Titre : « La physique quantique »
Année de parution : Avril 2014
Auteur : Bernard d'ESPAGNAT et Hervé ZWIRN
Editions : Editions Matériologiques
Sous Titre : "Les débats philosophiques de la physique quantique" 
 
CV des auteurs :
Bernard d'ESPAGNAT
né  en 1921, doctorat à l'École polytechnique, Chercheur au CNRS, Professeur à la Faculté des sciences de la Sorbonne (1959-1987), directeur du Laboratoire de physique théorique et des particules élémentaires de l'Université Paris-Sud 11, à Orsay (1978-1987), professeur invité à l’université du Texas à Austin, en 1977, et à l'université de Californie à Santa Barbara, en 1984. En 2009, il reçoit le prix Templeton.
Hervé ZWIRN
Physicien et épistémologue, Diplômé de Polytechnique (1975), Directeur de Recherche au CNRS, Professeur Associé à l'UFR de Physique de l'Université Paris 7, DG du groupe Steria, puis PDG de Eurobios en 2000.
Derniers ouvrages :
Bernard d'ESPAGNAT
"Traité de physique et de philosophie" (2002)
"Candide et le physicien" (avec Claude Saliceti, 2008)
Hervé ZWIRN
"Philosophie de la physique", avec L.Soler (Éditions L'Harmattan, "Les systèmes complexes : Mathématiques et biologie", Éditions Odile Jacob, 
"Qu'appelle-t-on aujourd'hui les Sciences de la complexité ?", avec Gérard Weisbuch, Vuibert, 2010

Résumé

La science et la philosophie, autrefois indissociables, se sont progressivement éloignées au cours du XXe siècle. Pourtant, nombreuses sont les questions scientifiques issues de la réflexion philosophique. De plus, la signification profonde des résultats obtenus par l’intermédiaire des théories scientifiques demande souvent un éclairage philosophique pour être clarifiée. Le dialogue entre scientifiques et philosophes doit donc être restauré pour le bénéfice de la connaissance au sens le plus large du terme. C’est l’objectif de cet ouvrage qui présente les riches débats entre physiciens et philosophes qui se sont tenus à l’Institut sous l’égide de l’Académie des sciences morales et politiques et du Collège de physique et de philosophie.Quelles nuances faut-il apporter au réalisme pour lui permettre de survivre  ? Existe-t-il des interactions se propageant plus vite que la lumière  ? La nature est-elle essentiellement indéterministe  ? Tels sont quelques-uns des thèmes abordés, liés aux débats – renouvelés par l’analyse des fondements de la mécanique quantique – relatifs à la notion d’un réel existant « en soi ».

Extraits sélectionnés par "les2ailes.com"

1. Introduction de Bernard d'ESTAGNAT et Hervé ZWIRN

« Jean Hamburgrger écrivait: "L'exploration scientifique est sans limites, mais elle est aussi sans espoir d'atteindre une réalité indépendante de l'observateur, de ses méthodes et de son échelle d'observation" » (p.12).  

2. "L'étrangeté incontournable du monde quantique"

2.1- Conférence de Edouard BREZIN 

« La naissance "officielle" de la mécanique quantique se place en 1900 avec l'article de Max Planck sur le rayonnement du corps noir... qui en physique classique est totalement incompréhensible... Le raisonnement classique conduit en effet à un rayonnement qui ne cesse d'augmenter avec la fréquence, une divergence évidemment inadmissible...
Planck tente d'en sortir par une hypothèse difficilement compréhensible de "niveaux d'énergie quantifiés" et de "quanta de rayonnement"...
Mais la crise la plus grave suit la découverte du noyau atomique par Ernest Rutherford en 1909... Il découvre qu'au centre de l'atome, il y a un noyau dur qui en prend quasiment toute la masse... c'est à dire que notre matière est vide.
Pourquoi en est-il ainsi?  En d'autres termes, pourquoi les électrons ne perdent-ils pas de l'énergie potentielle en se rapprochant du noyau? Normalement, en physique classique, une particule chargée qui tourne autour d'un centre est douée d'une accélération non nulle, puisque le seul mouvement rectiligne n'est pas accéléré. » (p. 22)
« Or toute particule chargée accélérée émet du rayonnement et perd ainsi de l'énergie. ... Pourquoi, dans les atomes, les électrons ne rayonnent-ils pas en perdant de l'énergie et en tombant sur le noyau?
Il faut commencer par la notion d'état. Les états, il faut se les représenter comme des vecteurs... dans un espace abstrait... Ce sont des objets que l'on peut ajouter entre eux et que l'on peut multiplier par un nombre complexe...
Dans ces conditions, on peut superposer des états..
Comment se présente, en physique quantique, la liaison chimique? Imaginez que l'on ait deux noyaux chargés positivement et un électron. Si ces deux noyaux sont très éloignés, il est impossible d'avoir un état gauche dans lequel l'électron serait lié au noyau numéro 1, et aussi un état droit dans lequel l'électron suivrait le noyau droit. Mais, si les deux noyaux se rapprochent, il existe en mécanique quantique un phénomène classiquement interdit qui est le franchissement des barrières de potentiel, que l'on appelle l'effet tunnel.» 
« Les deux noyaux sont liés par l'électron et ils sont liés par cette impossibilité ... de dire si l'électron est à gauche ou s'il est à droite. Il est complètement délocalisé, et c'est cela qui est à l'origine de la liaison électronique». (p 23)
« Le point de vue de Feynman ... est caractérisé par une somme sur des histoires. En mécanique classique, si l'on sait qu'à l'instant 0, une particule est située à la position initiale xin et qu'au temps T, elle va aller au point final xf, alors, sa trajectoire est définie...» (p.22)
« Dans la vision de Feynman, il ne faut pas s'imaginer qu'il n'y a qu'une trajectoire... Toutes les trajectoires sont possibles: n'importe quel chemin qui va de xin à xf, dans le temps T, est réalisé... Et pour trouver l'amplitude de probabilité... qui permet de caractériser quantiquement ce passage..., il faut, à chaque histoire, associer un nombre complexe... Ce nombre complexe est l'exponentielle de l'action divisée par une constante de Planck.... Pour trouver le résultat quantique, il faut imaginer que la particule... utilise toutes les trajectoires, et que pour chacune, on somme ce nombre complexe, appelé "amplitude" » (p. 24-25)

