L'institut Ethique et Politique a organisé le 18 octobre 2022, au Théâtre des Sablons de Neuilly, dans le cadre de ses "disputatio" un débat contradictoire entre  Olivier Rey et Stanislas de Larminat. Le thème était : « Peut-on douter du réchauffement climatique ? ». En réalité, la vraie question était de savoir si on peut douter de la thèse anthropique du réchauffement climatique, ou à celle d'une origine solaire.
Stanislas de Larminat a développé sa conviction que les modèles du Giec sont biaisés à la fois par une analyse se limitant aux 150 dernières années, et sur des modèles qualifiés de "planètes numériques" dont la complexité ne permet pas de quantifier les probabilités de certitudes de leurs prévisions.
Olivier Rey n'est pas entré dans cette considéraion, mettant en avant qu'il n'était pas climatologue et qu'en tant que citoyen, il ne pouvait pas échapper au fait d'un consensus mondial sur le sujet.
Il a évoqué son refus d'imaginer qu'il puisse y avoir un "complot du mensonge", ce à quoi Stanislas de Larminat a développé sa thèse de "l'effet d'aubaine" d'une thèse anthropique qui profite à de multiples courants qui seraient effectivement incapables de monter un complot. 
Malgré ces divergences de regard, les deux débateurs se sont retrouvés sur une analyse assez proche des avantages et des risques d'un "principe de précaution" utilisé sans proportionnalité avec la gravité des situations. QUant il s'est agit des comportements individuels à recommander, ils ont également fait une analyse assez proche: Stanislas de Larminat a fait l'éloge de la "frugalité vertu", à condition de ne pas tomber dans le piège de la "frugalité par précaution" pour sauver la planète. Olivier Rey s'est déclaré "totalement en accord avec ce propos". Il cita Ivan Illich qui était assez révulsé par ce discours écologique de la responsabilité vis-à-vis de la planète: "je ne suis pas responsable de la planète, j'habite la terre et ce qui doit dicter mon comportement -c'est exactement ce que vous disiez- c'est la vertu".
Nous transcrivons ci-dessous le verbatim intégral de cette disputatio.

Sources: Youtube

Transcription: "les2ailes.com"

DISPUTATIO - INSTITUT ETHIQUE ET POILITIQUE
Olivier Rey / Stanislas de Larminat
18 octobre 2022 – Théâtre des Sablons de Neuilly
« Peut-on douter du réchauffement climatique ? »

Contenu

INTRODUCTION

PRESENTATION – Y A-T-IL UN RECHAUFFEMENT ?

DEBAT – QUELS INDICATEURS CLIMATIQUES ?

DEBAT – QUELLES DUREES D’OBSERVATIONS RETENIR ?

DEBAT – LA COMPLEXITE DES MODELES ET LES CALCULS DE PROBAILITE

DEBAT- LE PARAMETRAGE DES MODELES ?

DEBAT – LA QUESTION DES PREVISIONS

DEBAT – LE CONSENSUS EN SCIENCES ?

DEBAT – COMPLOT CLIMATIQUE OU EFFET D’AUBAINE ?

DEBAT – QUID DU PRINCIPPE DE PRECAUTION ?

DEBAT –QUELLES PRECONISATIONS ?

QUESTIONS de la SALLE

QUESTION – QUID DE LA PEUR ?

QUESTION – QUID DE L’EFFET DE SERRE ?

QUESTION – VA-T-ON VERS UNE PLANETE INVIVABLE ?

QUESTION – QUELS COMPORTEMENTS ADOPTER ?

