“L'amertume finit par tuer"
(Pierre Billon / "L'enfant du cinquième nord")
Le mensonge de Satan dans le jardin d’Eden, a engendré la peur : « Je me suis caché dit Adam, car j’ai eu peur ». La peur engendre aussitôt la violence avec une première atteinte à la vie : « Abel, de son côté, fit [offrande] d’un des premiers-nés de son troupeau » ! Et Pourtant, « L'Eternel porta un regard favorable sur Abel et sur son offrande » (Gen 4,4)
La violence continue avec Caïn se jetant sur Abel en le tuant.
Dieu le lui reproche : « La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à moi ». (Gen 4, 10), mais sans accepter que quiconque puisse porte la main sur Caïn : « Si quelqu'un tuait Caïn, Caïn serait vengé sept fois ». (Gen 4, 15). Après le Déluge, Dieu accepte la mort de l’animal : «Tout ce qui se meut et possède la vie vous servira de nourriture ; je vous donne tout cela au même titre que la verdure des plantes. Seulement vous ne mangerez pas la chair avec son âme, c’est-à-dire le sang (Dam)» (Gen 9, 3-4). Mais Dieu assigne une limite dont le but est de structurer l'humain : ne pas manger de chair animal avec son âme, c'est dire le sang. Or le mot hébreux Nephesh a deux sens : celui du sang, de ce qui respire, du souffle, de l'âme, de l'être intérieur, mais aussi celui de la vengeance, de la volonté d'éliminer l'identité profonde d’un être. Le théologien André Wenin pose bien le problème :"Qu'est ce qui peut conduire un homme à une telle violence, sinon ces mouvements intérieurs sur lesquels la loi n'a pas prise, à savoir la haine et l'envie ?" La limite fixée par Dieu "cherche à mettre en garde moins contre la violence elle-même que contre ce qui la meut dans les profondeurs du coeur humain... C'est précisément quand elle est l'instrument aveugle de la haine que la violence ne laisse aucune chance à la vie et à l'altérité".
En revanche, le commandement fait à Noé et à ses fils est formel : « Si quelqu'un verse le sang de l'homme, par l'homme son sang sera versé » (Gen 9, 6).
Que fait notre monde contemporain de ces préceptes divins ? … Quelques exemples pour montrer combien, après avoir tué, on n’est plus vraiment soi-même !
Analyse: Les2ailes.com
Tuer un animal, c’est se transformer soi-même.
Noémie Calais est éleveuse de cochons noirs dans le Gers. Elle milite pour l’abattage familial à la ferme. Aujourd’hui, ce n’est autorisé qu’à raison deux animaux par an, uniquement destinés à la consommation familiale de l’éleveur. Or, ce n’est pas toujours évident de devoir les emmener à l’abattoir, situé à deux heures de route aller-retour de sa ferme. « Quand je les mets dans la bétaillère, j’ai l’impression de les avoir trahis. Je suis la main qui nourrit, qui caresse, à quel moment je peux être la main qui abat ? », s’interroge-t-elle. Elle évoque la façon dont elle fait face à la mort de ses animaux : « Tuer, c’est aussi se transformer soi-même. J’ai tué une part d’innocence en moi, elle est devenue respect." Elle explique : "Lorsqu’on a tué un animal de sa propre main, on ne peut plus jamais consommer de viande de la même manière, on ne peut plus gâcher un bout de viande comme un abat." Une réflexion qui pousse l’agricultrice à souhaiter que chaque carnivore puisse faire l’expérience de tuer soi-même un animal. "C’est une utopie, mais je le souhaite de tout mon cœur, parce qu’on ne peut pas manger de la viande dans l’ignorance, il faut être en conscience. On mange quand même un être qui a été vivant, sensible. Donc c’est quelque chose qu’on ne peut pas faire à la légère", insiste-t-elle[1].
Quand il euthanasie un homme, le médecin meurt en lui.