« Si j'envoie un caillou dans l'eau, c caillou va fabriquer une onde... Si j'en envoie deux... il y a des points où il y aura des crêtes... et il y a des endroits où il va y avoir un plat... Imaginez que vous envoyez des milliards de milliards de cailloux sur l'eau sanas arrêt... Cela va produire un clapotis tellement distribué qu'en définitive, presque partout, rien ne va bouger... Lorsque nous sommes dans une situation où les effets quantiques sont négligeables, les interférences produites en ajoutant ces diverses trajectoires se compensent presque partout: il ne va rester que la trajectoire qui "domine" cette somme, qui est la trajectoire classique... La causalité est bien plus présente en mécanique quantique qu'en mécanique classique.... » 
« L'expérience bien connue des trous de Young... consiste à interposer entre une source émettant un faisceau lumineux cohérent et un écran, un premier écran percé de deux trous (p. 25) ... Si nous obstruons d'abord l'orifice 2 de l'écran interposé, nous trouvons une tache sur l'écran final centrée autour de l'image géométrique du trou numéro 1 Si c'est l'orifice 1 qui est bouché, on a une tache autour de l'image de 2. Ce sont là deux trajectoires classiques possibles... Si on ne bouche aucun des deux orifices, la somme de Feynman sur ces deux histoires produit un éclairement qui n'est pas la somme des éclairements antérieurs. ... La loi d'éclairement résultante ne s'explique que parce que l'électron passe par les deux trous. ... Dès que l'on a déterminé par quel trou l'électron est passé, les franges d'interférence disparaissent. » (p. 26)
«... A chaque particule , par exemple l'électron, est associée une sorte de vecteur interne qu'on appelle son spin ... qui a trois dimensions Sx, Sy, Sz. ... Mais ces observables sont incompatibles, c'est à dire que si l'on mesure Sx , il faut renoncer à connaître Sy ou Sz et réciproquement » (p.27)
« Pour expliquer cela Heinsenberg introduit par la pensée le microscope de Heinsenberg : pour savoir où se trouve une particule, il faut la "voir" et donc interagir avec elle.   » (p. 28)

« Cette taille gigantesque des atomes, ce vide ahurissant de notre matière, résultent de l'incompatibilité des observables...
Les plus grands mystères de la mécanique quantique arrivent avec la mesure. En mécanique quantique, le résultat d'une mesure est aléatoire, et cet aléatoire est irréductible. Nous ne sommes plus du tout dans le cadre habituel de l'utilisation du calcul des probabilités en mécanique classique.... Si nous voulons décrire le moindre gramme de matière, le gigantisme du nombre d'Avogadro, de l'ordre de 1023 particules dans tout grain de matière, interdit de suivre l'évolution de tous les degrés de liberté. Par conséquent, on a fréquemment recours à des calculs statistiques ou probabilistes. Mais, a priori, cela n'est qu'une commodité destinée à court-circuiter des calculs gigantesques. Ce n'est pas une nécessité. ... Mais, en mécanique quantique, la notion de probabilité n'est pas de même nature: elle est irréductible, il n'existe pas de façon permettant d'éviter l'introduction de variables aléatoires. »(p. 29-30)

« Si l'on se souvient du microscope d Heisenberg... cela pose la question de savoir à quel moment fait-on la mesure, qu'est ce qu'une mesure?
... On pourrait tenter de décrire l'appareil de mesure comme un élément complémentaire du monde physique considéré (p. 31). Parmi les plus célèbres paradoxes figurent ceux du "chat de Schrödinger" et de "l'ami de Wigner". ... On peut avoir des "superpositions d'état: ... le chat peut se trouver dans une superpositon [chat-vivant> +[chat-mort>... Tel est ici le premier paradoxe » (p. 32)
« Dans le second paradoxe ... nous sommes obligés d'introduire la conscience de l'observateur pour opérer la réduction de l'état. ... Que signifie alors prose de conscience?... Il n'y a pas de paradoxe ... si l'état du système, tel que l'observateur le prend dans sa description du système correspond à sa propre connaissance subjective du système... Mais dans ces conditions, on ne sait plus très bien où est la réalité physique dans cette description subjective du monde. Existe-t-il une réalité physique indépendante de l'observateur ?  » (p. 33)

« Einstein, Podolsky et Rosen (EPR), [ont] imaginé un système de laboratoire... [qui] implique que la mesure est un processus non local... (p. 35)... Si j'imaginais que la mesure du spin de l'électron est une interaction entre celui-ci et l'appareil de mesure contenu dans le laboratoire... elle serait localisée à l'ensemble appareil de mesure système étudié. ... Ceci nous dit que, vraisemblablement, on ne peut pas inclure l'appareil de mesure dans le système étudié... De nos jours, cette expérience est réalisée de manière courante avec des photons jumeaux. » (p. 36)

« La mécanique quantique insiste sur le fait qu'on ne peut concevoir que ce qui est mesurable. Elle refuse l'idée d'une réalité sous-jacente plus fine qui nous serait cachée parce que nos appareils de mesure sont trop grossiers et perturbent violemment le système...  Pendant longtemps, mécanique quantique et variables cachées sont apparues comme deux points de vue opposés, mais en quelque sorte équivalents dans leurs prédictions pratiques des résultats de mesure. On parlait d'une autre interprétation de la mécanique quantique... 
Mais John Bell a montré en 1964 qu'aucune théorie physique remplaçant la physique quantique par une théorie locale à variables cachées n'est compatible avec celle-ci ... Les deux points de vue ne sont pas équivalents. L'un et l'autre s'opposent à travers une inégalité simple démontrée par Bell. » (p. 37-38)
« Une proposition d'expérience fut alors élaborée... L'expérience a démontré que le résultat de la mécanique quantique était imparable: l'inégalité de Bell est violée ...massivement. .. Il est donc indubitable que la mécanique quantique et les variables locales cachées sont incompatibles. Cela nous condamne donc à cette mécanique quantique bizarre parce que pas intuitive. Nous ne savons pas très bien ce que veut dire mesure, et, en tout cas, son caractère non local est quelque chose d'ahurissant. Mais c'est une réalité expérimentale.
... Mais les propositions qui tendent à rendre compatibles la mécanique quantique... et la gravitation ne sont aujourd'hui que de pures conjectures sans contrepartie expérimentale. » (p. 40)
« Il ne fait pas de doute que la validité de la mécanique quantique ne sera pas remise en cause » (p.41)

2.2- Discussion 

a) Bernard d'ESPAGNAT- « Je me rappelle Jacques Merleau-Ponty... posant que le soleil existe vraiment, tout à fait indépendamment de nos possibilités de connaissance, un être naturel auquel se réfère le mot "soleil". Alors, est-ce que c'est le cas, ou est-ce que ce n'est pas le cas? Les personnes qui ont travaillé sur la théorie de la décohérence n'ont pas toutes la même réaction à ce sujet-là. Certains estiment que la décohérence ne peut pas servir à justifier de telles théories, appelées par elles "métaphysiques", d'un Soleil existant indépendamment de toute connaissance humaine. D'autres, au début de leurs recherches sur le sujet, ont semblé qu'elle le peut et que c'est ainsi qu'elle doit être interprétée. » (p. 48)

b) Edouard BREZIN- « Notre combinatoire est devenue plus complexe parce que ... nous avons... des objets sub-nucléaires qu'on appelle des quarks... On sait qu'ils existent, mais on ne peut pas les produire... Tout se passe comme s'ils étaient là, mais on ne peut pas se libérer de l'attraction qui les lie à l'intérieur de nos particules, alors que, dans les premiers instants de l'univers où la température était considérable, ils étaient déconfinés. Mais ils ne le sont plus...  » (p. 50)

c) Bernard d'ESPAGNAT- «.. la question délicate de ce qu'on entend par "réel". Il y a la définition "abstraite" qui se réfère à la notion d'existence considérée comme première et pose qu'est réel ce qui existe indépendamment de nous... Il y a aussi, à l'autre extrême, celle qui est implicite dans l'expression courante "Il faut être réaliste", qui renvoie à nous puisqu'elle signifie que nous devons tenir compte des données et des phénomènes tels qu'ils se présentent et agir en conséquence » (p. 50)

d) Olivier REY- «... Il ynan beaucoup de choses paradoxales dans la physique quantique qui perdent ce caractère paradoxal à partir du moment où on voit la science, non pas comme la science du monde tel qu'il est, mais de la façon dont nous interagissons avec lui... » (p. 57)