CONCLUSION

INTRODUCTION

Louis Daufresne — Beaucoup d’éléments de l’actualité nous invitent à nous réunir ce soir.
Greta Thunberg a recommandé de rouvrir des centrales nucléaires en Allemagne. Le nouveau chancelier Olaf Scholz l’a fait. Il a annoncé hier la prolongation du fonctionnement des trois dernières centrales. Cette décision a été perçue comme un camouflet par les Verts au sein du gouvernement de coalition.
Une autre dépêche d’actualité affirme que la planète a perdu en moyenne près de 70 % de ses populations d’animaux sauvages en un cinquantaine d’années, selon une évaluation faite par le WWF. Cette statistique souligne « le lien, de plus en plus marqué, entre perte de biodiversité et réchauffement climatique ».
Par ailleurs, l’Arabie saoudite a été désignée comme pays hôte pour les Jeux asiatiques d'hiver en 2029. La compétition va se dérouler dans un pays où il ne pleut pas, ce qui est perçu comme une entorse à tous les débats que l’on peut connaître sur le réchauffement climatique, le dérèglement et la prise de conscience qui doit advenir sur ces questions, et qui, semble-t-il, n’advient pas.
Je terminerai cette énumération par la « Charte pour un journalisme à la hauteur de l'urgence écologique », qui a été édictée par un certain nombre d’acteurs et souscrite par des rédactions qui s’engagent à faire une publicité ou à parler de ces termes de ces thèmes liés à l’urgence écologique, et donc le réchauffement ou le dérèglement climatique, dans des termes beaucoup plus appuyés que les médias ne le faisaient jusqu’à présent.
Voici quelques informations qui sont sorties ces dix derniers jours et qui nous confirment que nous avons affaire à un sujet d’actualité.

Olivier Rey nous fait l’amitié de sa présence. Philosophe, mathématicien, chercheur au CNRS, enseignant à l’université Paris I. Je cite deux ouvrages : Réparer l’eau, aux éditions Stock, et Une question de taille, qui vient de reparaître en livre de poche.

Stanislas de Larminat, je vous remercie aussi d’avoir accepté cette invitation. Ce n’est pas si simple aujourd’hui d’organiser des débats. Vous êtes ingénieur agronome, spécialiste de la législation agricole européenne. Vous avez publié un ouvrage avec Fabien Revol : L’écologie, nouveau jardin de l’Église.

Merci à tous les deux d’avoir accepté cette invitation. La première question qui vous est posée est la suivante : Peut-on douter du réchauffement climatique ? Elle nous amène donc à vous demander pourquoi vous avez accepté de débattre ce soir.

PRESENTATION – Y A-T-IL UN RECHAUFFEMENT ?

Stanislas de Larminat - Je viens de faire une expérience fondamentale. J’ai fait un tour de France à pied de trois mille kilomètres. Une problématique me harcelait. Aujourd’hui, 40 % des jeunes gens affirment que pour sauver la planète, ils ne veulent pas avoir d’enfants. Je ne pouvais pas rester comme ça. Je devais aller sur les routes et essayer de donner des conférences. Je leur ai posé la question : de quoi n’avez-vous pas peur ? La litanie des problèmes planétaires est impressionnante : océans, ozone, sixième extinction des espèces, épuisement des ressources, jour du dépassement, poisons dans notre assiette, et bien entendu, ce dont nous allons parler aujourd’hui, le climat. Mais à force, toutes ces peurs deviennent suspectes.
En rencontrant des jeunes gens, j’ai remarqué que quand ils sont paralysés par une peur, ils ne parlent que de cela. Si on peut déminer ces peurs, ils parviennent à se poser les questions essentielles de la vie : Pourquoi l’homme ? Pourquoi le mal ? Qu’y a-t-il après la mort ? On ne peut pas répondre à ces questions dans le bruit médiatique, et en particulier si on est paralysé par toutes sortes de peurs.
Je me suis rendu compte que le débat pouvait aider à déminer les peurs. Si un débat est de bonne tenue, je ne doute pas qu’il sera apaisé. S’il est apaisé, on finit par prendre conscience que le problème est peut-être moins grave qu’il n’y paraît. La peur commence à s’estomper. On va enfin pouvoir aller à l’essentiel.
Je pense aussi que si un débat est bien posé, tout le monde, même s’il est incompétent, peut prendre sa propre position en jugeant non pas de la compétence de l’un ou de l’autre, mais de la qualité du débat. Les invectives sont suspectes. Nous verrons comment nous pourrons débattre sans esquive.
Peut-on douter du réchauffement climatique ? Nous sommes dans une période chaude. Je ne doute pas une seconde que nous vivons un réchauffement. La question est plutôt : pourquoi et comment.

