Dans un long dossier, les2ailes.com ont développé les vicissitudes du concept de « développement durable ». Il s’agit d’une sémantique « fourre tout ». En effet, qui serait contre le développement ? Et qui serait contre qu’il dure ? Mais, en réalité, ce concept inclut l’idée même que ce qui a fondé le développement des générations précédentes ne devrait pas changer, et devrait durer. Or, la technicité  et les conditions d’élaboration des ressources naturelles seront-elles identiques dans les générations futures ? Serions nous parvenu à un optimum démographique qui justifierait une décroissance ? Les limites planétaires qui nous sont proposées, par exemple, la cause prétendue humaine des variations climatiques, sont-elles à considérer comme des acquits définitifs de la science pour fonder des règles de développement durable ? Les besoins des générations actuelles seront-ils les mêmes que celui des générations futures ? A l’évidence, une réponse négative s’impose à toutes ces questions.
Dès lors qu’une sémantique porte en elle-même un biais intellectuel, il est préférable d’en changer. Nombreux sont ceux qui en ont eu conscience et ont décidé de boycotter le concept de « développement durable » qui est intrinsèquement piégé et de le remplacer par celui de « développement responsable ».
Cette expression pourrait être préférable à condition de définir les bases éthiques d’une « responsabilité ». Cet article essaie de les fonder.

Commentaire "les2ailes.com"

1- Les vicissitudes du concept de "développement durable"

Les vicissitudes du développement durable apparaissent à la fois dans le contenu des 17 « Objectifs de Développement Durable »  (ODD) et de la manière dont ils ont été adoptés à l’ONU.

1.1- Au plan du contenu

Ces ODD font de l’éradication de la pauvreté une priorité, mais ceci au  mépris complet des vraies causes de la pauvreté. Pas question de remettre en cause les règles du Commerce International qui sont pourtant au cœur du débat.
Les ODD érigent également comme un acquit de la science la thématique des «  neufs limites planétaires »  (Changement climatique, intégrité de la biosphère, « trou d’ozone », nouvelles entités chimiques, acidification des océans, flux de phosphore et d’azote, changements de macro-écosystèmes, usages d’eaux douces, particules fines atmosphériques). Pourtant, si l’existence de multiples et trop nombreuses pollutions locales ont des effets dramatiques sur les populations avoisinantes, elles ne s’additionnent pas pour autant pour en faire des pollutions globales. Toutes les études systémiques montrent que les pollutions dites globales sont loin d’être démontrées et qu’elles ne peuvent justifier le concept de « limite planétaire » auquel elles sont associées.
Ce point est d’autant plus important que les ODD font un lien douteux avec la question démographique.
Certes développer l’accès à la santé est louable,  mais ce que l’ONU qualifie de «  santé reproductive et sexuelle » est devenu au fil des années un concept central qui cache celui de « santé sexuelle ». C’est ainsi que sont développés des objectifs liés au «  gender »  au nom de la non discrimination, au préservatif, au nom de la lutte contre le SIDA, à l’autonomisation des femmes,  au nom de l’égalité, Tout cela, quand on y regarde de près est d’une grande hypocrisie à l’égard des femmes. Comme toujours, c’est  l’éducation qui est au cœur d’une véritable révolution culturelle.
Les ODD appellent à établir de nouveaux modes de consommation en se fondant sur un concept de ressources naturelles très « fixistes ». Or, ce concept est lié à la technicité de chaque époque et doit être manipulé avec prudence.
Enfin, les ODD, forts des arguments qui y sont développés, en arrivent à promouvoir l’idée d’une gouvernance mondiale dont est exclue tout recours à la subsidiarité et à la démocratie. Avec les ODD,  il y a une véritable menace de la « fin des États » qui est un des cœur de cible des ONG, malgré la grande réticence de certains États.