3. "Physique quantique, apparences et réalité" (Echange de vues)

a) Michel BITBOL- « Pourrais-je introduire le thème de la conscience en disant ce à quoi me fait penser la notion de réalité indépendante. Souvent, M. d'Esapagnat, vous parlez de la réalité indépendante en sous-entendant par là une réalité indépendante de nos esprits. En même temps, la réalité indépendante de nos esprits n'est pensable que par un esprit. Lorsque nous évoquons une réalité indépendante, nous faisons une opération d'auto-abstraction, nous nous abstrayons de cette réalité que nous voudrions penser comme indépendante de nous. Mais nous ne devrions pas oublier que cette opération d'abstraction n'est elle-même qu'un mouvement de notre esprit! Dès lors, nous sommes forcés de reconnaître que toute réalité à laquelle nous avons affaire ne se présente jamais que comme objet... d'un acte conscient.... Au total, la réalité ne se donne jamais que comme corrélat, immédiat ou médiat d'une conscience ».

b) Bernard d'ESPAGNAT- «Vous écartez l'acte de foi, qui consiste à dire qu'il existe une réalité extérieure à nous, autrement dit, que nous ne sommes pas les seuls existants... » (p.67)

c) Hervé ZWIRN- « Cela nécessiterait que nous définissions de manière un peu plus précise le terme de "réalisme"... Ce dont on parle, ..; c'est essentiellement ce que l'on pourrait appeler le réalisme métaphysique, c'est à dire le fait de savoir si, oui ou non, il existe une réalité indépendante de l'esprit de tout observateur. Ça, c'est e premier problème. 
Le deuxième problème... c'est le fait de savoir si cette réalité est intelligible et si la physique actuelle, telle qu'elle constituée, décrit adéquatement cette réalité.» (p. 69)

d) Michel BITBOL- « Kant écrivait une très belle phrase... dans sa Critique de la raison pure : "Concertant un tel noumène [1], nous ne connaissons pas du tout  s'il se trouve en nous ou encore hors de nous". Bien sûr, pense Kant, la chose en soi "nouménale"... pourrait nous être extérieure au sens traditionnel spatial; mais elle pourrait aussi bien être un simple prolongement de nous-mêmes, qui nous excède de toutes parts et qui manifeste, par cet excès, que nous ne sommes pas seuls, que nous n'enfermons pas tout ce qui est dans les bornes de notre conscience. » (p. 73-74)

e) Carlo ROVELLI- «Nous avons appris que cette réalité complexe qu'on a développée, c'est plsu compliqué que ce que nous avons appris, mais nous venons de l'apprendre. Est-ce vraiment nécessaire de savoir le rôle précis de la notion de réalité pour utiliser la notion de réalité? Je pense que non.» (p. 77)

f) Michel BITBOL- « La mécanique classique est prédictive parce qu'elle est descriptive... En revanche, en physique quantique la prévision est avancée en quelque sorte à l'état nu. Il n'y a aucune description d'un processus spatio-temporel qui sous-tende la capacité prédictive de la théorie. La raison profonde pour laquelle il en va ainsi, c'est que les phénomènes quantiques sont entièrement suspendus aux conditions expérimentales de leur apparition, ce qui n'est pas le cas en physique classique. Ce sont des phénomènes au sens le plus évident du terme, c'est à dire au sens d'événements qui se manifestent au laboratoire devant tout le monde; mais pas au sens des physiciens  qui, à mon avis, confondent souvent, dans leur vocabulaire, phénomène et processus. Un processus, c'est ce qu'on reconstruit comme se passant dans le monde; un phénomène, c'est ce qui apparaît ... devant nos yeux » (p. 81)

g) Michel BITBOL-« Est-ce que les mathématiques sont simplement une réalité cognitive? Ou bien est-ce qu'il y a quelque chose de plus que simplement notre activité cérébrale? ... Je crois qu'on peut vraiment soutenir la thèse qu'il existe des aspects fondamentalement objectifs dans les calculs... Alain Connes... a énormément insisté... sur le fait que tous les critères d'objectivité sont réunis par les mathématiques.... Et pourtant, les mathématiques ne sont pas ontologiques. Elles sont la preuve qu'il y a une objectivité non ontologique... Beaucoup de philosophes, pas seulement Wittgenstein, ont essayé d comprendre pourquoi les mathématiques expriment la transcendance par excellence tout en étant purement humaines. C'est pourquoi je trouve intéressant de décaler les paradoxes de la physique vers le paradoxe des mathématique, en utilisant le fait que les mathématiques sont fondamentales dans la physique» (p. 88-89)

h) Carlo ROVELLI-« Quand Newton a introduit le concept de force, l'Europe entière a dit "Non, non, non, ça, c'est de l'irréalisme!"... Le réalisme devait être fort... Les réactions devaient exister seulement pour des choses qui se touchent. La notion de force, c'est de l'irréalisme ...Pour nous, maintenant, la notion de force fait parie du réalisme. Nous avons changé complètement de conception de la réalité » (p. 94)

4. "Approche expérimentale de la décohérence" 