Louis Daufresne - Déminer les peurs grâce au débat. Le terrain scientifique qui nous réunit ce soir devrait normalement renforcer la qualité du dialogue et l’aménité dans laquelle il pourrait se dérouler.
Olivier Rey, pourquoi avoir accepté le débat, et peut-on douter du réchauffement climatique ?

Olivier Rey - Peut-on douter du réchauffement climatique ? Comment il vient d’être dit : non. Cela fait maintenant un bon moment que nous avons des relevés assez fiables des températures, avec des stations disséminées sur la surface de la Terre, pour qu’aujourd’hui on puisse dire avec certitude que depuis au moins un siècle, nous sommes dans une période de réchauffement qui a plutôt tendance à s’accélérer.
Nous débattons de cette question parce qu’elle est extrêmement importante. Le climat est la première caractéristique du monde dans lequel nous vivons.
Mais cette question est souvent débattue de manière problématique. En 1997, une enquête menée aux États-Unis ne constatait pratiquement aucune différence entre démocrates et républicains sur la question du réchauffement climatique. La moitié environ des électeurs de chaque camp admettait qu’un réchauffement était en cours. En 2008, une dizaine d’années plus tard, la proportion des démocrates concernés par le sujet était passée de 52 % à 76 %, et celle des républicains de 48 % à 42 %. Cette question devient un marqueur politique.
Quand on est de gauche, il faut croire au réchauffement climatique et quand on est de droite, il faut douter. Or, le réchauffement climatique n’est pas de droite ou de gauche. Existe-t-il ou n’existe-t-il pas, et que faut-il faire vis-à-vis de ce réchauffement ? La question du réchauffement climatique est extrêmement importante. Mais elle est prise dans des discours qui n’ont pas grand-chose à voir avec elle et qui brouillent les esprits.

Louis Daufresne - Nous partons sur une base commune : il n’y a pas de doute du réchauffement climatique. Maintenant, peut-on douter de la cause humaine du réchauffement climatique ? C’est sur ce sujet que porte le vrai débat.
Nous avons choisi de commencer par le sujet des indicateurs à retenir pour analyser la question climatique. Les indicateurs sont-ils fiables ? Qu’en pensez-vous ? Nous amènent-ils à des certitudes en matière de cause anthropique ?

DEBAT – QUELS INDICATEURS CLIMATIQUES ?

Olivier Rey- Les indicateurs montrent un réchauffement. La question est de savoir à quoi l’attribuer. Au cours des temps, le climat sur Terre n’a cessé d’osciller.
Vis-à-vis du réchauffement que nous vivons actuellement, la question est de savoir s’il s’agit, comme cela était par le cas par le passé, de légères variations des orbites planétaires autour du Soleil, d’une activité solaire plus grande, ou si les activités humaines entrent pour une part, voire une part déterminante, dans ce réchauffement, et surtout dans la vitesse de ce réchauffement.
Ces variations climatiques ont toujours existé. Ce qui pose le plus de problèmes aujourd’hui n’est pas tant le réchauffement en lui-même que la vitesse à laquelle il s’accomplit.
Vous évoquiez l’influence éventuelle du réchauffement climatique sur la disparition d’un certain nombre d’espèces. Attention à ne pas tout attribuer au changement climatique. Ici, je pense que la bétonisation a une influence énorme, et sans doute peut-être actuellement plus grande, que le réchauffement climatique.
Si un réchauffement ou un refroidissement s’effectue à une vitesse modérée, les espèces s’adaptent, changent leur habitat, etc. Si le phénomène se produit trop rapidement, l’adaptation n’est pas possible.
Si le climat se réchauffe trop, il n’y aura plus de chênes en France. Les végétaux ne peuvent migrer que très lentement. Si les chênes doivent migrer vers le nord, il faudrait que les glands tombent plus vers le nord. Mais comme un chêne a besoin de cent ans pour pousser, si le réchauffement se produit trop rapidement, les chênes n’auront pas le temps de migrer. Dans ce cas, des espèces disparaissent.
Dès la fin du XIXe siècle, certains avaient commencé à soupçonner que l’activité industrielle, et en particulier le rejet dans l’atmosphère de gaz à effet de serre comme le gaz carbonique allait pouvoir entraîner un réchauffement.
À la fin du XIXe siècle, la première personne à avoir signalé cette possibilité s’en félicitait. Le climat serait plus agréable. Beaucoup ont travaillé à partir de cette hypothèse au cours du XXe siècle. Quand il s’est avéré que les relevés enregistraient un réchauffement très rapide, il a été naturel d’aller chercher du côté de la cause anthropique

