Le bureau de presse du CERN a publié le 25 mai 2016 un communiqué qui donne les dernières nouvelles de ses expériences dénommées CLOUD. Cette expérimentation laisserait penser que "le rôle des rayons cosmiques dans la formation des aérosols et des nuages a peut-être été plus important pendant l’ère préindustrielle que dans l’atmosphère polluée d’aujourd’hui".
Y aurait-il aujourd’hui moins de nuages à cause de la pollution ? Mais cela ne dit rien sur l’impact d’une variation de rayons cosmiques, à pollution identique ! Que faut-il conclure de cette phrase ambigüe ?

Source : Bureau de presse du CERN- 25 Mai 2016

Commentaire "les2ailes.com"

1 - Que dit le CERN ?

Le texte exact du communiqué est le suivant :

« Genève, le 26 mai 2016. Une expérience du CERN laisse entrevoir un climat plus nuageux que prévu pendant l’ère préindustrielle !
Dans deux articles [1] publiés aujourd’hui dans la revue Nature, de nouveaux résultats de l’expérience CLOUD [2] du CERN [3] donnent à penser que le climat inaltéré de l’ère préindustrielle, que l’on utilise comme point de comparaison, a peut-être été plus nuageux que ce que l’on pensait jusqu’ici. CLOUD montre en effet qu’en l’absence d’acide sulfurique, les vapeurs organiques émanant des arbres créent de nombreuses particules d'aérosol dans l’atmosphère. On pensait jusqu’ici que l’acide sulfurique – qui provient en grande partie des carburants fossiles – était essentiel pour déclencher la formation des particules d’aérosol. CLOUD observe également que ces vapeurs, appelées vapeurs biogènes, jouent un rôle clé pour permettre à ces particules nouvellement formées d’atteindre une taille suffisante pour créer des nuages.
« Ces résultats sont, jusqu’ici, les plus importants réalisés par l’expérience CLOUD du CERN, explique Jasper Kirkby, porte-parole de l’expérience. Le fait d’inclure la nucléation et la croissance de particules d’aérosols biogènes purs dans les modèles climatiques pourrait affiner notre compréhension de l’impact des activités humaines sur les nuages et le climat ».
Selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), l’augmentation des aérosols et des nuages qui a lieu depuis l’époque préindustrielle constitue l’une des plus grandes sources d’incertitude dans les prévisions sur l’évolution du climat [4] .
L’expérience CLOUD est conçue pour comprendre comment les particules d’aérosol se forment et grandissent dans l’atmosphère, et leur effet sur les nuages et le climat.
CLOUD a également découvert que les ions issus des rayons cosmiques galactiques augmentent fortement le taux de production de particules biogènes pures – d’un facteur de 10 à 100 par rapport au taux pour les particules se développant en l’absence d’ions. Cette observation laisse penser que le rôle des rayons cosmiques dans la formation des aérosols et des nuages a peut-être été plus important pendant l’ère préindustrielle que dans l’atmosphère polluée d’aujourd’hui.
Un article publié parallèlement dans la revue Science (Bianchi, F., et al., Science, doi 10. 1126/ science.aad5456(link is external), 2016) décrit l’observation d’un processus de nucléation purement organique à l’observatoire du Jungfraujoch, suivant le même mécanisme que celui rapporté par CLOUD. L’expérience CLOUD n’a pas participé directement à cette mesure, mais la plupart des auteurs de l’article concerné sont également membres de la collaboration CLOUD.
« L’observation, au Jungfraujoch, d’un processus de nucléation purement biogène est un résultat extrêmement intéressant pour nous, explique Jasper Kirkby. Cela confirme que le processus découvert par CLOUD en laboratoire a lieu également dans l’atmosphère ».

2 - Que faut-il conclure de cette information ?

La conclusion est ambigüe d'autant plus que la correspondance entre les versions françaises et anglaise est surprenante: "CERN experiment points to a cloudier pre-industrial climate" devient, en français, "Une expérience du CERN laisse entrevoir un climat plus nuageux que prévu pendant l’ère préindustrielle". Certains experts traduisent ils "previous" par "prévu" au lieu de "précédent"?