4.1- Exposé de Jean-Michel RAIMOND 

« Je voudrais vous montrer que superposition, complémentarité et décohérence sont trois faces d'un même dé....
Pendant longtemps, ces affaires de décohérence, d'intrication, de non-localité étaient considérées comme de pures curiosités intellectuelle pour philosophes » (p. 106)
«La mécanique quantique admet des superpositions d'états... » (p. 106).   
« Cette superposition se manifeste ... essentiellement  dans les phénomènes d'interférence, et en particulier dans le plus simple, l'expérience des franges de Young... S'il y a une modulation de probabilité de présence sur l'écran, c'est précisément parce qu'à une étape intermédiaire, la particule est à la fois dans les deux chemins. .. Les interférences sont des manifestations directes du principe de superposition quantique... » (p. 107-108). Voir la vidéo "Single electrons build up interference pattern" sur www.youtubebe.com/watch?v=ZUI3lhRje_0.» (p 108)
« .. On voit le caractère ondulatoire de la particule dans les interférences. Peut-on lui donner aussi un caractère corpusculaire? Peut-on demander à la particule par quel chemin elle est passée? Oui, en principe au moins.... Si la fente est assez légère pour être mise de manière appréciable en mouvement et, donc, qu'on puisse dire par quel chemin elle est passée la particule, alors la position de la fente est tellement incertaine qu'on n'a pas de franges d'interférences sur l'écran. On a donc le choix entre deux extrêmes. Soit on sait par où est passée la particule en prenant une fente très légère et en regardant si elle se met en mouvement ou non, mais alors on n'a pas d'indice que la particule puisse se comporter comme une onde. ... Soit on renonce à savoir par où elle est passée, ce qu'on fait dans les interféromètres ordinaires, en ayant une fente macroscopique qui pèse des kilos, auquel cas on a effectivement un signal d'interférence montrant le caractère ondulatoire de la particule, mais alors on n'a pas le moindre indice d'un caractère corpusculaire. Il y a eu un grand nombre de variantes proposées pour cette expérience de complémentarité... Onde et particule sont deux aspects complémentaire de l'objet quantique » (p. 110-111)
« Nous allons voir que complémentarité et intrication sont forcément liées. L'intrication, vous savez ce que c'est: deux systèmes quantiques qui ont interagi sont, après interaction, dans un état global non séparable. Il n'est pas possible d'attribuer un état quantique propre, une fonction d'onde, à l'un et à l'autre des deux sous-systèmes. C'est le paradoxe d'EPR (Einstein Podolsky Rosen): l'état d'un système est déterminé à distance par la nature et le résultat d'une mesure sur l'autre. C'est contraire au postulat classique de localité... Le bons sens a tort: c'est fâcheux, mais c'est comme ça  »(p. 114-115)
« En fait, il y s'agit là d'un phénomène très général. Les interférences sont détruites dès que la particule s'intrique avec n'importe quoi, c'est -à-dire q'il y a deux états de ce n'importe quoi qui sont différents suivant que la particule a suivi un chemin ou l'autre... Autrement dit, si la particule laisse quelque part, n'importe où, une information même non lue -ce n'est pas la peine que quelqu'un regarde, ce n'est pas la peine de faire intervenir une conscience- sur la position  de la particule,... alors on n'aura pas de franges, on n'aura plus de phénomène d'interférence. » (p. 116)
« Cela nous donne donc l'idée que, plus les objets sont complexes, plus ils vont s'intriquer avec l'environnement et moins il y aura de superpositions quantiques, ce qui nous conduit au problème de savoir pourquoi il n'y a pas de superposition quantique à notre échelle... » (p. 117)
« Il y a une décohérence à la frontière classique/quantique. Mais où est cette frontière? » (dessin de Michaël Ramus, p. 119)
« La décohérence c'est donc important pour comprendre pourquoi on ne voit qu'une toute petite partie des états possibles, pourquoi je suis là et pas en même temps dans mon bureau, pourquoi les choses sont blanches ou noires et pas blanches et noires à la fois.... »(p. 118)
« La décohérence consiste simplement à reconnaître qu'un système quantique est forcément couplé à un environnement complexe et qu'il l'est d'autant plus qu'il est lui-même complexe. » (p. 120). « La décohérence revient donc essentiellement à tenir compte du couplage à l'environnement. Je ne pense pas qu'il existe, à ce jour, une théorie générale de la décohérence, qui dise que, dans tous les cas, on peut décrire proprement le couplage d'un système sans faire aucune hypothèse ni sur le système, ni sur l'environnement »(p. 121)
« Il existe des "états pointeurs"... qui sont des états stables, ou quasi stables, en présence de l'environnement, des états qui, pratiquement, n'évoluent pas, même si le système est couplé à l'environnement... Par exemple, dans le cas du mouvement brownien, les états positions sont des états quasi stables parce que, en gros, tout ce que fait une particule  qui a une position donnée, est d'avoir un petit mouvement... En revanche, si on forme une superposition d'états pointeurs, on montre, dans tous ces modèles, qu'elle est très rapidement transformée en un mélange statistique... qui décrit simplement  quelque chose où tout se passe comme si le système était préparé une fois sur deux dans l'état pointeur a et une fois sur deux dans l'état pointeur b. Cette évolution de la superposition vers le mélange bien entendu, prend un certain temps, très bref, appelé, assez logiquement, temps de décohérence » (p. 123)
« A quoi ressemblent ces états pointeurs? Il y a un joli terme qui a été introduit par Zurek: le "darwinisme quantique"[2] (p. 126) ... Il y a des "états pointeurs" qui disséminent leur copie dans l'environnement... et sont "les états les plus aptes à la survie.  (diapo p. 127)»
« Je crois qu'il y a deux choses, essentiellement, dans ce que dit la décohérence sur la mesure: 
La première chose, c'est que, finalement, l'incertitude sur le résultat est une simple alternative probabiliste classique... Dieu joue aux dés, c'est vrai, mais ce sont des dés classiques ...  (p. 127) Quelque chose de plus subtil est, à mon sens, que c'est la décohérence qui définit la quantité mesurée. » (p. 128)

Discussion de Bernard d'ESPAGNAT- «Je suis un peu perplexe... Les dés sont classiques à nos yeux, nous apparaissent classiques. »
Discussion de Jean-Michel RAIMOND- «Ne me posant pas de problèmes philosophiques, j'ai tendance à identifier les deux points de vue [dés classiques et décohérence]... ce qui me sert à décrire tout ce que je peux faire dans une expérience pratique avec la réalité...  C'est un point de vue pragmatique »
Discussion de Bernard d'ESPAGNAT- «Il me semble qu'il y a quand même une différence, parce qu'en physique classique vous pouviez faire cette identification sans aucun problème... En physique quantique c'est plus compliqué (p. 130)... Dans la pensée classique ordinaire, celle disons du matérialisme à son apogée, l'identification allait jusqu'à la métaphysique, alors qu'en physique quantique, on ne peut la pousser jusqu'à son extrême... »
(p. 130-131) 
Discussion de Jean-Michel RAIMOND- «Je suis pratiquement sûr qu'il serait impossible, dans le cadre strict de la physique quantique, de répondre à la question philosophique, et donc, ne sachant pas y répondre, je préfère ne pas me la poser...  J'ai très peur de buter dans les solipsismes [3] "Le monde n'existe pas" ou la fonction d'onde de l'univers (p. 131)... Dans a décohérence... quand elle vient d'un objet macroscopique, ... les temps de récurrence sont tout à fait gigantesques, bien plus longs que la durée de vie de l'Univers. Il n'y aura plus d'Univers, l'Univers ne sera plus que rayonnement longtemps avant qu'un temps de récurrence se produise, donc, cela n'a aucun sens  (p. 132... La décohérence ne dit rien sur le pourquoi ni le comment de l'émergence d'un résultat unique quand on fait une mesure, l'instanciation ...»

« Un "objet mésoscopique" est un champ de quelques photons dans une "boite à photons" »(diapo p. 137)
«Alors, comment va-t-on préparer un chat? On va mettre un champ mésoscopique cohérent dans la cavité  et on va coupler avec lui un système .... (p. 140) d'états dont toutes les propriétés peuvent être calculées classiquement... Ils ont une très grand durée de vie, ils sont facilement détectables. (p. 140)... Qu'est ce qu'on va faire d'eux? On va faire interagir l'atome et le champ... de façon non résonnante (p. 141)... On est capable de préparer le chat: on envoie l'atome, il crée une superposition d'états de phase et puis on efface l'état de l'atome, et il reste dans la cavité un chat de Schrödinger, c'est à dire cette superposition de deux états cohérents de phases différentes. Ce qu'on est capable de faire, c'est de reconstruire l'état de ce chat en fonction du temps... C'est une matrice compliquée, pas très visuelle... On y voit tout ce qu'on attend d'un chat. On voit deux "oreilles". Ce sont les deux composantes qu'on attend, qui sont en superposition. Elles ont bien la forme d'une oreille de chat (p. 147)... Comme c'est une superposition quantique, on a, à l'instant initial, entre les deux oreilles, un "sourire" ou des "moustaches"... Ce chat, j'ai oublié de le dire, contient douze photons en moyenne. Plus précisément, la séparation entre les deux oreilles est de douze photons. ... Je vais vous montrer maintenant la vie et la mort d'un chat, 50 millisecondes dans la vie d'un chat. .. Ce qu'on constate c'est que les moustaches disparaissent (p. 148) après 20 millisecondes... Les oreilles sont toujours là, l'énergie est toujours là, il y a toujours un champ, mais ce n'est qu'une superposition quantique, ce n'est qu'un mélange statistique. Si on dépouille ce film systématiquement, on est capable de mesurer un temps de décohérence, et on le trouve conforme à la théorie. On est capable, vraiment, de préparer un chat à l'instant initial, et de regarder comment il décohère de manière très quantitative... (p. 149) »
« Donc, il y a un joli triangle entre décohérence, intrication et complémentarité. Une expérience de décohérence, c'est une expérience de (p. 151) complémentarité qui met en évidence l'intrication du système et de son environnement. Bien entendu, au milieu du triangle -on peut dessiner un triangle maçonnique avec l'oeil au milieu- il y a la superposition quantique qui est au coeur de tout" (p. 152»