Stanislas de Larminat- On ne peut pas se contenter d’une corrélation pour faire une relation de cause à effet. Des modèles sont nécessaires. Pour construire un modèle, on doit retenir des indicateurs.
L’activité solaire, l’activité humaine, la concentration de gaz carbonique, sont des indicateurs. On peut imaginer que s’il se trouve d’autres causes liées à l’homme, elles seront proportionnelles à la quantité de gaz carbonique émise. Le volume d’émissions de gaz carbonique paraît un indicateur acceptable pour bâtir des modèles. L’activité solaire et l’activité volcanique le sont aussi. La température moyenne globale enfin, qui est un indicateur que pratiquement tous les modèles retiennent. Si on veut un débat scientifique, on tombera vite d’accord sur ces indicateurs que je viens de citer.
Il serait un peu rapide d’affirmer que la température globale ne veut rien dire. On peut faire fonctionner des indicateurs qui ne sont pas parfaits. Ils sont suffisants pour essayer d’établir des relations de cause à effet.

Olivier Rey- Se pose ensuite la question des causes de ce réchauffement particulièrement rapide. On surveille depuis assez longtemps l’activité solaire. On connaît extrêmement bien la trajectoire des planètes dans le système solaire. Pourtant, d’après les modèles disponibles, les variations dans l’activité solaire ou dans la trajectoire des planètes ne donnent pas vraiment d’explication à ce réchauffement. On cherche alors quelles peuvent en être les raisons. On remarque que depuis la fin du XIXe siècle, certaines personnes avaient émis l’hypothèse que l’augmentation de la densité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère pouvait produire un réchauffement. Dans les modèles climatiques, on ne s’est pas contenté de l’astronomie et de l’activité solaire. On a ajouté les émissions de gaz à effet de serre.
L’étude du climat par des modèles est d’une complexité redoutable. Le chercheur doit tenir compte d’un nombre gigantesque de facteurs.
Résumons grossièrement l’effet de serre. La Terre reçoit du rayonnement du Soleil. Une partie du rayonnement est réfléchie directement par l’atmosphère terrestre et n’atteint jamais la surface de la Terre. Elle repart dans l’espace. Une partie de ce rayonnement traverse l’atmosphère et arrive jusqu’à la surface de la Terre. Il chauffe la Terre et repart ensuite vers l’espace. Mais l’atmosphère, qui est perméable à des rayons solaires à haute fréquence, est moins perméable à des rayons qui repartent dans l’autre sens avec une fréquence amoindrie.
En effet, le rayon arrive à haute fréquence à la surface de la Terre. Une partie de la chaleur est absorbée par la surface et une partie est rayonnée. Comme l’énergie a baissé, la fréquence des rayons qui repartent est diminuée. Il se trouve qu’un certain nombre de composants de l’atmosphère deviennent imperméables aux rayons à cette fréquence inférieure. Une partie du rayonnement solaire est ainsi piégée à l’intérieur de l’atmosphère. C’est ce qui fait augmenter la température à la surface de la Terre. Sans effet de serre, il ferait à la surface de la Terre autour de dix-huit degrés en dessous de zéro. Nous serions tous morts. C’est grâce à l’effet de serre que nous vivons. Mais c’est toujours une question de réglage. S’il y a trop d’effet de serre, il va se mettre à faire trop chaud.
Régler les modèles est extrêmement compliqué. Le chercheur doit tenir compte de l’évaporation, des nuages, des mouvements de l’atmosphère, etc. En fait, il n’y a aucun modèle aujourd’hui qui peut être dit un bon modèle. Les climatologues essaient de faire les modèles les meilleurs possibles. À l’intérieur de ces modèles, ils introduisent la question des gaz à effet de serre. D’après leurs modèles aujourd’hui, il semblerait que la densité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère joue un rôle primordial dans le réchauffement que nous vivons actuellement. C’est tout ce qu’on peut dire.

