« L’adoration des bergers » de Philippe de Champaigne, (1628- Musée des Beaux-Arts de Lyon), représente un ange dans les nuées, proche de Dieu le Père, comme pour lui rendre compte du bon déroulé de Noël. Le projet initial nous fait

  • rêver à un Noël dans lequel le Christ nous entraîne de Noël à Pâques, sans passer par la "case" Vendredi Saint,
  • rêver à un Noël sans péché, un Noël d'enfant, un Noël sans mal ni souffrance,
  • rêver d'un Noël qui soit louange de Dieu pour sa création, pour cet Univers qui n'a pas, à l'origine, été victime de la "servitude de la corruption".

Il s’agit d’un vrai conte de Noël inspiré du Dialogue entre le Père et le Fils, dans la Romance de Saint Jean de la Croix (Œuvres complètes, Cerf, 2004, p.157 à 165).

Comment cela est-ce possible ? 

Source : "Resurection.org"

Actualité "les2ailes.com"

« L’un résidait en l’autre comme l’aimé en son amant », nous dit St-Jean de la Croix !  Le Père et le Fils vivent la même félicité infinie.

Et pourtant ! Le Père dit au fils : « rien ne me contente  si ce n’est ta compagnie. Je voudrais te donner une épouse qui t’aime et mérite de nous tenir compagnie » ! Cette épouse que Dieu veut donner au fils, c’est l’Église, c’est vous, c’est moi !

Et que répond le Fils ?
« Je t’en remercie beaucoup, Père : à l’épouse que tu me donneras, moi  Je l’appuierai sur mon bras, et avec une éternelle joie elle exaltera ta bonté ».

La romance se poursuit :

"Que cela soit",-dit le Père- "puisque ton amour le méritait". Et dans cette parole que je dis, il avait créé le monde, fait en grande sagesse un palais pour l’épouse ; lequel il divisait en deux appartements haut et bas, composait celui du bas de variétés infinies ; mais embellissait celui du haut d’admirables pierres précieuses, pour que l’épouse sache quel Époux elle possédait.

Dans le haut, il plaçait la hiérarchie angélique ; mais dans le bas mettait la nature humaine…
Ceux d’en bas dans l’espérance de foi qu’il leur infusait en leur disant qu’un temps viendrait où il les grandirait et qu’il relèverait cette bassesse [qui était] la leur, parce qu’il se ferait semblable à eux et qu’il s’en viendrait avec eux et habiterait avec eux ;

Il s'en viendra avec nous! Il habitera avec nous! Noël! Plan éternel de Dieu, imaginé avant même la chute originelle!

Noël préexiste au péché. Ainsi, comme à Noël, "Dieu serait homme et l’homme serait dieu" comme à Pâques! Rien que cela ! Seuls dieux créé par le seul Dieu non créé!

Mais, cette "bassesse qui était nôtre", ce n'est pas encore le péché, mais une diversité de nature  voulue par Dieu. Par nature, Il ne créa l’homme ni mortel ni immortel. S’il avait été immortel, il eut été créé Dieu. S’il avait été créé mortel, il eût semblé que Dieu fût la cause de sa mort. Il nous a créé capable des deux. Cette liberté humaine voulue par Dieu nous donne de pencher vers la voie de l’immortalité. Par ce retard imaginé à l'origine, Dieu a créé l’homme libre et maître de lui.

« Et le temps advint où se faire convenait, le rachat de l’épouse qui en rude joug servait dessous la loi ».

Le rachat est évoqué, mais le joug dont il est question est celui de la Loi. Ce qui rend l’épouse différente du Fils, c’est qu’elle a une chair et que Lui est un pur Esprit. Mais de péché, il n’est toujours pas question… Et sur ce point, saint Jean de la Croix rompt avec saint Thomas pour qui la raison de l’Incarnation, c’est le rachat du péché, «  propter nostram salutem ». Nous voyons ici Dieu décider, pour le plaisir, d’associer une épouse à son Fils. Il n’y a pas d’autres raisons à la création que cette surabondance d’amour du Père voulant donner à son Fils un supplément de joie et l’acceptation du Fils pour donner à son Père un supplément de gloire en Lui présentant une épouse digne de Lui.

Et comment tout cela ? « étant advenu le temps où naître Il devait, comme un Époux de son lit Il sortait  !... Et en une crèche Le déposait la gracieuse Mère, parmi d’aucuns animaux qui d’aventure là se trouvaient. Les hommes disaient chansons, les anges mélodie chantaient, faisant fête aux épousailles qu’entre deux tels il y avait ». Les Pères de l’Église ont repris ce verset du Ps.18 à partir duquel ils voient le Christ sortir du sein de la Vierge ayant consommé son union avec… la nature humaine.

À Noël, commence l’Union de la Personne même du Fils de Dieu avec la Vierge Marie qui est à la fois sa Mère et son épouse parce qu’ils sont unis l’un à l’autre, comme une mère avec son enfant, une épouse avec son époux.

A Noël, le péché est secondaire ! Non pas qu'il ne soit pas scandaleux, mais parce qu'il est arrivé en second prenant Dieu par surprise !

Alors, certes, en Dieu, l'échelle du temps n'existe pas. Il n'y a pas un temps avant le péché et un temps après. Mais cette image, incarnée dans le temps, nous permet d’oublier le péché au moins en ce jour de Noël !

Soyons dans la joie de notre nature déïfiable !