’Arte expliquait que, « à  Tchernobyl, les études scientifiques n’ont strictement rien à voir avec les études de laboratoire où tout est sous contrôle et où on ne peut faire varier qu’un seul facteur.
A Tchernobyl les scientifiques observent les conséquences d’un accident nucléaire en situation réelle, bien loin des études en laboratoires où tout est sous contrôle
 ».
C’est pourquoi des laboratoires ont fait une expérience : ils ont importé dans la zone de Tchernobyl des souris blanches et en ont gardé d’autres en zone non contaminée. Après 45 jours,  les deux lots ont  été soumis en laboratoire à de forte radiation. Le lot ayant été à Tchernobyl résistait mieux. Les radicaux libres semblaient avoir été éliminés de façon bien plus efficace pour celles qui avait séjourné préalablement dans la zone contaminée Ce séjour aurait donc bénéficié d’un « effet hormesis » c'est-à-dire que l’hypothèse serait confirmée que de faibles doses de rayonnements ionisants peuvent être bénéfiques, en stimulant l'activation des mécanismes de réparation qui protègent contre des maladie, qui ne sont pas activés en l'absence de rayonnement ionisant rayonnement.

2)   Quelle leçon en tirer ?

Nous ne partagerons pas les conclusions sous-jacentes qui ressortaient des commentaires de l’émission :

  • Non on ne peut parler de « droit de la nature ».
    A tort,  le commentateur de l’émission se plaisait à dire que « la nature semble avoir repris ses droits ».
  • Non, on ne peut parler d’une « absence bénéfique de l’humain »
    Le commentaire laissait à penser que lorsque l’homme habitait à Tchernobyl, la pollution chimique de l’environnement était forte, son empreinte écologique terrible. Nous ne partageons pas le regard qui consiste à dire que « Le départ de l’homme et donc l’absence de son activité ont eu des incidences très positives. Le animaux et les plantes, toutes ces terres et grands espaces ont recommencé à se développer indépendamment de l’homme, d’après leurs propres lois naturelles. Et en fin de compte, ils sont devenus plus riches, avec une plus grande diversité qu’à l’époque où l’homme était installé ici »
3)   Conclusions
  • Nous considérons plutôt que la nature a été créée pour l’homme. L’accident de Tchernobyl a d’abord été une catastrophe pour l’homme.  250.000 personnes déplacées ! Et, surtout, combien de morts difficiles à dénombrer tant la mortalité s’est échelonnée dans le temps ? Combien de souffrances physiques et morales ?

Si l’homme doit protéger l’environnement, c’est d’abord pour lui. On doit donc considérer que les pollutions sont illicites dès lors qu’elles ont de si graves conséquences pour l’homme.

  • A contrario, lorsque l’homme intervient sur la nature, que ce soit pour accompagner sa croissance démographique ou que ce soit pour améliorer un certain bien être, il n’y a pas lieu de qualifier cette intervention de « pollution » ni de laisser l’écologisme accuser l’homme d’être un prédateur. Le concept même d’ « empreinte écologique » nous parait, à lui seul péjoratif.

Certes, nos activités humaines, licites par nature, interagissent avec le milieu, y compris avec les autres espèces de la création. Ces espèces ne sont pas sacrées. Ce qui parait presque rassurant dans les observations faites à Tchernobyl, c’est ce constat que la nature a une force de réaction que même l’homme ne peut imaginer. Il nous appartient donc de remettre notre confiance en Dieu.  L’homme doit tout faire pour éviter des Tchernobyl-bis. Mais il ne doit pas non plus avoir peur d’intervenir sur la nature, même si une certaine biodiversité peut en être impactée. Tout est une question de mesure, de bénéfices et de risques. Cette capacité de la nature à renouveler des équilibres nouveaux fait partie du mystère de la création et du plan divin pour l’homme.


[1] Les « morceaux choisis de cette émission ont été repris par Yoann Moreau le 27.5.2010 (http://culturevisuelle.org/catastrophes/2010/05/27/tchernobyl-nature/)