DEBAT – QUELLES DUREES D’OBSERVATIONS RETENIR ?

Stanislas de Larminat- Je ne doute pas une seconde que l’effet de serre existe. Quand on fait des modèles, une chose me paraît importante. Sur quelle période allons-nous caler nos modèles ? Le GIEC cale tout sur des observations depuis cent cinquante ans. Sur cette période, deux évènements sont concomitants : l’activité humaine et industrielle et l’augmentation de la température. Il se trouve une autre concomitance, dont on ne parle peut-être pas beaucoup.
L’activité solaire suit une multitude de cycles, dont celui de Suess dure 200 à 300 ans. Si on ne considère pas au moins mille ans pour construire un modèle, on occulte la cause de la période chaude médiévale et de la période entre les deux, au temps de Louis XIV notamment, qu’on appelle le petit âge glaciaire. Si un modèle n’est pas capable d’expliquer sur au moins mille ans les variations climatiques, comment peut-il établir des relations de cause à effet sur la période récente de cent cinquante ans ? Pour moi, c’est impossible.
Je vous ai entendu parler de la vitesse du réchauffement actuel. Il se trouve que dans ma petite expérience scientifique, j’ai eu la chance de d’avoir un débat avec la vice-présidente mondiale du GIEC. Ce débat était malheureusement privé, mais il a fait l’objet d’une petite publication. J’étais avec un spécialiste de modélisation. Nous avons posé la question des durées retenues dans les modèles. Ils ont répondu que si on remonte à plus de cent cinquante ans, on a des mesures qui ne sont pas suffisamment précises pour qu’on puisse les utiliser dans un modèle.
Il y avait deux choses étonnantes dans cette réponse. La première est que c’était une paléo-climatologue qui nous répondait. Je me demande quel est son métier, si ce n’est pas justement d’essayer de reconstituer des données avec des « proxy ». Dans le GIEC, il y a plusieurs centaines de paléoclimatologues, qui font très bien leur travail. Dire que ce n’est pas suffisamment précis est contradictoire avec le fait de dire que le réchauffement est plus rapide qu’au Moyen Âge. De deux choses l’une. Si les températures sont imprécises, on ne peut pas parler de la vitesse, parce qu’on ne peut pas comparer la vitesse de réchauffement actuelle avec celle du Moyen Âge.
Vous avez évoqué la circulation des planètes. Son effet se produit sur des dizaines de milliers d’années. Ça ne m’intéresse pas beaucoup. Ce que nous tirerons comme conclusions, en termes de mesures politiques ou économiques sur 30 000 ans, n’intéressera personne. En revanche, sur mille ans, ce qui s’est passé au Groenland, qui s’appelait « Terre verte » au Moyen Âge, c’est hier. Demain, allons-nous vers le Groenland ou vers une « Terre verte », c’est la question.