1.2- Au plan des procédures d’adoption des ODD

La procédure retenue par l’ONU avait nommé un « groupe de travail ouvert » dont la mission non négociable a été de parvenir au « consensus ». A cette fin, toute une série de techniques classiques ont été utilisées : La sémantique entourant le concept de "consensus",  la nomination d’un médiateur et le choix d’experts acquis au succès de l’objectif. Ces animateurs étaient maîtres en noyautage des dissidents en s’appuyant dur des « facilitateurs » s’employant à culpabiliser les opposants. Enfin, l’enregistrement du "consensus" était pré-rédigé par des personnes favorables au consensus et l’adoption acquise « sans vote ». Ce type de procédure pourrait se résumer à cet axiome : « Qu’importe le contenu, pourvu qu’on ait le consensus ! ».

2- Plaidoyer pour un "développement responsable"

Le seul concept de « développement durable » relève d’une sémantique faisant croire que ce n’est pas seulement le développement qui devrait être durable, mais les fondements retenus par l’ONU, comme si la démographie devrait être limitée, comme si les ressources naturelles de notre temps devait être celles de demain,  comme si le libéralisme devait être un fondement du commerce international, comme si le consensus était un fondement de la vérité scientifique quand on parle de « limites planétaires ».
Comme toujours, quand la sémantique est un « fourre tout », il serait préférable d’en changer. Le concept de « développement responsable » aurait le mérite d’encourager les politiques à se poser des questions.

2.1- Un « développement responsable » pour éradiquer la pauvreté

C’est le libéralisme même de l’Organisation mondiale du Commerce qu’il faut remettre en cause. Non qu’il ait des mérites lorsque les pays sont à un optimum de leur organisation économique, mais dès lors qu’il s’agit des échanges entre pays riches et pauvres, on sait quel sera le résultat de cette mise en concurrence. Ce seront toujours les pays du Nord qui en sortirons vainqueur. Il y serait donc nécessaire de proposer, comme le fait Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie 

2.2- Un « développement responsable » en matière scientifique

Il passe par la volonté du débat contradictoire  honnête et transparent. Pour établir des relations de cause à effet dans des systèmes complexes comme les écosystèmes planétaires, il est indispensable de faire appel à des disciplines d’identification des systèmes complexes. Or, les grands organes onusiens traitant du climat ou de la biodiversité ne le font pas, ou le font ma. Dès lors, il serait indispensable de faire appel à des débats honnêtes et transparents, honnête, c’est à dire contradictoires et transparents, c’est à dire publics.
On réaliserait alors que les débats sont loin d’être clos. 

2.3- Un « développement responsable » fondé sur une « démographie responsable »

Les concepts de santé reproductive et sexuelle sont destinés à promouvoir la réduction de la démographie mondiale avec le recours de la contraception et de l’avortement.
Le concept de « démographie responsable » pourrait être proposé, à condition de bien en définir les contours. 

2.4- Un « développement responsable » pour l’éducation

Derrière e vocable d’éducation, l’UNESCO est plus soucieuse de propager une nouvelle culture que de développer les savoirs, de promouvoir les éléments du développement durable et de la santé reproductive et sexuelle que de chercher à éduquer et à promouvoir des capacités de jugement personnels. 

3- Un « développement responsable » à fonder sur une éthique de conviction

En effet, le mot d’ « éthique de la responsabilité » cache trop souvent une dictature du relativisme et de l’individualisme. Comme si les grands principes devaient se heurter à l’épreuve de la pratique, alors que l’éthique devrait au contraire encadrer les pratiques. On voudrait, à tort, au nom de la responsabilité politique,  accompagner une forme de « progrès » des consciences, comme si  la nature de l’homme changeait au fil du temps.
Or un « développement responsable » n’est possible que si l’homme a la conviction qu’il existe des constantes immuables dans la dignité de l’homme. 

