Un référendum va proposer aux électeurs suisses de modifier la constitution pour limiter la surpopulation Suisse et mondiale! Les dix auteurs de ce projet sont des militants de l'association "Ecopop" (Association pour l'environnement et la population) et ont dénommé leur initiative "Halte à la surpopulation - Oui à la préservation durable des ressources naturelles". "Ecopop" agit depuis plus de 40 ans contre la surpopulation et son impact sur l'environnement. Leur fierté consiste à ne pas considéré qu'il soit tabou de se référer à Théodore Monod qui aurait cité cette phrase de Mirabeau: "Les hommes sont comme les pommes, quand on les entasse ils pourrissent".
L' idéologie de la dite surpopulation avance comme un rouleau compresseur dans nos démocraties. Qu'en est-il?

Source: Chancellerie fédérale suisse

Commentaire: les2ailes.com

État du projet d'initiative populaire

 

Ce projet a fait l'objet d'un message du Conseil fédéral le 23 octobre 2013.
La collecte des signatures a commencé le 3 mai 2011. Les sections locales de l'UDC, des Verts et des Verts'libéraux ont participé à la récolte de signatures.
Le seuil des 100.000 signatures a été dépassé le 4 décembre 2012, obligeant la confédération à soumettre ce projet au vote du peuple.
Ce projet n'est pas le même que celui qui a été voté le 9 février 2014 et qui s'intitulait "contre l'immigration de masse". La collecte des signatures avait commencée pratiquement en même temps le 26 juillet 2011.

Objectifs de l'initiative populaire

 

Faire en sorte que la population suisse ne dépasse pas le seuil de préservation durable des ressources naturelles.
Moyens proposés:
- Consacrer 10% des budgets d'aides au développement àau financement de mesures visant à encourager la planification familiale volontaire
- Ne pas signer de traités internationaux contraire à cet objectif. Les traités existants seront renégociés dès que possible ou seront dénoncés par la Suisse.

Une thématique ancienne

 

Déjà Pier-Paolo Pasolini, disait que « procréer est aujourd’hui un délit écologique[1] ».
Cette thématique était stratégique pour les USA au point de rédiger un Mémorandum NSSM-200[2]. Son auteur, H. Kissinger, expliquait, de manière très cynique, pourquoi réduire la démographie des pays les moins avancés est stratégique pour les États-Unis et qu’il est donc « urgent que des mesures de réduction de la fertilité soient mises en place », et que « les dépenses pour des services efficaces de planning familial sont généralement l’un des investissements les plus rentables pour les pays les moins avancés[3] ».
Mais le souci américain étant d’éviter une image interventionniste dans les Pays les Moins Avancés, le rapport propose d’avancer caché derrière des idéaux plus subtiles en accord avec les droits de l’homme. L’auteur explique qu’il faut mettre l’ONU en avant: "Pour aider à parvenir à nos autres objectifs, nous devrions indiquer notre priorité pour le droit des individus et des couples à déterminer librement et de façon responsable le nombre et l’espacement de leurs enfants et d’avoir l’information, l’éducation et les moyens d’y parvenir[4]".
La mise en exergue des droits des individus n’est qu’un paravent, car il est ensuite écrit que : "L’acceptation de la stérilisation des hommes et des femmes s’est répandu dans plusieurs régions quand un procédé simple, rapide, et sûr. [Elle est] aisément disponible. La stérilisation des femmes a été améliorée grâce à des avancées techniques comme les laparoscopes, culdoscopes,[5] qui ont simplifié considérablement les techniques chirurgicales abdominales. D’autres améliorations […] et techniques plus simples peuvent être développées. Pour les hommes plusieurs techniques courantes tiennent leurs promesses[6]".

 

La surpopulation, une thématique Onusienne

 

Ce prétendu risque est très présent dans les questions de développement durable. Ainsi, la grande résolution du millénaire avait décliné huit objectifs pour éradiquer, d’ici 2015, la vulnérabilité des peuples les plus pauvres. C’est louable et indispensable, mais, derrière l’objectif « assurer à tous une éducation primaire », on a vu percer des programmes de lecture utilisant des manuels de protection contre le virus VIH/SIDA. Une recommandation est faite aux éducateurs d’inverser les priorités : compréhension des objectifs du manuel -la protection sexuelle-, au mépris de l’apprentissage de la lecture[7] qui n’est qu’un accessoire. On a ensuite élaboré de grands objectifs autour de :
-     la promotion de l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes –grâce à la déconstruction des modèles familiaux,
-     la réduction de la mortalité infantile –grâce au droit à l’avortement,
-     l’amélioration de la santé maternelle –grâce à la contraception-,
-     le combat contre le VIH/SIDA –appuyé exclusivement sur des programmes inefficaces de diffusion du préservatif.

Certaines ONG environnementalistes ne cachaient pas que ces objectifs en matière d’éducation avaient l’arrière pensée de réduire ainsi la démographie en particulier dans les pays les plus pauvres. On prétend qu’il faut lutter contre la vulnérabilité induite par l’illettrisme, mais, en fait, on participe à la déstructuration des civilisations en rendant les individus esclaves d’idéologies de mort.