Olivier Rey- Les paléoclimatologues travaillent à des échelles de temps très longues, bien supérieures à mille ans. Sur ces échelles, la Terre est prise dans des dynamiques de très longue durée, si bien qu’à une période qui n’est pas si lointaine, la Terre était couverte de glace. La Manche n’existait pas. On pouvait aller à pied de « France » en « Angleterre ». Toute l’Europe du Nord était recouverte d’une calotte glaciaire. Ce sont des variations de bien plus grande ampleur, dont la raison est essentiellement liée à des questions astronomiques, mais qui se jouent à des échelles de temps très longues.
Avec mille ans, on tombe dans une échelle de temps problématique. À de grandes échelles, on connaît les données astronomiques qui pilotent ces grandes variations. Mais sur mille ans, c’est beaucoup plus compliqué. Les amplitudes des variations sont beaucoup plus faibles. Pour les apprécier réellement, il faudrait justement avoir des relevés précis. On ne dispose pas de relevé précis. Faute de données fiables, on ne peut pas dire grand chose. Aujourd’hui, pour caler les modèles, c’est comme ça. C’est fort regrettable, mais il se trouve qu’au Moyen-Âge, il n’y avait pas de stations météorologiques qui faisaient des enregistrements. On n’a effectivement, dans nos enregistrements aujourd’hui, qu’à peu près cent cinquante ans de perspective. 
On peut penser que ce n’est pas suffisant et affirmer que ces modèles ne sont pas fiables. D’une certaine manière, c’est exact. Mais si le réchauffement actuel est dû au rejet par l’activité humaine de gaz à effet de serre, nous ne sommes qu’au début d’un réchauffement qui ne va faire que s’amplifier, et qui va devenir catastrophique. 
Nous n’avons pas d’autres instruments que ces modèles pour essayer de comprendre ce qui nous arrive. Peut-on balayer d’un revers de main ce que ces modèles nous disent, parce qu’ils ne sont pas assez fiables ? Ou doit-on plutôt penser : ils ne sont certes pas très fiables, mais ce qu’ils nous disent est tellement catastrophique qu’un certain nombre de précautions doivent être prises. C’est la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Stanislas de Larminat- Le mot « paléoclimatologie » fait penser à la paléontologie, si bien qu’on s’imagine des ères géologiques. La paléoclimatologie inclut la période de mille ans. Je ne demande pas de remonter plus loin, mais au moins à mille ans. C’est possible avec des carottages dans la glace. Au Moyen Âge, quelques bateaux traversaient l’Atlantique et mesuraient des températures avec des seaux d’eau. Ce n’est pas suffisamment précis. Mais avec les reconstructions, on y parvient.

Olivier Rey- Je ne suis pas climatologue. Je suis obligé de m’en remettre, sur le climat, à ce que me disent les climatologues, comme en physique des particules je m’en remets aux spécialistes de la physique des particules, etc. Il se trouve que quand je travaillais à l’École polytechnique, j’avais comme collègue Hervé Le Treut, un éminent membre du GIEC. J’ai souvent parlé avec lui de son travail. Je peux penser que cet homme est un abruti, que ses modèles ne valent rien et que tous les membres du GIEC refusent absolument d’aller étudier le climat du passé pour se complaire à nous prédire la catastrophe.
Y a-t-il un complot mondial de tous les climatologues, qui seraient tous d’accord pour prédire des catastrophes, et qui refuseraient de faire les choses extrêmement simples à leur portée qui permettraient de donner plus de consistance à leurs modèles ? Je ne comprends pas.
Il n’y a que vingt-cinq ans qu’on parle de cette question du réchauffement climatique. Mais dans les années 1950, certains s’inquiétaient déjà.
John von Neumann, par exemple, n’est pas n’importe qui. Il a participé à l’élaboration de la bombe H américaine. Il semblerait que ça ait plutôt fonctionné. En 1955, dans un article intitulé « Pouvons-nous survivre à la technologie ? », cette figure majeure de la science au XXe siècle estimait que la quantité de dioxyde de carbone rejetée par l’industrie avait déjà à cette époque entraîné un réchauffement global d’un demi degré.
En 1979, un rapport commandé par l’administration américaine au National Research Council a montré qu’il y avait tout lieu de s’inquiéter. À la fin des années 1980, le GIEC a été créé, à la demande du G7, avec l’aval de Ronald Reagan et Margaret Thatcher — les grands écologistes qu’on connaît… Pourquoi des pays comme la Chine entrent-ils dans cette histoire-là ?
Je ne suis pas climatologue. Je ne connais pas tous les détails de la chose. Nous tous, quand nous avons une maladie, nous faisons plus ou moins confiance au médecin. Si on sait mieux que le médecin, ce n’est pas la peine d’aller le voir. 
Si on est plus renseigné sur le climat que les climatologues, peut-être. Mais dans la position où je suis, j’estime rationnel d’écouter ce que disent les climatologues. Ceux avec qui j’ai parlé ne me sont pas apparus des hurluberlus ou des idéologues complètement fous. D’autre part, je ne comprends pas, si véritablement ils disent n’importe quoi, comment ils arrivent à avoir une telle emprise et à exercer une telle influence sur toute la Terre, avec des données fausses.