4.2- Discussion 

a) Hervé ZWIRN- « Une probabilité de 10-50 a-t-elle un sens physique quelconque? Pour l'interprétation philosophique de la décohérence, ...dans le cas où on assimile des probabilités très faibles à zéro,... on peut considérer que la décohérence nous dit que le monde devient classique. En revanche, dans le cas où on considère qu'une probabilité extrêmement petite n'est pas réductible à zéro, alors, la décohérence ne suffit pas à rendre le monde classique » (p. 159)

b) Hervé ZWIRN- « Sur un plan philosophique, ...il devient légitime de se dire: "soutenir que la décohérence aboutit à rendre le monde classique" voudrait dire en logique modale: "nécessairement, la décohérence aboutit à l'âge classique". Cela s'interprète dans la  théorie des mondes possibles ainsi: "Dans tout monde possible, la décohérence aboutit à un état classique". Or, cela est faux, parce qu'il existe des mondes possibles qui ne sont pas le nôtre et dans lesquels la décohérence ne conduit pas à un état classique ..» (p. 167)

c) Jean-Michel RAIMOND- « C'est de la philosophie pure. il est claire que ce monde possible aurait des lois physiques qui seraient probablement très différente du nôtre. En ce sens,... la physique de base serait très différente du nôtre et peut-être le problème de la décohérence ne se poserait-il même pas. » (p. 167)

d) Hervé ZWIRN- « C'est une possibilité, mais je parle d'un autre monde possible qui serait en tous points semblables au nôtre, mais qui ne différerait que par les ordres de grandeur qu'on aurait le droit de manipuler... (p. 167)

e) Jean-Michel RAIMOND- « Je crains qu'à la réflexion, on constate que ce monde aurait, finalement, des propriétés tellement aberrantes qu'on serait en train de dire n'importe quoi. Qu'il ne pourrait, en quoi que ce soit, être  un tantinet semblable au nôtre » (p. 168)

5. "Aspect théorique de la décohérence"

5.1- Aperçu sur une conception non standard de la décohérence

a) Alexei GRINBAUM- « Pour moi, la décohérence est liée à la complexité de l'observateur. Le seuil de description d'un système en tant que système quantique n'est pas le même pour deux observateurs dont l'un est beaucoup plus complexe que l'autre » (p. 170)

b) Jean-Michel RAIMOND- « S'il y a deux observateurs, peut-il y avoir une description objective du système sur laquelle les deux soient d'accord? » (p. 171)

c) Alexei GRINBAUM- «... Les observateurs dont les complexités ne sont pas très indifférentes - et je donne un critère mathématique de ce que cela signifie- seront d'accord sur la caractérisation des systèmes » (p. 171)

d) Alexei GRINBAUM-« Ma vision ne part pas du théâtre de la nature comme le fait souvent la physique.... Mon point de vue de la mécanique quantique part du constat épistémique selon lequel l'observateur interagit avec les systèmes  et les observe en obtenant ainsi de l'information. Dans cette vision, "ce qui existe réellement autour de nous" n'a pas sa place, et donc, les notions d'univers, ou de système isolé par rapport à l'environnement ne sont pas définies » (p.172)

e) Michel BITBOL-« Parler d'esprit engage nécessairement à y associer la conscience. Mais dans le paradigme fonctionnaliste, l'esprit est seulement défini... comme un complexe de fonctions d traitement de l'information et de direction des actions, implémentable sur toutes sortes de support matériels. Le mot "esprit" est utilisé spécifiquement comme marqueur d'un niveau fonctionnel et informationnel d'organisation qui s'oppose au niveau de son substrat élémentaire » (p. 175)

f) Alexei GRINBAUM-« L'élément qui permet de distinguer ces deux niveaux est, je pense, l'efficacité de telle ou telle description pour construire des théories. La seule raison qui peut nous pousser à faire ce pas est d'essayer d'expliquer les choses qu'on ne peut pas expliquer autrement » (p. 175)

g) Michel BITBOL-« Cela signifie qu'un processus, aussi important pour la physique quantique que la décohérence, ne peut pas s'expliquer si on décrit l'observateur seulement en tant que système physique: il faut lui assigner des propriétés fonctionnelles, des propriétés qui relèvent du logiciel plutôt que du matériel. Il faut peut-être même lui assigner des projets, des visées... » (p. 175)

5.2- échanges relatifs à la conception non standard de la décohérence

a) Bernard d'ESPAGNAT- « Zurek.. exprime ... qu'il faut admettre la distinction entre système et environnement... Cela monte que cet article ne prétend pas résoudre le problème ... de l'existence des systèmes  (p. 179)... Cela revient à souligner que,  apparamment, nous ne sommes pas capables de connaître le réel en soi. (p. 180)»

b) Jean-Michel RAIMOND- « La contribution importante de ce papier est d bien expliquer qu'il y a une objectivité relative à plusieurs observateurs indépendants, qui sont tous parts de l'Univers et qui, tous, partagent une parie de l'environnement. Toutes ces parties leur fournissent la même information sur le système si celui-ci est dans un état pointeur. il y a donc une réalité objective commune pour ces observateurs » (p. 181)

c) Bernard SAINT-SERNIN- «  Je dois parler devant l'Association Française de biologie végétale de la différence entre nature et artifice, à propos du problème particulier des OGM... Un des arguments utilisés touche à la notion de réalisme... Est-ce qu'un corps obtenu par synthèse ou à la suite de modifications effectuées en laboratoire peut avoir les mêmes propriétés et être considéré comme identique qui a évolué sous l'effet de causes dites naturelles?  » (p. 183)

d) Bernard d'ESPAGNAT- « Je ne crois pas que la mécanique quantique ait quelque chose de particulier à dire concernant le problème que vous soulevez » (p. 185)

e) Olivier REY- « L'un des problèmes, dans cette discussion philosophique, vient de ce que, très souvent, on pense que, parce que quelque chose es qualifié de quantique, cela doit avoir un effet visible étonnant, qui soit différent du monde classique. Ce que montre la décohérence, c'est qu'un système peut être totalement quantique tout en ayant un comportement qui nous parait classique, sans que cela pose le moindre problème » (p.186)

f) Hervé ZWIRN- « ... la question de savoir pourquoi le monde nous apparaît tel qu'il nous apparaît, qui, hors décohérence, posait problème (de nombreuses hypothèses, y compris celle de la réduction du paquet d'ondes par la conscience, sont maintenant plus ou moins abandonnées par la plupart des physiciens) est quasiment réglée par le mécanisme de la décohérence » (p. 190)

g) Bernard d'ESPAGNAT- « J pense pour ma part que l'usage de la notion d'observateur conscient permet de faire mieux » (p. 191)

