Le projet de traité de libre échange transatlantique (TAFTA) inquiète. Est-ce le début d’importations de viandes aux hormones venant des USA ? Quel est le vrai problème? Nous élargirons la réflexion aux autres problèmes du TAFTA prochainement !

Analyse publiée dans « Actuailes n°54 »

De quoi s'agit-il ?

Qu’est ce qu’une hormone ?

Une hormone est une substance chimique produite par une glande endocrine, c’est à dire dont la sécrétion, à faible dose, s’écoule dans le sang, et agissant à distance sur des tissus ou d’autres glandes.

A quoi servent les hormones dans l’élevage des bovins ?

Aux USA, les éleveurs l’utilisent , par exemple, après la suppression des organes sexuels d’un taureau pour maîtriser ses comportements dangereux. Cette opération limite aussi sa croissance et une dose hormonale peut compenser. On produit aussi plus de viande maigre : un consommateur préfère une viande persillée, c’est à dire avec des filaments graisseux qui la rende à la fois plus tendre, ... mais, comme toutes les graisses animales, c'est moins bonne pour la santé humaine ! On peut aussi jouer sur la production de lait chez la vache. Aux USA, 96 % des bêtes sont traitées aux hormones.

L’avis de l’Organisation Mondiale de la Santé, et de l’Europe

Les organismes de l’ONU estiment que l’usage des stimulateurs de croissance en production animale est sans risque pour la santé humaine. Le Centre international de recherche sur le cancer est arrivé aux mêmes conclusions.
L’Europe, soumise à des groupes de pression écologistes, a décidé d’interdire l’usage des hormones pour la production animale. Pourtant près d’une dizaine d’expertises, de 1981 à 2013, ont conclu à l’absence de risque. L’UE a d’ailleurs été attaquée par le Canada pour entrave au libre-échange, se faisant reprocher de n’avoir pas scientifiquement justifié le risque pour la santé. 

Pourquoi n’y aurait-il pas de dangers ?

Des hormones naturelles sont présentes chez les bovins, traités ou non. Ainsi, deux steaks de 170 g, provenant d’un animal traité ou non, en contiennent à peu près autant.
Les hormones utilisées en élevage sont infimes par rapport aux hormones produites par l’homme lui-même : un homme produit chaque jour près de 36 000 fois la quantité d’œstrogène que l’on retrouve dans un steack "aux hormones" !
Enfin, dans l’alimentation humaine, le boeuf n’est pas le seul produit alimentaire à contenir des hormones. Ainsi, une cuillerée d’huile de soja contient presque 7 500 fois la quantité d’œstrogène que l’on retrouve dans un morceau de viande de 170 g.

Enfin, il ne faut pas oublier que les résidus d’hormones sont détruits dans l’estomac. 

Voilà pourquoi le codex alimentarius (ICI pour en savoir plus) est incapable de distinguer les résidus d'hormones produites par l’animal lui-même et celles administrées par un éleveur.
Quand on est en face de problématiques multifactorielles, seules des études qualifiées d’« épidémiologiques », portant sur des milliers de consommateurs, permettent de conclure des relations de cause à effet et de distinguer les effets relatifs de causes éventuelles entre elles. En effet, il ne suffit pas de dire qu’une molécule est cancérigène après l’avoir testée en laboratoire sur quelques dizaines de souris. Il ne suffit pas non plus de détecter l’existence de cancers dans une population. Il faut être capable de les attribuer soit à une consommation de viande, soit à celle du soja, ou à l’existence d’autres perturbateurs endocriniens ! 

La viande aux hormones : perturbateurs endocriniens ?

Un perturbateur endocrinien est une molécule qui imite l’effet des hormones et peut causer des anomalies physiologiques.
Si la viande aux hormones n’a pas d’effet néfaste sur la santé humaine, on peut se demander s’il n’y a pas de véritables perturbateurs endocriniens qui sont négligés.
Un sénateur français vient d’affirmer : "Le plus important perturbateur endocrinien c’est la pilule" ! La dose ingérée dans une ration de viande est 100 fois inférieure à la dose d’une contraception d’urgence.
Par ailleurs, on ne peut pas alarmer les opinions sur les perturbateurs endocriniens et se faire en même temps le défenseur de la libération de consommation du cannabis, surtout depuis que des plantes OGM renforçant les propriétés hallucinogènes du cannabis. Devant l’Assemblée nationale, le 28 février 2012 deux professeurs ont expliqué la nature de perturbateur endocrinien du cannabis.
On pourrait enfin parler de la consommation d'alcool qui élève le taux des œstrogènes chez l'homme et chez la femme.
Pourtant, le parlement a publié le 11 juillet 2011 un rapport sur les perturbateurs. Les mots de contraception, ni cannabis ne sont pas cités ! N’est-on pas face à la pression d’opinions écologiques et sociétaux qui refusent de mettre le doigt sur les vrais problèmes ? 

