La pyramide démographique mondiale a été déséquilibrée en défaveur du sexe féminin du fait de 100 millions de femmes qui ne sont pas nées pour cause d’avortement. Qu’en est-il ?

Source : L’Osservatore Romano du 2 février 2012

Commentaire: "ordinatissima"

Le livre de Anna Meldosi

Le titre du livre italien de Anna Meldosi est explicite : « Jamais nées ! Comment le monde a perdu 100 millions de femmes ». L’auteur approfondit la question sur les plans statistique, biologique, et technico-scientifique.

Elle dénonce un véritable « gendercide », considérant que les estimations doivent tenir compte aussi bien de la tendance naturelle d’un nombre légèrement supérieur de garçons à la naissance, que de phénomènes historiques comme les migrations, qui, en général, concernent en majorité les sujets de sexe masculin. L’auteur garde donc à l’esprit les variables qui expliquent un nombre différent de femmes par rapport à leur nombre naturel.

Les raisons culturelles qui peuvent pousser à l’élimination des filles sont multiples :

  • La patrilinéarité des systèmes patriarcaux qui n’accordent aux femmes aucune garantie et donc aucun poids social
  • Le rôle des religions
  • Les menaces de la modernité, c'est-à-dire la possibilité de découvrir, à travers des analyses spécifiques, le sexe de l’enfant à naître, de manière à éliminer par l’avortement celui qui n’est pas désiré

Selon Anna Meldosi, les campagnes de contrôle démographique, en intervenant au moyen de stérilisations et d’avortements de masse, auraient aussi contribué à aggraver cette réalité : « le fait que tant de femmes, qui ne sont ni incultes ni marginales, décident d’avorter d’autres ‘’femmes’’, est bien évidemment comme un virus dans le système des argumentations pro-choice et représente un défi pour la pensée féministe, mais également pour tous les progressistes ».

L’auteur se pose des questions : L’élimination des fœtus féminin n’est-elle pas uniquement une extension logique du droit des parents de contrôler le nombre, le moment, l’intervalle et la qualité des enfants, désormais considéré sans appel ?

Les conséquences imaginables

D’ici 20 ans, ce déséquilibre risque de porter préjudice aux femmes elles-mêmes.

Ne risque-t-on pas d’assister à:

  • la difficulté des hommes à trouver des épouses ?
  • une avancée de l’âge des filles pour le mariage,
  • l’accès plus difficile à l’éducation
  • d’autres formes de violence envers les femmes (enlèvements d’adolescentes, trafic de femmes, viols collectifs…)
  • des trafics discriminatoires avec « achat » à des familles pauvres de leurs filles qui seraient ensuite revendues par des trafiquants à des célibataires en quête d’épouse. Ce seraient alors les hommes issus de familles pauvres qui resteraient célibataires, les familles aisées achetant des femmes à des intermédiaires[1].

[1] Source : Media-lab 10.2.2009