5.3- Echange de vues pour et contre le réalisme

a) Bernard SAINT-SERNIN- « Historiquement, le problème du réalisme est lié à une question théologique très classique: le problème de la garantie divine. Autrement dit, la première définition du réalisme, celle que l'on trouve dans l'antiquité est: "Avons-nous accès à la raison divine lorsqu'elle a créé le monde et lorsqu'elle l'entretient?" Le problème du réalisme  change de nature à partir du moment où on se dit qu'il faut construire une science sans garantie divine. Les fondateurs de la science moderne, que ce soit Descartes, Newton ou Leibnitz, etc... pensent que nous pouvons accéder à une sorte de vision de Dieu, plus ou moins difficilement. Mais, c'est à partir de=u XVIIIe siècle que le problème change complètement de nature. Que signifie créer une science par des moyens strictement humains et sans se référer à l'idée d'un esprit infini avec qui nous aurions une communication? A partir de ce moment-là, la notion de réalisme change assez profondément de nature » (p. 199)
b) Jean-Michel RAIMOND- « J'aimerais bien qu'on se passe autant de Dieu que de la conscience pour faire de la physique »c) 
c) Bernard SAINT-SERNIN- « Bien sûr. Mais historiquement, c'est ce qui s'est passé. C'est tout »
d) Jean-Michel RAIMOND- « Je ne sais pas ce que c'est que la conscience, mais le fait qu'il faille faire intervenir des objets pensants dans la description physique du monde me déplaît beaucoup »
e) Hervé ZWIRN- « C'est un point central de notre discussion. Nous cherchons tous à éliminer ce recours à la conscience, qui ressemble au recours à Dieu, d'une certaine manière. Dieu a été éliminé et plus personne ne soutient les idées qui avançaient que la réduction du paquet d'ondes était due à une action directe de la conscience sur le système. Il n'empêche qu'il me semble qu'il est possible de prendre en compte la conscience au sens suivant: la conscience n'a aucune action physique pour réduire un système, mais ce que nous observons se fait, dans un sens kantien, à travers tout un ensemble de "filtres" qui font que ce que nous observons ne peut pas être totalement indépendamment de ce que nous sommes. Cela me semble quelque chose à considérer et c'est quand même moins gênant que le recours à une idée divine ou une conscience ayant une action directe. Les nouvelles théories qui font intervenir la théorie de l'information sont proches de cette idée » 
f) Jean-Michel RAIMOND- « J'espère que, s'il faut faire intervenir une conscience, c'est plutôt un degré de complexité minimum de ce qui observe ». (p. 199)

5.4- Aspects mathématiques du conflit entre mécanique quantique et location spatio-temporelle

a) Jean PETITOT- « Pour nous, observateurs humains, la caractéristique du monde macroscopique est sa localisation spatio-temporelle... En mécanique classique, l'espace des états est un espace de phases.... Les observables sont des fonctions définies sur cet espace de phases... On a une dualité entre espace et fonction: on a des points (les états) dans un espace de représentation (p.204)... En mécanique quantique, la situation est tout à fait différente: on a un espace d'états... Le problème est de comparer la physique statique classique avec ce schéma de la mécanique quantique... Comme c'est cet espace de phases qui garantit la localisation, la localisation est liée au fait qu'un norme groupe opère sur l'espace des états. L'incohérence de la mécanique classique, c'est à dire sa décohérence, est fondamentalement liée à ce type de "localisabilité"». (p 205.206)

6. La théorie de l'onde pilote de Louis de Broglie et David Bohm

6.1- Exposé de Frank LALOË 

a) Principes généraux (p.216)

b) Trajectoires (p.223)

c) La mesure (p. 236)

d) Théorie des champs Bohmienne (p. 246)

e) Réserves. Deux niveaux de la réalité dans la théorie dBB (p. 247)

6.2- Débat

a) Hervé ZWIRN- « Il est clair que la théorie de Bohm ne permet pas de rétablir un réalisme classique habituel, ... mais nous pouvons rester réalistes dans un sens un peu différent du réalisme classique puisque nous pouvons nous passer de l'observateur... La théorie de Bohm est déterministe, alors que la mécanique quantique ne l'est pas.» (p. 250)....« Elle ne permet pas de prédire les choses, mais sur le plan conceptuel, cette théorie semble plus satisfaisante que la mécanique quantique où il y a quand même un indéterminisme essentiel que l'on ne parvient pas à éliminer... Dieu ne joue aux dés qu'une fois, alors qu'en mécanique quantique, il y joue tout le temps. » (p. 251)

b) Hervé ZWIRN- « Quelle que soit la connaissance précise qu'on a de l'état du système en mécanique quantique, état décrit par la fonction d'onde, il y a, pour chaque mesure, un indéterminisme qu'on ne peut pas éliminer. Alors qu'en théorie de Bohm, l'indéterminisme est lié au fait qu'on ne peut pas connaître la distribution initiale. Mais, à distribution initiale donnée, il n'y a plus d'indéterminisme. Tout est déterminisme.
Si on dit que l'indéterminisme est lié au fait de ne pas connaître l'état final lorsqu'on connaît l'état initial, alors la mécanique quantique est essentiellement indéterministe et pas la théorie de Bohm .... Mais on peut aller un cran plus loin et considérer que si nous n'arrivons pas à prédire le résultat en théorie bohmienne, ce n'est pas parce que le processus est intrinsèquement indéterministe, mais parce qu'il nous est impossible de connaître l'état initial précisément. Alors qu'en mécanique quantique, la position est un peu différente: on connait l'état initial aussi précisément qu'il est possible de le connaître, puisqu'il n'y a rien d'autre, mais malgré cela, on ne peut pas prédire l'état final » [4] (p. 253)

c) Michel BITBOL- « Bohm, à la fin de sa vie, disait que l'espace et le temps étaient eux-mêmes un processus émergent, et qu'il fallait imaginer une dynamique sub-spatio-temporelle comme niveau de base à cette émergence ». (p. 257)

d) Edouard BREZIN- « La mécanique classique est fondamentalement paradoxale et non causale. En effet, elle résulte d'un principe de moindre action. Dans ce principe, pour trouver la trajectoire, il faut supposer que la lumière, par exemple, sait de quel point elle part et jusqu'à quel autre elle veut aller. C'est absolument ahurissant. La lumière, quand elle se propage, ne sait pas à quel point elle veut aller. Pourtant, sa trajectoire résulte bien d'un principe de moindre action. Elle est non causale, et cette non-causalité est expliquée pour la première fois par la mécanique quantique... » (p.259)