On peut se demander si l’équipe du CLOUD n'a pas été reprise en main par le Giec.

En 2011, l’expérimentation CLOUD montrait qu’une variation de rayons cosmiques avait un impact sur la formation des nuages, et donc sur le climat. Jasper Kikby avait dit, dans un dossier de presse du 25 août 2011 accompagnant la publication parue, dans la revue Nature la veille : "Sur la base des résultats de CLOUD, il est clair que le traitement de la formation des aérosols dans les modèles climatiques doit être substantiellement révisé". Mais, cette conclusion risquait de déranger, et juste auparavant, Rolf-Dieter Heuer, directeur général du Cern avait "demandé aux collègues du Cern de ne pas entrer dans l’arène hautement politique du débat sur le changement climatique" (18 juillet 2011). Belle indépendance de la science et du politique ! Jasper Kirkby avait-il enfreint la consigne ? Toujours est-il que le dossier de presse a disparu du site du CERN ! Mais son existence ne fait pas de doute puisque toute la presse fait encore état de ce "dossier de presse" et de son contenu.

En 2016, il n’est plus question de variation des rayons cosmiques, mais de leur rôle, à quantité égale, sur une atmosphère dont la teneur en aérosols d’origine humaine varierait. Les expérimentateurs du CLOUD ont été repris en main et peuvent conclure que les rayons cosmiques ont un rôle plus important quand la pollution industrielle est plus importante que pendant la période préindustrielle.

Les facteurs que l’on fait varier ne sont plus les mêmes, ne sont pas quantifiés. Bref, on fait dire ce que l’on veut à une étude. Et cette étude ne dit plus rien de plus sur l'impact d’une variation des rayons cosmiques sur la dite formation des nuages.

Il faudra bien que le Giec se résigne à revoir tous ses modèles pour 3 raisons:

a) Première raison: le Giec avait retenu une hypothèse de "ciel clair": "La plupart des études inter comparatives sur le forçage radiatif des gaz à effet de serre retiennent des conditions de ciel clair et libres d'aérosol; l'introduction de nuages ​​compliquerait grandement les objectifs de la recherche" (Giec WGI-AR5_WGI 8.3.1). 
Son hypothèse est donc à revoir. On notera au passage que le giec disait, non pas que cela compliquerait la méthodologie, mais "les objectifs de la recherche" qui on le sait, ne sont pas de savoir, mais de "comprendre les fondements scientifiques des risques liés au changement climatique d'origine humaine" (source: Principes régissant les travaux du Giec- § 2). Tout ce qui n'est pas d'origine humaine ne doit pas faire l'objet de travaux du Giec!

b) Seconde raison : Si, comme le dit le CERN, les émissions de gaz sulfuriques et autres aérosol origine humaine qui expliquent la différence de climat entre la période pré industrielle et industrielle, il faudra que le Giec chiffre l'effet comparé du CO2 et des dits aerosols.

c) Troisième raison: il faudra bien que le Giec finisse par renoncer à son acharnement de ne retenir que 150 ans d'observations dans ses modèles, car ce ne sont pas les variations d'émissions humaines d'aerosols, pas plus que de CO2 d'ailleurs, qui peuvent expliquer la période chaude médiévale du xe siècle jusqu’au xive siècle et le petit âge glaciaire qui a suivi du début du xive siècle à la fin du xixe siècle. Seuls les variations d'irradiance solaire peuvent les expliquer. Par quel mécanisme ? Par le rôle des rayons cosmiques directement sur la vapeur d'eau?