Conclusion

Une autre question se pose : le goût de la viande aux hormones est-il altéré ? La réponse dépend de chacun. Un étiquetage "viande sans hormone" pourrait indiquer au consommateur ce qu’il achète. Mais ce seul étiquetage contribue à entretenir l’idée de danger.
Quels sont, dès lors, les vrais problèmes du Traité commercial nord atlantique ?
Il soulève vraisemblablement plus des problèmes économiques que de santé publique. On court le risque d’une concurrence des élevages américains avec ceux de nos montagnes, avec un impact considérable sur nos paysages. Nous y reviendrons dans le prochain Actuailes n°55.

Pour aller plus loin...

a) Exemples d'hormones utilisées dans l'élevage

Les six substances les plus souvent autorisées au Canada, aux USA ou en Argnetine, par exemple sont les œstrogènes, la progestérone, la testostérone, le mélengestrol, le trenbolone et le zéranol. Les caractéristiques et les fonctions de ces substances sont schématiquement les suivantes:

-Les œstrogènes ont un rôle important dans le développement et le maintien des caractères sexuels femelles. Son action à titre de stimulateur de croissance est plus remarquable chez les animaux qui ont une faible concentration naturelle en œstrogènes, notamment les génisses, les bouvillons ou les bovins castrés, chez qui elle permet une augmentation de la croissance musculaire de l’ordre de 5 à 15 %. En plus de l’un de ses nombreux rôles physiologiques, comme de mettre en réserve des protéines qui peuvent être utilisées durant des périodes précises, comme la grossesse et la lactation chez les femelles, elle favorise aussi le dépôt protéique dans les muscles striés (ceux liés au squelette).
- La progestérone est une hormone stéroïdienne femelle particulièrement active durant l’ovulation et la gestation (grossesse). En élevage animal, elle est surtout employée pour favoriser le gain de poids et l’efficacité de la conversion alimentaire chez les génisses destinées à l’abattage, mais son activité est moindre que celle des œstrogènes. Comme les œstrogènes, la progestérone de source externe ne peut pas être distinguée de celle issue d’une synthèse naturelle. 
L'évaluation du risque pour la santé humaine tient compte de la présence naturelle de ces substances chez l’humain. C’est chez la femme que l’on retrouve les plus importantes concentrations d’œstrogènes et de progestérone. Dès la puberté, et pendant la période de vie précédant la ménopause, la sécrétion d’œstrogènes est très élevée.

- La testostérone est une hormone mâle responsable du développement des organes et des caractères sexuels. Sa présence naturelle en plus importante concentration chez les mâles explique notamment leur masse corporelle plus imposante.

- Le mélengestrol a une action similaire à la progestérone. Ses effets métaboliques les plus importants se manifestent surtout chez les génisses en supprimant l’ovulation pour favoriser plutôt la croissance et l’efficacité de la conversion alimentaire. Contrairement aux autres stimulateurs, le mélengestrol est administré par voie orale.

- Le trenbolone est une hormone mâle synthétique ayant une activité similaire à la testostérone, mais de cinq à dix fois supérieure. C’est un anabolisant (c'est à dire un produit qui ) qui favorise principalement le développement musculaire. C’est aussi une substance légalement commercialisée dans certains pays, populaire chez des sportifs, mais son usage est toutefois illégal chez les personnes qui participent à des compétitions.

- Le zéranol est un stimulateur de croissance qui, contrairement aux cinq autres anabolisants, n'est pas d'origine animale: il dérive d'une substance produite par des moisissures. Elle améliore le gain de poids et la capacité de digestion des aliments chez les animaux. Son usage n’est habituellement permis que chez les bovins.

(Source de ces informations: Institut National de Santé publique du Québec)

b) Les quantités d'hormones que l'on risque de manger sont-elles importantes?