Le témoignage de Claire Fourcade dit la même chose: « Dans une équipe de soins palliatifs, …j’ai souvent arpenté ce chemin qui mène aux portes de la mort. J’écoute, avec les oreilles, bien sûr, mais aussi avec les yeux pour mieux entendre ce qui ne peut pas se dire, avec les mains pour toucher la douleur et le mal ?... De mes consultations, je sors toujours épuisée. Alors, si je devais ensuite, en point final, même si on me le demandait, tuer celui qui m’a parlé : préparer la seringue, entrer dans la chambre, dire un mot -lequel d’ailleurs ?-, injecter les produits, recueillir le dernier soupir, consoler la famille et signer le certificat ! Alors je crois que moi aussi, je mourrais. Le médecin en moi mourrait. Comment ensuite prendre à nouveau le risque d’écouter vraiment ? Comment ne pas devenir un gigantesque cimetière ?...
J’accompagne des vivants qui n’ont que faire d’un médecin qui serait mort à l’intérieur ».[2]
Peut-on se guérir d’un viol par le meurtre de l’enfant à naître ?
Ayala Isenberg, 20 ans, a donné son témoignage à la suite d’une conception par viol. En tant que jeune adolescente et en choisissant de ne pas avorter. Lorsqu’elle a conçu sa fille, Rachel, à la suite d’une agression sexuelle à l’âge de 15 ans seulement, elle a rejeté l’avortement.
On lui demande : « Que pensez-vous que l’avortement apporte aux victimes de viol ? À votre avis, qu’est-ce que cela leur apporte ? Parce que beaucoup de gens n’y ont pas vraiment réfléchi, je suppose, mais ils supposent inconsciemment qu’une fois qu’on enlève le « bébé violé », -terme inapproprié- ça rend la situation meilleure. »
Ayala Isenberg répond : « L’avortement n’a rien à voir avec la guérison d’un viol »… « Je ne vois aucune manière dont cela puisse guérir, ou progresser de quelque manière que ce soit, pour cette femme, cette survivante comme moi, d’aller dans une clinique d’avortement, d’être attachée à une table, de se faire enlever violemment son enfant, ce qui est souvent très traumatisant, puis jeté sur le bord de la route » et le centre d’avortement lui a dit de simplement « nous appeler si quelque chose arrive… Cela ne guérit pas… En fait, pour moi, l’avortement ressemble beaucoup à ce que l’on ressent après avoir été agressé sexuellement… je dirais aussi que les conséquences de la perte de ce bébé vont durer toute une vie »[3].
Le dilemme du combattant
Le film « Tu ne tueras point » de Mel Gilson raconte l’histoire de Desmond, un jeune américain, confronté à un dilemme : comme n’importe lequel de ses compatriotes, il voulait servir son pays pendant la seconde guerre mondiale, mais la violence était incompatible avec ses croyances et ses principes moraux. Il s’opposait ne serait-ce qu’à tenir une arme et refusait d’autant plus de tuer.
Fin 1941, il s’engagea tout de même dans l’infanterie comme médecin. Son refus d’infléchir ses convictions lui valut d’être rudement mené par ses camarades et sa hiérarchie, mais, armé de sa seule foi, il est entré dans l’enfer de la guerre pour en devenir l’un des plus grands héros. Lors de la bataille d’Okinawa sur l’imprenable falaise de Maeda, il a réussi à sauver des dizaines de vies, seul, sous le feu de l’ennemi, ramenant en sureté, du champ de bataille, un à un les soldats blessés.
[1] Interview du 5 octobre 2022 sur RCF
[2] Claire Fourcade, médecins en soins palliatifs à Narbonne, présidente de la Société française d’accompagnements et de soins palliatifs (SFAP) ; Lettre ouverte à Emmanuel Macron – Paris Match du 21.11.2023
[3] LifeSite, 11 janvier 2024