3.1- En matière d’éducation[1]

Il existe un certain nombre de principes éducatifs universels:
- Chaque homme possède un droit à l’éducation est un droit universel quelque soit son âge, sa race, son sexe,
- L’éducation doit aider chaque personne à répondre à sa vocation propre, conformément à son tempérament, son sexe,  dans la perspective de la finalité propre à laquelle chaque personne est destinée,  mais aussi dans la perspective du bien commun  des groupes auxquels elle appartient.
- L’éducation doit développer les aptitudes physiques, morales, intellectuelles de chaque personne, développer son sens de la
responsabilité, son esprit d’initiative, sa capacité à conduire sa vie personnelle et l’aider à conquérir une vraie liberté
- L’éducation doit préparer à la vie professionnelle de chacun
- L’éducation doit favoriser la capacité de chacun à s’insérer activement dans les groupes auxquels il appartient sans se couper de son milieu d’origine. Pour cela, elle soit s’appuyer sur les valeurs locales pour concourir à la construction d’une authentique culture
- L’éducation doit favoriser les échanges avec les autres peuples, faire naître des relations d’amitié, favoriser les dispositions à bien se comprendre
- L’éducation doit témoigner de la vérité et aider chacun à exercer son jugement tout en veillant au fait que la vérité n’est pas une construction humaine où chacun pourrait revendiquer ‘sa’ vérité et qui aboutirait à un relativisme illusoire et un individualisme dangereux.  La vérité s’enseigne, se transmet, s’apprend, dans une recherche permanente conduite par des ‘maîtres’ et est éclairée par deux lumières qui coopèrent mutuellement : celle de la raison, et celle de la loi naturelle. Cette recherche de la vérité passe par l’acquisition de méthodes et de valeurs intellectuelles, morales et spirituelles qui permettent ‘l’adéquation de notre intelligence avec la réalité’. L’éducation doit faire appel à l’intelligence permettant à chacun de découvrir, démontrer, expliquer, repousser les erreurs, mais aussi porter un regard juste sur lui-même, sur les autres et sur le monde dans lequel il vit.

3.2- En matière de santé

- La dignité de la personne
La dignité ne se mesure pas à l’aune de l’avoir de l’homme en terme de capacités physiques ou intellectuelles,  mais du simple fait qu’il est un homme
- l’inviolabilité du corps humain, y compris dès le commencement de sa vie. Ce principe a pour finalité de protéger le corps humain des atteintes des tiers. Ces derniers sont obligés de respecter le corps d’autrui, quand bien même ils obtiendraient le consentement des intéressés hormis les cas de « moindre mal » justifié par l’impossibilité de mettre en œuvre des alternatives au regard d’autres principes supérieurs.
- la non disponibilité de son corps, c’est à dire le refus de toute forme d’esclavage, de commercialisation des personnes ou de ses organes, 
- le principe de non-patrimonialité,  c’est à dire une approche éthique refusant la « commercialisation du corps », la brevetabilité du corps et des ses éléments,  
- Le principe de « paternité responsable »
Ce principe n’est pas tant un droit qu’un devoir. Les parents ne sont pas toujours libres de procéder à leur guise, comme s'ils pouvaient déterminer de façon entièrement autonome les voies honnêtes à suivre. mais ils sont les seuls à devoir  déterminer une juste hiérarchie des valeurs envers la famille et envers la société. Les états n’ont pas à se substituer aux parents dans cette recherche et encore moins exercer sur eux des pressions coercitives. Tout idée de « démographie responsable » risque de relever d’un concept pseudo malthusien. La croissance démographique est en effet pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire.

3.3- En matière économique

- le principe de  bien commun
Il ne s’agit pas de la mise en commun de biens divisibles, même essentiels, mais d’un bien indivisible, représentant la dimension sociale du bien moral.
- Le principe de liberté
Il ne doit pas être confondu avec le principe d’autonomie des personnes. C’est le développement du bien commun qui rend l’homme libre. 

3.4- En matière politique

- Le principe de subsidiarité qui veut que ce soit les familles premières responsables de l’éducation de leurs enfants. 

4- Conclusion

Seule le respect d’un certain nombre de principes éthiques permettra un véritable « développement responsable ». Il faut malheureusement constater que les « objectifs du développement durables » définis par l’ONU en font peu de cas.

 

[1] Inspiré de la Déclaration «  Gravissimum Educationis  » promulguée le 28 octobre 1965 lors de la 4e session du Concile