Il est quasiment impossible de distinguer, par exemple, des oestrogènes en fonction de leur origine.
Certains sont naturellement présent dans la viande de boeuf, même si elle n'a pas été produite avec des produits de croissance, d'autres sont également présent dans des plantes que l'on consomme, comme les légumineuses, les graines de sésame, de tournesol, le riz brun, les pommes, la papaye, les carottes, les pois, la sauge, le fenouil, la réglisse. Ainsi, par exemple, 113 g de chou contiennent 2 700 ng d’œstrogène. Un verre de lait en contient 34 ng. Une cuillerée d’huile de soja contient 28 370 ng d’œstrogène – soit presque 7 500 fois la quantité d’œstrogène que l’on retrouve dans un morceau de viande de 170 g provenant d’un animal traité.
Tout cela explique pourquoi le codex alimentarius est incapable d'établir des normes maximum de résidus dans les viandes mises sur le marché. 

c) Qu'appelle-t-on une étude "épidémiologique" ?

Le mot épidémiologie vient du grec Epidoemia. Il évoque tout ce qui peut influencer la santé des populations. On pense bien sûr aux maladies, mais aussi à l'alimentation. L'épidémiologie consiste à étudier la répartition, la fréquence et la gravité des états de santé de ces populations.
Ces études permettent de définir ce qu'il faut décider pour améliorer la santé et comment modifier ce qui peut augmenter les risques sur la santé.
Or, lorsqu'on est face à des causes multiples et compliquées, il faut essayer de distinguer les causes entre elles. Par exemple, quand on dit que la qualité d'un aliment peut causer un cancer, il faut séparer les consommateurs qui consomme cet aliment et ceux qui n'en consomment pas. Mais il faut aussi les interroger pour savoir si ce sont des fumeurs ou non, s'ils sont des buveurs d'alcool ou non. Il faut étudier leur consommation dans le temps et ce n'est pas toujours facile d'interviewer des consommateurs tous les cinq ans pour savoir leur état de santé. C'est pour cette raison que les études épidémiologiques sont compliquées et coûtent cher. Or elles sont indispensables car il ne suffit pas de faire des études en laboratoire sur des rats pour tirer des conclusions fiables. 

d) Pourquoi l'Europe interdit-elle la viande aux hormones si elle reconnait que ce n'est pas dangereux?

Depuis longtemps, l'usage des hormones en élevage animal s’est développé. Mais des groupes de pression se sont élevés en Europe contre l’usage des hormones. Dès les années 1980, la Communauté européenne a proposé de bannir l’usage des stimulateurs de croissance en production animale, sauf dans un contexte de recherche ou thérapeutique.
En 1981, un groupe d’experts a été consulté, le « Scientific Working Group on Anabolic Agents », plus familièrement appelé Comité Lamming. En 1982, il a remis un rapport disant que l’usage d’hormones naturelles (œstrogènes progestérone et testostérone) ne représente aucun risque à la santé humaine. L’UE a alors proposé en 1984 d’autoriser l’usage des hormones, mais en 1985, le parlement européen a rejeté la proposition.
En 1985, le Comité Lamming a confirmé que les substances incriminées ne représentent aucun risque pour la santé humaine, ce que l’OMS et la FAO affirmaient de leur côté.
Malgré tout, en 1988, une directive 88/146, étend l’interdiction à l’importation des viandes traitées. Ce bannissement a été contesté devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) par les pays où l’usage des stimulateurs était permis. L’OMC a donné raison aux pays contestant la position de l’Union européenne qui a toutefois maintenu l’interdiction.
En 1995, une « Conférence scientifique sur la stimulation de la croissance et la production de viande » a précisé une nouvelle fois qu’il n’y a pas d’évidence de risque pour la santé humaine.
Malgré tout, en 1997, une directive 96/22 renforce les sanctions en cas de violation de l’interdiction.
L’OMC décide alors que cette interdiction est une entrave au libre-échange et que l’UE n’avait pas scientifiquement justifié le risque à la santé. L’UE décide donc de financer des études expérimentales auprès du « Comité scientifique des mesures vétérinaires en rapport avec la santé publique » (CSVSP). Les conclusions sortent en 1999 : « l’œstradiol-17β (E2) serait cancérogène, mais il n’y a pas suffisamment de données pour permettre une estimation du risque découlant de l’usage des autres stimulateurs de croissance hormonaux » !