DEBAT – LA COMPLEXITE DES MODELES ET LES CALCULS DE PROBAILITE

Stanislas de Larminat- Il ne s’agit pas d’être climatologue, mais de se poser des questions simples. Les chercheurs que vous citez ne sont pas des hurluberlus. Au GIEC, il y a des milliers de spécialistes. Chacun, pris individuellement, n’est jamais un hurluberlu. En revanche, on peut se poser des questions entre spécialistes de modélisation, et non pas entre spécialistes de climat.
Pour faire ses modèles, le GIEC utilise ce qu’il appelle des planètes numériques. La planète est divisée deux cent mille petits cubes — de continents, d’océans, de basse atmosphère, de haute atmosphère. Pour chacun de ces cubes, vous avez une dizaine d’équations de thermodynamique à résoudre. Aucune de ces lois ne porte à critique. Elles sont. Mais cela donne quelque deux millions d’équations à résoudre. Malgré de très beaux ordinateurs, ça commence à devenir compliqué. Cette complexité a deux conséquences que je vais illustrer.
Premièrement, dans ses rapports de quatre mille pages, le GIEC lui-même affirme qu’il ne prévoit aucune indication concernant les nuages. Faire de la climatologie sans nuage m’échappe un peu. Ce qui m’étonne est la raison évoquée : ce serait trop compliqué[1]. Là, je ne comprends plus. Ou bien ils ont des modèles qui permettent de résoudre la complexité, ou bien ils ne les ont pas. Or, l’effet des nuages est fondamental.
Certains scientifiques disent certaines choses, mais il y en a d’autres que les médias ne relaient pas. Je pense en particulier au Danois Henrik Svensmark. Il explique que les supernovas explosent. Quelques millions d’années plus tard, des rayons cosmiques arrivent dans le système solaire. En fonction de l’activité magnétique du Soleil, les rayons sont plus ou moins renvoyés dans le reste du cosmos. En ce moment, nous sommes bombardés par des rayons cosmiques qui datent de l’explosion de supernovas. Ces rayons cosmiques qui arrivent en quantité variable ont un effet sur la création de nuages. Ce n’est pas l’activité calorique du Soleil. Ce n’est pas non plus une activité astronomique du Soleil. C’est l’activité magnétique du Soleil qui est en cause.
Comme on le voit sur les photos satellites, environ 65 % de la surface de la Terre est couverte de nuages. Si pendant vingt, cent ou deux cents ans (les cycles magnétiques du soleil sont de l’ordre de 200 ans), on a plutôt 60 %, ou 66 %, ou 68 % de nuages, on observera des cycles climatiques. Éliminer les nuages dans les modèles est regrettable, et la raison en est peut-être que les prendre en compte serait trop compliqué.
Deuxièmement, la complexité accumulée entraîne une complexité à estimer les probabilités. 
Lors du débat que nous avons eu avec la vice-présidente mondiale du GIEC, nous lui avons posé la question suivante : « Où est le calcul du chiffre que vous annoncez publiquement : il y a 95 % de probabilité que la cause du réchauffement soit humaine ? » La réponse a été très curieuse : il ne s’agit pas d’une probabilité objective, mais d’une probabilité subjective.
Une probabilité subjective a une certaine valeur. Mais j’ai été choqué par le fait que ce chiffre exprime la proportion du nombre de scientifiques qui sont d’accord avec le GIEC. Ici, je commence à ne plus être d’accord. Il ne s’agit plus de probabilité subjective mais de probabilité idéologique. Pourtant, je ne suis pas un partisan du complot.
Certains modélisateurs, très sérieux, ont pris le parti de ne plus faire deux cent mille cellules, mais de n’en faire qu’une, et de ne mettre que les dix mêmes équations, qu’on appelle des EBN (energy balanced models), les mêmes que celles du GIEC, dans une seule cellule. Ils arrivent à la conclusion, bien entendu en y ajoutant mille ans d’observations, que c’est l’activité magnétique du Soleil qui est la cause principale du réchauffement.