7. La théorie de l'onde pilote: problèmes et difficultés

7.1- Compléments de Franck LALOË

a) Les ondes vides (p. 262)

b) Le choix retardé (p. 267)

c) Richesse de la description dBB (p. 269)

d) Rejet de la théorie DBB pour de mauvaises raisons (p. 269)

e) Le grand succès de la théorie dBB: mécanisme des ondes vides (p. 270)

f) Déterminisme (p. 270)

a) Hervé ZWIRN- « On voit bien qu'à partir du moment où les positions initiales de toutes les particule de l'univers sont fixées au moment du Big Bang, même si on ne peut jamais les connaître, tout le reste est fixé, en termes de physique pure. Il n'y a plus de libre arbitre. Le choix qu'opère l'expérimentateur pour fixer la position était déjà écrit au moment du Big Bang. Tandis qu'en physique quantique, l'indéterminisme est rejoué à chaque fois, puisque, même en connaissant totalement l'état à un moment donné, il reste une incertitude... En théorie de Bohm, tout s'est joué au départ, tandis qu'en mécanique quantique, on rejoue à chaque fois, ce qui peut laisser une part au libre arbitre. En revanche, en théorie de Bohm, il n'y a aucun libre arbitre.» (p. 272)

g) Réalisme (p. 272)

7.2- Débat

a) Roger BALIAN- « Que l'on fasse de la mécanique quantique ordinaire ou du Bohm, on est, de toute façon, obligé de se dire qu'une mesure est l'interaction de deux objets quantiques: un objet quantique qui est l'objet mesuré et un autre qui est l'appareil de mesure. Et comme l'appareil de mesure est grand, il en ressort un résultat qu'on peut lire. Il s'agit de comprendre ce phénomène, mais, en définitive, tout cela est quantique, globalement. L'approximation selon laquelle l'objet est classique et l'appareil le perturbe et celle selon laquelle l'appareil est classique sont toutes les deux fausses. Tout ensemble est quantique, mais le résultat de la mesure n'est pas une propriété de l'objet lui-même. C'est une propriété de l'objet telle qu'on l'observe avec l'appareil » (p. 291)
b) Bernard d'ESPAGNAT- « C'est donc un abandon du réalisme ontologique »
c) Roger BALIAN- « Oui »
d) Bernard d'ESPAGNAT- « C'est une importante étape franchie par rapport à la pensée classique qui identifiait la réalité à quelque chose qui existe en soi et qu'on peut connaître »
e) Roger BALIAN- « Mais la réalité n'est pas l'image que l'on s'en fait, d'une particule qui aurait une position et une vitesse. La réalité est quelque chose qu'on essaie d'aborder » (p.291)
f) Roger BALIAN- « Premièrement, il est évident que la réalité existe. Deuxièmement, il est non moins évident que l'on ne peut pas connaître totalement la réalité en soi. » (p.292)

g) Hervé ZWIRN- « ... On constate  que la science a fait des progrès et que l'on arrive, au travers d'outils comme les probabilités, à décrire de mieux en mieux non pas ce qu'on a postulé comme existant indépendamment de tout observateur, mais l'image phénoménale que nous en avons. Le fait de progresser de plus en plus pour décrire les phénomènes, ce qui est incontestable, ne dit en rien si on s'est rapproché ou pas de ce qu'on a postulé » (p. 293-294)

h) Michel BITBOL- « Il faut à la fois "ça marche" et "c'est simple". "ça marche " ne suffit pas en soi » (p. 296)
i) Hervé ZWIRN- « La simplicité est souvent invoquée dans les théories scientifiques. Si une théorie est plus simple, elle est plus pratique... Mais dire cela, c'est vraiment mesurer à l'aune de notre cerveau. Or il n'est pas acceptable d'utiliser une mesure à l'aune de notre cerveau alors même qu'on parle de l'existence de quelque chose qui est complètement indépendant de notre cerveau. Il y a là une erreur de raisonnement. Peut-être que s'il existe, ce quelque chose qui est complètement indépendant de notre cerveau, ce quelque chose fonctionne-t-il de manière totalement différente de ce qui nous parait simple. Pourquoi est-ce que, parce que c'est simple, ce serait plus vrai? Il n'y a pas de raison. » (p. 297)

8. L'interprétation relationnelle de la mécanique quantique et le paradoxe EPR (Einstein Poddsky Rosen)

7.1- Exposé de Matteo SMERLAK

a) L'interprétation relationnelle (p. 300)

b) Retour sur l'argument EPR (p.305)

c) Quelques corrélats philosophiques (p. 309)
- L'interprétation relationnelle est-elle solipsiste?
- L'interprétation relationnelle est-elle anti-réaliste?
- L'interprétation relationnelle est-elle  réaliste ?
-  Commentaires sur l'interprétation relationnelle 

7.2- Discussion

a) Carlo ROVELLI- « Deux problèmes centraux...
- celui de la notion de système... La mécanique quantique présuppose le fait d'avoir une notion de système bien définie... Je serais plus heureux que la compréhension du monde n'ait pas besoin de commencer par briser le monde en sous-systèmes.
- celui de la définition de l'observateur... Sa définition a toujours été la partie la plus sombre de la construction de la mécanique quantique... La seule position claire est celle de Wiger qui dit que l'observateur, c'est la conscience ... (p. 318). Pour moi, c'est de dire que c'est n'importe quel système physique... Je considère que n'importe quel couple de systèmes physiques peut fonctionner dans l'interaction comme l'un étant l'observateur de l'autre.... Evidemment, ensuite, ... si l'on fait des observations au sens d'un laboratoire, on utilisera des systèmes "observateurs" appropriés » (p. 319)

b) Hervé ZWIRN- « On touche au problème le plus difficile: savoir le type d'entités auxquelles on est prêt à faire jouer le rôle d'observateur. On a envie de dire qu'on voudrait se passer de la notion de conscience pour décrire le monde. Mais, est-ce que tous ces problèmes d'interprétation ne signifient pas, par essence même, qu'on se place d'un point de vue intentionnel?... C'est à dire qu'en réalité, les problèmes qu'on se pose ne sont pas des problèmes d'évolution du monde indépendamment de nous ... Nous parlons de problèmes d'interprétation. Or, qui dit interprétation, dit quelqu'un qui se pose la question de savoir comment tout cela est cohérent par rapport à lui. Il est très difficile, même si on en a tous envie, de faire l'économie d'un observateur au sens de quelqu'un ayant un point de vue intentionnel. Et c'est par rapport à ce point de vue intentionnel qu'on va ensuite essayer de rétablir la cohérence.» (p. 321-322)
c) Hervé ZWIRN- « Toute interprétation qui a pour but de rendre compte de ce qu'on observe en tant qu'êtres humains doit se référer, à un moment donné, à des limites -qui sont des limites humaines-, donc à une conscience.» (p. 332)
d) Jean PETITOT- « La finitude n'implique pas la conscience »
e) Hervé ZWIRN- « en tout cas, la finitude est la cause de ce qui apparaît à notre conscience et on ne peut employer le verbe "apparaît" que relativement à une conscience » (p.333)

9. Echanges de vues sur l'interprétation relationnelle et le théorème de Bell

9.1- Exposé de Michel BITBOL (p.340)