Quant au CERN, on aimerait lire son protocole de recherche. En effet,  pourquoi se limite-t-il à l’acide sulfurique qualifié d' "essentiel pour déclencher la formation des particules d’aérosol". Qu'en est-il quantitativement de ces "vapeurs biogènes.... émanant des arbres"? Qu'en est-il des autres "vapeurs" émanant des volcans, acides chlorhydriques ou autres? Comment se fait-il que les émissions sulfuriques d'origine humaine réchaufferait le climat alors que l'observation a montré que les émissions volcaniques l'ont ponctuellement refroidi et que le Giec retient bien, aux fins de ses calculs, la "Profondeur optique d’aérosol" comme indicateur de l'activité volcanique?Quelles sont nos connaissances sur les proportions relatives de ces différents facteurs entre les périodes pré-industrielle et industrielle, entre  la période chaude médiévale et le petit âge glaciaire qui a suivi ? Très probablement, personne n'en sait rien et on comprend le caractère vague de la conclusion du CERN usant du vocable "peut-être" pour conclure que "cette observation laisse penser que...".

Le plus troublant est que le CERN, dans un communiqué du 16 mai 2014, avait écrit: "L’étude de CLOUD montre que les vapeurs biogènes oxydées se combinent avec de l’acide sulfurique pour former des particules embryonnaires, lesquelles peuvent ensuite grandir et devenir les noyaux de condensation autour desquels les gouttelettes des nuages peuvent se former. Ce résultat fait suite à des mesures antérieures de CLOUD montrant que, contrairement à ce qu’on pensait auparavant, l’acide sulfurique ne peut pas à lui seul former de nouvelles particules dans l'atmosphère... ce processus est mal connu". Le texte ajoutait: "des expériences précédentes de CLOUD ont montré que, à lui seul, l’acide sulfurique a un effet bien plus faible qu’attendu". Voilà que le Giec lui attribue maintenant un rôle "essentiel" ! Comprenne qui pourra !

Faute de connaître les mécanismes, il faut en revenir à une discipline sûre, l'identification des systèmes dynamiques qui permet d'établir de véritables relations de cause à effet entre les variations climatiques et l'irradiance solaire.


[1] Kirkby, J., et al. Ion-induced nucleation of pure biogenic particles. Nature, doi 10.1038/nature 17953(link is external) (2016).

Tröstl, J., et al. The role of low-volatility organic compounds in initial particle growth in the atmosphere. Nature, doi 10.1038/nature18271(link is external) (2016).

[2] L’expérience CLOUD est construite autour d’une chambre dans laquelle les conditions atmosphériques peuvent être simulées avec une grande précision, ce qui permet d’étudier la formation et la croissance de particules d’aérosol ainsi que les nuages qu’elles engendrent dans des conditions atmosphériques contrôlées précisément. Les contaminants indésirables peuvent être supprimés jusqu’à représenter un niveau bien inférieur à une partie par mille milliards. L’expérience CLOUD utilise un faisceau issu du Synchrotron à protons du CERN pour simuler les rayons cosmiques, des particules provenant de l’espace qui pénètrent dans l’atmosphère.
La collaboration de l’expérience comprend 21 instituts : Aerodyne Research, Institut de technologie de Californie, Université Carnegie Mellon, CERN, Institut finlandais de météorologie, Université Goethe de Francfort, Institut de physique d’Helsinki, Institut de Technologie de Karlsruhe, Institut Lebedev de physique, Institut Leibniz pour la recherche troposphérique, Institut Paul Scherrer, Tofwerk, Université de Beira Interior, Université de l’Est de la Finlande, Université d’Helsinki, Université d’Innsbruck, Université de Leeds, Université de Lisbonne, Université de Manchester, Université de Stockholm et Université de Vienne.

[3] Le CERN, Organisation européenne pour la Recherche nucléaire, est le plus éminent laboratoire de recherche en physique des particules du monde. Il a son siège à Genève. Ses États membres sont les suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie, Suède et Suisse. La Roumanie a le statut de candidat à l’adhésion. Chypre et la Serbie sont États membres associés en phase préalable à l’adhésion. Le Pakistan et la Turquie sont États membres associés. Les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde, le Japon, le JINR, l’UNESCO et l’Union européenne ont le statut d'observateur.

[4] Boucher, O., et al., in Climate Change 2013 : The Physical Science Basis. Working Group I Contribution to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change (éds. Stocker, T.F. et al.) 571-658 (Cambridge Univ. Press, 2013).