Titre : "Le petit roman de la Chasse"
Année de parution : 2010
Auteur : Bruno de CESSOLE
Editions : Editions du Rocher
Préface : néant
 
CV de l’auteur : journaliste et critique littéraire
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Résumé

Ouvrage sur la chasse qui ressemble fort à une quête du bonheur que résume la formule d'Ortega y Gasset : "On ne chasse pas pour tuer ; on tue quelquefois, pour avoir chassé."

Commentaire

En guise de commentaire, nous reprenons intégralement le « Bloc notes » de Jean-Marc Bastière [1] qui résume l’ouvrage sous forme d’un éditorial

La Chasse est-elle Chrétienne ?

La chasse encourt de nos jours les jugements les plus sévères. La sensibilité contemporaine ne comprend pas cette pratique qui consiste à traquer le gibier à poil et à plume pour le tuer. « Comment peut-on éprouver du plaisir à verser le sang d’un animal ? », entend-on souvent.

Est-ce vraiment le cas ? Pour comprendre l’essence profonde de la chasse, à rebours des idées reçues, … Bruno de Cessole écrit : « Tout bon chasseur, au moment de la mort de sa proie, éprouve l’ambivalence d’une situation qui met en jeu la relation ancestrale de l’homme avec l’animal sauvage ». A ce moment fatidique, la joie trouble du dénouement se mêle d’une mélancolie profonde.

C’est cet écho venu du fond des âges qu’il est si difficile de percevoir aujourd’hui. Tout bon chasseur le connaît, d’une manière intime. Pendant des dizaines de milliers d’années, l’homme survécut d’abord comme chasseur. C’est ainsi qu’il se distingua des bêtes sauvages, en les affrontant et en triomphant de leur supériorité physique.

-          La mort mise à distance

Quand l’agriculture s’imposa, la chasse subsista, mais comme loisir sacré. Le cérémonial qui entoure la vénerie garde la trace de cette dimension sacrificielle immémoriale. C’est ce qui la rend à la fois si belle et, pour une sensibilité moderne, si gênante.

L’indifférence devant la souffrance ou  la cruauté gratuite ne sont pas des signes d’humanité. Et c’est un progrès réel que se préoccuper du sort des animaux. Mais la sensiblerie extrême peut masquer parfois un déni des réalités de ce monde.

Il y a quelques décennies, dans la France rurale, on savait ce que c’était que saigner un lapin, un poulet ou un cochon. Maintenant, cette dure besogne, externalisée, industrialisée, est perçue de façon abstraite, irréelle. Les enfants n’en n’ont plus idée. Comment la chasse, qui nous rappelle cette réalité fondamentale, ne pourrait-elle pas choquer ? On ne se nourrit pas moins de volaille ou de cochonnaille, mais la mort est mise à distance, empaquetée.

-          La vision de Saint-Hubert.

Saint-François d’Assise parlait aux oiseaux et apprivoisa un loup effrayant. Belle image préfigurant une Création nouvelle. Mais n’oublions pas, « qui veut faire l’ange fait la bête ». Nous sommes du Ciel, mais aussi de la terre. C’est cette réalité obstinée que nous rappelle la chasse. Saint-Hubert, duc d’Aquitaine, chassait du matin au soir jusqu’au jour où il vit, entre les bois d’un cerf, la croix du Christ. Bouleversé par cette vision qui révèle sa quête intérieure, il se convertit. Il est aujourd’hui le saint patron des chasseurs.
Le chrétien est-il un chasseur ? C’est du terme latin venator (d’où le mot « vénerie ») que saint-Thomas d’Aquin nommait le traqueur des vérités éternelles. Nous sommes là loin des forêts, des fusils et des gibecières sanguinolentes ; pourtant les métaphores, même divines, s’enracinent toujours dans l’humus de l’expérience humaine.


[1] Famille Chrétienne n° 1712 du 6 novembre 2010