Georges Lemaître, prêtre belge et inventeur du concept de Big-bang, a été nommé en 1960 président de l’Académie pontificale des sciences. Cette nomination ne porte pas, en elle-même de signification.
Le Pape Pie XII, enthousiaste amateur d'astronomie, évoqua le Big-bang devant l'Académie pontificale des sciences, en 1951 : « Il semble, en vérité, que la science d’aujourd’hui…  ait réussi à se faire témoin de ce « Fiat Lux » initial, de cet instant où surgit du néant avec la matière, un océan de lumière et de radiations, … »[1].

Commentaire: ordinatissima

Après une discussion avec l'abbé Lemaître, Pie XII précisa toutefois, un an plus tard, en 1952, devant l'assemblée générale de l'Union astronomique internationale, qu’il convenait de  séparer les domaines de la science et de la religion. Il invita  les astronomes à « acquérir un perfectionnement plus profond de l’image astronomique de l’univers » [2].

Jean-Paul II reprendra cet appel à la prudence, dans une lettre envoyée en 1987 à l’ancien directeur de l’Observatoire du Vatican, le jésuite George V. Coyne, pour que les théologiens approfondissent toujours plus le dialogue avec la science contemporaine et les théories, même si elles sont, communément acceptées : « il faudrait poursuivre, plus avant, la sorte de dialogue intense avec la science contemporaine qui, dans l'ensemble, a fait défaut parmi ceux qui sont engagés dans la recherche et l'enseignement théologique. Cela impliquerait que certains théologiens, au moins, soient suffisamment avertis dans le domaine des sciences pour faire un usage authentique et créatif des ressources que les théories les mieux établies peuvent leur offrir. Une telle expertise leur éviterait de faire un usage critique et prématuré, à des fins apologétiques, de théories récentes comme celle du «Big-bang» en cosmologie. Pourtant, cela leur éviterait aussi d’attendre la pertinence potentielle de ces théories pour approfondir leur compréhension dans les domaines traditionnels de la recherche théologique »[3].

On a beaucoup glosé sur le fait que, le 3 octobre 1981, durant la cérémonie pontificale académique, le Vatican ait organisé une conférence sur la cosmologie en l'honneur du célèbre théoricien du Big-bang, Stephen Hawking, alors qu’il réfute toute intervention de Dieu dans la Création. Le Pape Jean-Paul II aurait rappelé que "nous avons raison d'étudier l'évolution de l'univers depuis le Big-bang, mais nous ne devrions pas explorer le Big-bang car il s'agit de l'instant de la Création et donc l'œuvre de Dieu". Nous n’avons pas retrouvé la référence de ce propos, mais il faut placer cette mise en garde en regard de celle de Benoit XVI.

Dans son homélie de la fête de l'Epiphanie 2011, il n’a pas contredit l’idée d’un Big-bang, mais a fait part de sa crainte qu’elle ne limite par trop notre esprit et ne nous empêche de voir l’inépuisable imagination de Dieu : « L’univers n’est pas le résultat du hasard, comme certains veulent nous le faire croire. En le contemplant, nous sommes invités à y lire quelque chose de profond: la sagesse du Créateur, l’inépuisable imagination de Dieu, son amour infini pour nous. Nous ne devrions pas permettre que notre esprit soit limité par des théories qui n’arrivent toujours qu’à un certain point et qui -à tout bien considérer- ne sont pas du tout en opposition avec la foi, mais ne réussissent pas à expliquer le sens ultime de la réalité »[4].

L’ensemble de ces réflexions montre que l’Eglise reste dans son domaine de compétence qui n’est pas de prendre position sur un fait scientifique, aussi populaire soit-il, comme le Big-bang. Elle n’en contredit pas, non plus, la pertinence, tout en mettant en garde contre un concordisme facile. Elle appelle à dépasser l’aspect purement scientifique des choses qui pourraient empêcher de voir l’immense amour de Dieu pour l’homme dans son geste créateur.

 


[1] « Les preuves de l’existence de Dieu à la lumière de la science actuelle de la nature », discours prononcé à l’Académie pontificale des sciences le 22 novembre 1951, trad. parue dans La Documentation catholique, n° 1110, 16 décembre 1951.

[2] Discours prononcé par S. S. Pie XII lors du congrès de l’union astronomique internationale à Rome (Italie), le 7 septembre 1952, trad. française dans La Documentation catholique, no 1131, 5 octobre 1952.

[3] Lettre de Jean-Paul II  au R.P. George V. Coyne, SJ, directeur de l’observatoire du Vatican,  lors de la semaine d’étude sur « Notre connaissance de Dieu et de la nature: Physique, Philosophie et théologie », organisée pour le 300ème anniversaire du principal ouvrage de Newton.

[4] Homélie de la fête de l'Epiphanie en la basilique du Vatican– 6.1.2011