« Le théorème de Bell... exclut la conjonction de deux hypothèses: le réalisme à propos des propriétés des particules et la localité de chacune de ces propriétés . Il accroissait la portée à l'exclusion du réalisme des événements expérimentaux et la localité de ces événements .... C'est sur le caractère impensable de nier la réalité [des événements expérimentaux] qui est visible qu'il rendit impératif de renoncer à la localité rejeter la localité des événements expérimentaux »(p. 341)

« Bell pensait donc qu'il est impossible d'ignorer la non-localité » (p. 342)

« Dans la théorie d'Everett, "il n'y a pas d'association d'un présent particulier avec un passé particulier... Nous n'avons pas accès au passé, nous avons seulement nos souvenirs et nos enregistrements  »

9.2- Discussion (p.345)

9.3- Exposé de Alexei GRINBAUM 

«Selon le principe de Rolf Landauer, effacer l'information, c'est produire de la chaleur » (p. 353)

« L'idée des capacités limitées d'un observateur a peut-être des conséquences permettant de comprendre les fondements de ma mécanique quantique » (p. 354)

9.4- Discussion 

a) Jean PETITOT- « Quand vous avez une protéine et qu'il suffit qu'il y ait un photon pour qu'un phénomène de stéréochimie change sa configuration, il s'agit d'un phénomène typiquement quantique »

b) Alexis GRINBAUM- « Il n'y a aucune raison, a priori, de considérer que l'homme est spécial et que la notion d'observation lui soit réservée. Tout comme la notion de temps ne le lui est pas » (p. 359)

Hervé ZWIRN- « Il faut alors définir ce qu'est l'observation. Si on la réduite à la notion d'interaction, pourquoi pas? Cela ne me gène pas, si c'est cela une définition. Mais, ce n'est pas ce qu'on appelle habituellement une observation, dans laquelle il y a une notion d'interprétation... Mais pourquoi alors conserver les deux mots. Dans "Observation", il y a quelque chose de plus que dans "interaction" » (p.359)

9.5- Commentaire de Bernard d'ESPAGNAT et discussion 

a) Jean PETITOT- « je vous invite à relire Leibnitz. La réalité ne peut pas être spatio-temporelle » (p.370)

10. La théorie de la mesure

10.1- Exposé de Roger BALIAN

a) L'interprétation statistique (p. 371)

b) Le modèle de Curie-Weiss (p.377)

c) L'ensemble de toutes les mesures possibles (p. 380)

d) Comment passer aux processus individuels: sous-ensemble de mesures (p. 382)

e) Conclusions (p.391)

10.2- Discussion (p.393)

11. La gravité quantique à boucles

11.1- Exposé de Carlo ROVELLI

« Mieux vaut décrire la réalité en termes d'interactions et non d'objets... Les processus sont des faits, c'est à dire ce qui se passe. La réalité est l'ensemble des faits. » (p. 409)

11.2- Discussion (p.419)

 

 

[1] Le noumène (en grec ancien νοούμενoν / nooúmenon) est un terme employé à l'origine par Platon pour désigner les «  », c'est-à-dire la réalité intelligible (par opposition au monde sensible), accessible à la connaissance rationnelle. Au contraire, chez Emmanuel Kant, auquel le terme de « noumène » renvoie le plus souvent, il s'agit de tout ce qui existe et que la sensibilité ne peut atteindre, restreignant par là les prétentions de la raison quant à la connaissance. « Noumène » est parfois considéré comme synonyme de chose en soi, faisant référence aux faits tels qu'ils sont absolument et en eux-mêmes, par opposition au terme de phénomène, faisant référence à ce qui est connaissable.

[2] Source: "Le darwinisme quantique mène-t-il à une impasse ontologique ?" de Bernard Dugué
L’un des enjeux du darwinisme quantique est d’expliquer comment à partir d’une description quantique portant sur une nature irréductible à notre univers classique, notre univers émerge de ce monde quantique pour autant qu’un tel monde existe. Le lien physique entre quantique et classique est très particulier. Il se dessine notamment à travers la décohérence, phénomène dont l’étude expérimentale n’a pu être réalisée que dans les années 1990 alors que la théorie de la décohérence, dont Zurek est aussi un père fondateur, a été élaborée dans les années 1980 après avoir été imaginée en 1970 par Heinz-Diter Zeh.
Le darwinisme quantique constitue une épistémologie permettant d’expliquer comment un état est observé avec le processus décohérence, au même titre que la correspondance fut une épistémologie introduite par Bohr pour raccorder les deux mécaniques, quantique et classique...
Les physiciens ne s’accordent pas sur ce qu’est un état quantique mais à supposer que ces états existent alors imaginons-les comme des minuscules pièces de puzzle en papier. Le monde classique est alors imaginé comme une fresque faite de céramique. Lors de la mesure classique, tout se passe comme si un morceau de papier (qui est décrite par un vecteur d’état ce qui signifie qu’un état est fait d’une superposition de feuilles de papier possédant une qualité chacune) vient faire une tache sur la fresque en céramique. Cette tache est une information ; elle n’est plus en papier mais en céramique. Le projet du darwinisme quantique, c’est de comprendre comment ces pièces de « papier quantique » peuvent se combiner pour former une « céramique classique ».

[3] Le solipsisme (du latin solus, seul et ipse, soi-même) est une « attitude » générale pouvant être théorisée sous une forme philosophique et métaphysique, « […] d'après laquelle il n'y aurait pour le sujet pensant d'autre réalité acquise avec certitude que lui-même […]» (Petit Robert)

[4] Le "paradis" créé par Dieu aurait-il été un monde "physique quantique" dans lequel le péché originel aurait généré une incohérence avec la "physique classique". Les physiciens élaborent péniblement des théories de la décohérence pour essayer de réconcilier les deux.

 

Connaissance de...

...l'état initial
(paradis terrestre)...

...l'état final
(monde naturel après le péché originel)...

...par Dieu

OUI par essence

NON, car cela impliquerait qu'il imaginait le péché et ses conséquences

...par Adam

OUI, par le don préternaturel de science

NON, car s'il avait su qu'il perdrait ses dons préternaturels, il n'eut peut-être point péché

"En mécanique quantique, il y a un indéterminisme qu'on ne peut pas éliminer.... on connait l'état initial aussi précisément qu'il est possible de le connaître, puisqu'il n'y a rien d'autre, mais malgré cela, on ne peut pas prédire l'état final" (Hervé Zwirn, "Le monde quantique" p. 253)

Comme en physique quantique, on trouve dans le paradis le paradoxe de la délocalisation. 
Dans ce chapitre, Hervé Zwirn montre les différences entre la théorie de Bohm et la mécanique quantique traditionnelle. Hervé Zwirn s'amuse à dire qu'avec la théorie de Bohm, Dieu ne joue aux dés "qu'une fois, alors qu'en mécanique quantique, il y joue tout le temps" (p. 251). Voilà qui plaide pour une théologie de la "conservation de  la création" du jésuite Francisco Suarez ! 
Mais, nous ne nous laisserons pas aller à toutes ces idées dans la mesure où, semble-t-il, l'homme aurait tort de construire une théologie à partir de sciences elles-mêmes corrompues par la chute originelle. Nous soulignons aussi que cet "état final" n'est qu'un vocabulaire de la physique quantique alors ce ce n'est qu'un état transitoire. L'escathologie nous ouvre vers un monde surnaturel qui, lui, sera véritablement "final".