Entre deux Citoyens d'une Ville, s'éleva jadis un différend: l'un était menteur et fort habile, l'autre paysan et ignorant. Le premier sur son concurrent, voulait emporter l'avantage, prétendait que tout homme sage était tenu de l'honorer. C'était un homme sot ; car pourquoi révérer des observations mal décrites ? La raison m'en semble petite. 
Le second devinait tout sec : « Au Giec, vous vous croyez considérables à considérer l’homme coupable ? Que sert de répéter cela incessamment ? Les causes du réchauffement, au soleil sont dues, suivant des cycles d’activité bien connus. Ayant pour tout laquais votre science seulement, la République a bien affaire de gens qui calculent pour rien : Je ne sais d'homme nécessaire que celui qui travaille à produire des biens. Nous en usons, Dieu sait ! Notre travail occupe; l'artisan, le vendeur, celui qui fait la jupe, et celle qui la porte, et vous, qui débattez, de l’homme l’infinie nuisance, grâce à des budgets publics usurpés ».
Ces mots remplis de pertinence eurent le sort qu'ils méritaient : L'homme habile se tut, ne savait plus que dire. Le gueux avait plus raison qu'une satire. Le menteur quitta le lieu que nos gens habitaient. Bien qu’il se crut habile, le savant resta sans asile ; il reçut partout des mépris: L'autre reçut partout quelque faveur nouvelle. Cela décida leur querelle.
Laissez dire les menteurs ; le bon sens a son prix.

D'après La Fontaine