 

Les ressources naturelles: un concept mal défini

Il ne faut pas oublier, dans ce concept, l’importance au travail de l'homme, sa capacité de programmation, son imagination qui le conduisent à mettre en œuvre un « processus productif d’élaboration technique et économique des ressources disponibles et naturelles[8] ».
Parler de la même manière, et sans un certain recul, de ressources d’énergie à l’époque de la tourbe, du charbon, du pétrole, du nucléaire, et demain d’autres techniques risquerait de mener à des contre-sens en matière de morale. Serions-nous redevables aux générations passées de ne pas avoir gaspillé la tourbe par solidarité pour nous ? À l’évidence non, car les ressources revêtent des formes multiples en fonction des techniques disponibles à chaque époque.
C’est ce processus technique qui conduit à la formation de la richesse, sous une multiplicité de formes de ressources.
Le mot ressources doit être utilisé dans un contexte d’exigences « de notre temps, en fonction des besoins et des ressources de l’homme »[9]. Est à considérer, comme une ressource, tout ce qui a vocation à satisfaire les besoins de l’homme. Son contenu est donc, par essence, variable.
On entend par ressources « tous les biens et services auxquels les sujets économiques, producteurs et consommateurs privés et publics, attribuent une valeur pour l’utilité qui leur est inhérente dans le domaine de la production et de la consommation[10] ».
Ce serait un raccourci de limiter l’usage de ce mot à la seule notion de ressources naturelles. Certes, il ne faut pas pour autant légitimer le gaspillage, mais un concept de ressources étriqué conduit à des idéologies faisant le lien avec la démographie.

La position du Magistère de l'Église

 

Le Compendium condamne fermement une instrumentalisation des esprits consistant à prendre prétexte de l’écologie pour promouvoir une décroissance démographique : « Le lien étroit qui existe entre le développement des pays les plus pauvres, les mutations démographiques et une utilisation durable de l’environnement, ne doit pas servir de prétexte à des choix politiques et économiques peu conformes à la dignité de la personne humaine »[11].

Quant au courant de pensée qui voudrait que croissance démographique et développement durable soient incompatibles, le Compendium conteste cela formellement : "S’il est vrai que la répartition inégale de la population et des ressources disponibles crée des obstacles au développement et à l’utilisation durable de l’environnement, il faut reconnaître que la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire[12] : il existe un large consensus sur le fait qu’une politique sur la population n’est qu’une partie d’une stratégie de développement général[13]".

Le cardinal Martino rappelait qu’à l’occasion de la Conférence internationale du Caire Population et Développement (1994), à laquelle il avait pris part en qualité de chef de délégation, « le saint Siège, avec de nombreux pays du tiers-monde, a dû s’opposer à l’idée selon laquelle l’augmentation de la population dans les décennies à venir aurait été telle qu’elle aurait entraîné l’effondrement des équilibres naturels de la planète et empêché le développement ». Ceux qui soutenaient cette vision des choses « voulaient empêcher ce supposé désastre pour l’environnement avec des moyens pas du tout naturels, comme le recours à l’avortement et la stérilisation de masse dans les pays pauvres à haute natalité ».

Benoît XVI, lui aussi, dans Caritas in veritate, s’est inscrit en faux contre ceux qui considère le contrôle démographique comme un progrès culturel : "En plusieurs endroits du monde subsistent des pratiques de contrôle démographique par les instances gouvernementales, qui souvent diffusent la contraception et vont jusqu’à imposer l’avortement. Dans les pays économiquement plus développés, les législations contraires à la vie sont très répandues et ont désormais conditionné les coutumes et les usages, contribuant à diffuser une mentalité antinataliste que l’on cherche souvent à transmettre à d’autres États comme si c’était là un progrès culturel[14].
[...] Considérer l’augmentation de la population comme la cause première du sous-développement est incorrect, même du point de vue économique.
[... Au contraire] l’ouverture moralement responsable à la vie est une richesse sociale et économique. De grandes nations ont pu sortir de la misère grâce au grand nombre de leurs habitants et à leurs potentialités. En revanche, des nations, un temps prospères, connaissent à présent une phase d’incertitude et, dans certains cas, de déclin à cause de la dénatalité qui est un problème crucial pour les sociétés de bien-être avancé. La diminution des naissances, parfois au-dessous du fameux "seuil de renouvellement", met aussi en difficulté les systèmes d’assistance sociale, elle en augmente les coûts, réduit le volume de l’épargne et, donc, les ressources financières nécessaires aux investissements, elle réduit la disponibilité d’une main-d’œuvre qualifiée, elle restreint la réserve des "cerveaux" utiles pour les besoins de la nation. De plus, dans les familles de petite, et même de toute petite dimension, les relations sociales courent le risque d’être appauvries, et les formes de solidarité traditionnelle de ne plus être garanties
[15]".
L’instrumentalisation de la question démographique par une dérive écologiste est donc clairement condamnée. Mais quels sont les principes d’actions recommandés ?

