Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a décidé, le 2 mars, d’autoriser la mise sur le marché de la pomme de terre Amflora. L’annonce a choqué les ONG écologistes. Que faut-il en penser ?....

Source : Agra-Presse n° 3242 du 8 mars 2010 (page 1)

Commentaire de « les2ailes.com »

Le commissaire a indiqué que sa ligne de conduite sur ce dossier suivrait « un principe » : « L’innovation dans la responsabilité ».

La  variété de pomme de terre en question est « Amflora », une plante transgénique développée par la firme agrochimique allemande BASF et dont l’amidon est destiné à l’industrie papetière et à la fabrication de béton, et les épluchures à l’alimentation animale. Cette procédure d’autorisation avait été entamée il y a plus de sept ans.

En matière alimentaire, la variété a été également testée : le long processus d’évaluation préalable à sa décision : deux avis scientifiques de l’Autorité européenne pour la sécurité des aliments (EFSA), ainsi qu’une évaluation par l’Agence européenne du médicament (EMEA). « Une fois que les scientifiques se sont prononcés, je ne vais pas interpréter (leurs) positions en fonction de la cote d’amour que je souhaite avoir », a-t-il lancé, face aux violentes critiques adressées notamment par les organisations  environnementalistes Greenpeace et les Amis de la terre.

Essayons de poser en termes simples les termes de la balance « bénéfices-risques »:

Côté bénéfices.
Il faut savoir que la pomme de terre n’a pas seulement des débouchés alimentaires, mais également industriels pour la production d’amidons pour le glaçage des papiers, de colles et de texturants pour textiles.
Or, l'amidon est un mélange de 2 polysaccharides, l'amylose et l'amylopectine, qui ont la même formule chimique (C6H10O5)n mais dont les chaines moléculaires n’ont pas la même structure dans l’espace et ont donc des propriétés technologiques différentes. L’amylose dont la chaine moléculaire est courte, donne l’effet « bouillie » de la fécule de pomme de terre, alors que l’amylopectine aux chaines longues permet son utilisation comme produit structurant. L’industrie de l’amidon doit donc engager des process de séparation de ces deux éléments avec des rejets particulièrement polluants. La nouvelle variété « Amflora » permet d’améliorer le procédé de production de fécule de pommes de terre en gardant une seule des deux composantes de l’amidon : l'amylopectine. Les bénéfices environnementaux sont donc importants : des économies d'eau et d'énergie sont réalisées car les deux composants de l'amidon ne doivent plus être séparés chimiquement avant le traitement.

Côté risques.
Une fois de plus, les écologistes ont mis en avant un soi-disant danger : « Il y a de sérieuses inquiétudes au sujet d’un gène » de la pomme de terre Amflora « qui est résistant aux antibiotiques » a prétendu Martin Häusling, eurodéputé allemand du groupe des Verts. Il s’agit en fait de gènes marqueurs.
De quoi s’agit-il ?
Un gène est utilisé dans les laboratoires de biotechnologie des plantes au cours de la première étape de développement. Les gènes qui permettent d’obtenir les traits génétiques souhaités dans la plante - dans le cas d’Amflora celui qui permet de bloquer la production de l'amylose indésirable dans les pommes de terre - sont associés à un marqueur, par exemple, un gène conférant une résistance aux antibiotiques. Lorsqu'un antibiotique est appliqué sur les germes de la plante, les plantes qui n’ont pas le trait recherché disparaissent, tandis que les plantes ayant le trait souhaité et donc associées au marqueur, ne sont pas affectées. En laboratoire, les plantes avec et sans le trait désiré peuvent donc être distinguées les unes des autres.
Le 11 juin 2009, l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA), a publié ses conclusions après consultation de deux groupes de 21 scientifiques chacun. Il en est ressorti que le transfert de la résistance des bactéries aux cellules végétales n'a jamais été observé dans la nature. De plus, l'EFSA a indiqué dans un précédent avis, que cette même résistance aux antibiotiques et les gènes de résistance correspondants sont déjà très répandus dans les bactéries du sol.


A ces études, les ONG n’opposent que des « inquiétudes ».  Corinne Lepage, député européen, vice-présidente de la commission Environnement du Parlement, s’est contentée de déclarer le 2 mars 2010 que « cela constitue une véritable déclaration de guerre à l’égard des citoyens européens majoritairement opposés aux cultures OGM… Les OGM sont un enjeu de société qui ne peut pas être traité en dehors des procédures démocratiques, sous couvert de considérations techniques et commerciales ». On reconnait bien là le discours des ONG pour qui la « démocratie » consiste à imposer à la majorité, des discours anxiogènes tenus par des voix minoritaires.

Malheureusement, le commissaire européen est également revenu sur la proposition visant à laisser davantage de marge de manœuvre aux Etats membres de l’UE si ces derniers souhaitent autoriser ou non l’utilisation des OGM sur leur territoire. Un projet en ce sens sera présenté d’ici à l’été, a-t-il indiqué sans être en mesure à ce stade de préciser s’il s’agirait d’une véritable révision de la législation ou d’une simple lecture plus souple des textes actuels en ce qui concerne les clauses de sauvegarde que les pays de l’UE peuvent invoquer, comme six d’entre eux le font déjà pour le maïs Mon 810 (France, Allemagne, Luxembourg, Grèce, Autriche, Hongrie).