Un autre groupe de travail, le « Working Group of the Committee for Veterinary Medicinal Products » (CVMP) contredit cette conclusion soulignant notamment que l’ingestion de l’œstradiol-17β par la voie alimentaire était biologiquement insignifiante.
Le CSVSP est alors sollicité par la Commission européenne pour clarifier son étude. Il précise « qu’il lui était toujours impossible de quantifier le risque ». Mais il faut préciser que l’UE avait donné une contrainte scientifique à l’étude : tout résidu d’hormones de croissance devait être considéré comme étant risqué. Un objectif réglementaire était également imposé aux experts : le but était d’obtenir l'absence totale de résidus dans la viande des animaux auxquels ces hormones avaient été administrées à des fins anabolisantes.
L’UE confirme donc l’interdiction en 2003, mais demande une évaluation quantitative du risque à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui conclut en 2007 que « aucune nouvelle donnée probante ne permettrait de modifier les conclusions du CSVSP de 1999 ». Depuis 2005 aucune nouvelle donnée pertinente n’a été publiée à l’égard du risque à la santé humaine. Il s’agit exclusivement d’une affaire de règlements de litiges commerciaux basés sur les traités et les ententes de libres-échanges.

Ce rapide historique montre bien que l'Union Européenne a interdit les viandes aux hormones, non pas pour des raisons de santé, mais,
- sous la pression des lobbys écologistes qui utilisent le principe de précaution dans une vision illusoire, celle de vouloir faire la preuve du "zéro risque", ce qui n'a rien à voir avec le principe de prudence.

- pour protéger les agriculteurs européens de la concurrence d'importation de viandes moins chères venant d'Amérique du Nord.

Pour approfondir...

Quel est le rôle des hormones chez la femme?

Dans le domaine gynécologique, l’hypophyse fabrique 3 hormones essentielles : la prolactine ayant pour cible le sein, et la LH et FSH ayant pour cibles les ovaires.
La glande mammaire stimulée fabriquera sous l’influence de la prolactine du lait.
Les ovaires stimulés fabriqueront principalement 2 hormones : la progestérone et les oestrogènes.De façon nettement plus minime, des androgènes sont aussi synthétisés. Toujours par voie sanguine, les hormones ovariennes iront se fixer sur de nombreux organes cibles : l’appareil génital mais également la peau, les os, le cerveau etc... En cas de grossesse, l’œuf humain fabriquera de l’HCG.


 

 

 

 

C'est quoi le "codex alimentarius"?

Le codex Alimentarius (ou codex alimentaire) est un ensemble de règles, réunies dans un livre qu'on appelle un "code" et qui impose des normes pour la production et la transformation des produits alimentaires. Il donne les normes et usages qui doivent être respectées pour assurer la sécurité sanitaire des aliments ou la protection des consommateurs et des travailleurs qui transforment les produits. Les normes peuvent concerner aussi la production de l'environnement. Le Codex alimentarius est un document rédigé par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Les règles sont variables en fonction des possibilités de les atteindre. Par exemple on donne des limites à ne pas dépasser en nombre de bactéries par gramme ne sont pas les mêmes pour de la viande hachée ou pour des épices. En effet leurs éliminations posent des problèmes différents dans les deux catégories de produits.
En revanche les normes sont identiques entre de la viande bio et de la viande d'élevage classique.


Glande endocrine

L'origine du mot glande est contestée: Au 1er siècle après JC, le mot "glandula" désignait le "ris" qui est une glande du veau. "Endocrine" vient des mots grecs éndon "dans" et krínô, "secréter". Une glande endocrine secrète sa substance à l'intérieur du corps, contrairement, par exemple à des glandes mammaires qui secrètent leur lait à l'extérieur. Elles sont "exocrines" 

Persillé

Le mot latin "petroselinum" était le nom du "persil", plantes aromatiques destinée à améliorer le goût d'un plat. Une viande est persillée, quand elle est parsemée d’infiltrations de graisse

Hormone

Le  mot grec "hormè" signifie "impulsion". C'est le sens de l'hormone qui donne une impulsion, une information, pour provoquer la réaction du tissu qui la reçoit.

Libre échange

Le mot échange s'entend ici au sens d'un acte commercial. le "libre échange" est une théorie économique qui veut que le commerce soit libre de toutes réglementations ou de subventions.

Oestrogène

Mot composé de "gène" qui vient du grec "gígnomai" : "engendrer" et de "oîstros" qui désignait un "taon", insecte qui pique. Au sens figuré, le mot désigne ce qui engendre la fureur, le désir, ou la passion. Un oestrogène est une hormone sexuelle qui, entre autres, engendre le désir du sexe opposé.

Hallucinogène

Du latin "hallucinari" « divaguer, rêver ». Un produit hallucinogène est un produit qui fait rêver, mais c'est uns substance toxique, c'est à dire dangereuse pour le cerveau et qui peut avoir des conséquences graves sur la santé.