La démographie : une responsabilité exclusivement familiale

Le principe absolu est que « seuls les époux peuvent juger de l’intervalle entre les naissances et le nombre des enfants à procréer ». C’est leur droit inaliénable qu’ils doivent considérer « envers eux-mêmes, envers les enfants déjà nés, la famille et la société[16] ».
On voit souvent l’Église intervenir, dans les instances internationales, contre les programmes du Planning Familial. Pourquoi ? Le Compendium l’explique en rappelant que : "L’intervention des pouvoirs publics, dans le cadre de leurs compétences, pour diffuser une information appropriée et adopter des mesures opportunes dans le domaine démographique, doit être effectuée dans le respect des personnes et de la liberté des couples : elle ne peut jamais se substituer à leurs choix[17]. Les diverses organisations opérant dans ce secteur sont encore moins habilitées à le faire[18]".
La conclusion est très claire : « Tous les programmes d’aide économique destinés à financer des campagnes de stérilisation et de contraception ou subordonnés à l’acceptation de ces campagnes doivent être moralement condamnés comme des attentats à la dignité de la personne et de la famille. » Où chercher la solution aux questions liées à la croissance démographique ? Elle « doit être plutôt recherchée dans le respect simultané aussi bien de la morale sexuelle que de la morale sociale, en encourageant une plus grande justice et une solidarité authentique pour assurer dans tous les cas la dignité à la vie, à commencer par les conditions économiques, sociales et culturelles[19] ».

L'avis de Dominique Bourg

Son avis est intéressant car ce philosophe français a été invité comme "expert" en écologie devant la conférence des évêques à Lourdes lors de la 50ème Assemblée plénière des évêques de France du 4 au mardi 9 novembre 2010. Il a confié, le 9 mars 2014, à la Radio Télévision Suisse : « on ne peut pas augmenter indéfiniment le contenu d'un continent.... la population est un facteur de dégradation de l'environnement? Le fait de poser la question haut et fort n'est pas inintéressant! ». Dominique Bourg, comme à son habitude, manie la peur. Tous les thèmes y sont:  la capacité alimentaire de la planète fragilisée par l'augmentation de la population, les sécheresses qui se multiplient avec le changement climatique, la consommation de viande rouge, le pétrole consommé pour produire des engrais, l'exploitation des phosphates, la dégradation des sols... Tout y est pour faire croire à la gravité du facteur population. Dominique Bourg précise sa pensée : « Le choix est très difficile, c’est-à-dire comment à la fois essayer de réduire la démographie en blessant le moins possible nos autres valeurs. .. L'idée de réaffecter 10% des budgets d'aide au développement vers le contrôle des naissances n'est pas absurde... Il ne faut pas imposer cette mesure, mais la négocier... Il faut chercher à réduire les naissances ». Comment Mgr Stenger, en charge des questions environnementales à la conférence des évêques de France, a-t-il pu proposer à ses frères dans l'épiscopat, un tel "expert" qui trouve intéressante l'idée de réorienter les aides aux plus pauvres vers le planning familial ?


[1] Pier Paolo Pasolini, quotidien milanais Corriere della Sera, 30 janvier 1975, cité dans Écrits corsaires, Flammarion, p. 156.

 

[2] Henry Kissinger, National Security Study Memorandum, Rapport de 200 pages, 1975 disponible en anglais sur Internet : [http://wlym.com/text/NSSM200.htm]. Lire l’analyse détaillée qui en a été faite par Stanislas de Larminat, dans Les contrevérités de l’écologisme, Salvator, Paris, 2011, p. 185 à 192.

 

[3] Henry Kissinger, Résumé exécutif du National Security Study Memorandum, § 15.

 

[4] Ibid, § 34.

 

[5] Les laparoscopes sont des endoscopes spécialisés dans l’examen visuel direct de la cavité abdominale et les culdoscopes sont spécialisés dans celui de la cavité pelvienne par l’introduction d’un endoscope dans le vagin.

 

[6]Henry Kissinger, National Security Study Memorandum, op. cit., § Rapport, Part II, § IV-a-2 d.

 

[7] Stanislas de Larminat, Les contrevérités de l’écologisme, op. cit., p. 167.

 

[8] Ibid., § 174.

 

[9] Compendium de la doctrine sociale de l’Église, op. cit., §10.

 

[10] Ibid., §346.

 

[11] Ibid., §483.

 

[12] Idem.

 

[13] Idem

 

[14] Benoît XVI, Caritas in veritate, op. cit., § 28.

 

[15] Benoît XVI, Caritas in veritate, op. cit., § 44.

 

[16] Compendium de la doctrine sociale de l’Église, op. cit., §234.

 

[17] Catéchisme de l’Église Catholique, op. cit., §2372.

 

[18] Compendium de la doctrine sociale de l’Église, op. cit., §234.

 

[19] Ibid., §234.