Olivier Rey- Concernant le climat, on parle de « modèle » et pas de « théorie ». Cela en dit long déjà. Une théorie est quelque chose qui est bien établi. À partir de la théorie, on peut tirer un certain nombre de conclusions. Quand on parle de modèles, c’est qu’en réalité on n’a pas vraiment de théorie. On est obligé de bricoler à partir de l’ensemble des choses qu’on connaît. Comme vous l’avez dit, on est obligé d’utiliser de la thermodynamique, de la dynamique des fluides — des tas de sciences diverses qu’on essaie de concaténer dans un modèle. Les modèles actuels sont déjà d’une monstrueuse complexité, si bien qu’on ne peut en déduire quelque chose qu’en les faisant tourner sur les ordinateurs les plus puissants du monde. Cela demande des puissances de calcul gigantesques, avec des résultats qui demeurent effectivement sujets à caution. Dans quelle mesure le modèle correspond au phénomène à étudier, effectivement on n’en sait rien.
En restant pourtant le plus calme possible, on peut constater que le climat est pour nous d’une importance capitale. Scientifiquement, c’est un objet extrêmement difficile à appréhender. Des climatologues développent des modèles qui à bien des égards demeurent insatisfaisants. Cependant, on ne dispose de rien d’autre pour essayer d’étudier le climat tel qu’il évolue actuellement. Nous avons alors deux possibilités. D’une part, on peut penser que les modèles ne sont pas assez fiables, et que donc ce qu’on peut en tirer n’a pas grande valeur. Pensons donc à autre chose. On peut aussi penser que ces modèles sont très insatisfaisants mais en même temps que c’est ce dont nous disposons de meilleur pour essayer d’appréhender le climat. Or, ces questions sont extrêmement importantes. Elles ont même pour l’humanité une importance vitale. Ainsi, si les modèles nous indiquent qu’il y aurait certaines choses à faire pour éviter les catastrophes possibles, il vaudrait mieux en tenir compte.
C’est une question de prudence. Si quelqu’un vous annonce une catastrophe qui risque de vous arriver, mais que cette personne a pour vous une fiabilité limitée, vous pouvez penser : ce qu’elle m’annonce, je n’en ai rien à faire parce que cette personne n’est pas assez fiable pour moi. Vous pouvez aussi vous dire : oui, elle n’est peut-être pas très fiable, mais si ce qu’elle m’annonce est vrai, je ferais mieux quand même d’en tenir compte. Par rapport aux modèles climatiques, c’est un peu la position dans laquelle nous nous trouvons.

DEBAT- LE PARAMETRAGE DES MODELES ?

Stanislas de Larminat- Il faudrait, encore et encore, approfondir la qualité des modèles. Vous dites que c’est ce qu’il y a de mieux. On peut travailler ces sujets et accepter d’aller à la diversité des sources… Tout à l’heure, je vous ai parlé des probabilités. Ce sont les phrases même du GIEC. Quand le GIEC dit : qu'il ne prend pas en compte les nuages[1], ce sont les phrases du GIEC. C’est intéressant de travailler ce que dit le GIEC, et de travailler ce que disent les autres modélisateurs. Or, personne ne le travaille. Il n’y a jamais de conférence entre le GIEC et des modélisateurs opposés.
Par exemple, même si vous n’êtes pas spécialiste, vous devinez qu’un modèle est un objet compliqué qui doit être paramétré. Imaginez que vous soyez devant votre radiologue, qui vous fait une radio des poumons. Si la machine n’a pas été paramétré pour coller à la réalité, on va devoir la paramétrer.
Si on demande au GIEC comment ils paramètrent leurs modèles, ils répondent : « en fonction du résultat qu’on veut trouver »[2]. Sur les vingt-cinq plus grandes agences de modélisation, vingt-trois fonctionnent de la sorte. Je vois quelques sourires dans la salle. Pour ma part, je ne me moque pas. Qu’un modèle doive être paramétré en fonction de la réalité, c’est bien. Mais en fonction de la réalité qu’on veut prouver, c’est une autre chose.
Les prix Nobel allemand et japonais qui ont été récompensés il y a un an sur les modélisations climatiques ont été les grands spécialistes de ce qu’on appelle les flux d’ajustement. Ils ont passé vingt ans à changer les paramètres en fonction du résultat qu’ils voulaient trouver. Pour ma part, je continue à affirmer qu’il y a une autre manière de faire de la modélisation.
Il existe par exemple des modèles en boîte noire. Sans instruction, le modèle va calculer par lui-même les fameux paramètres. Cependant, dans ce cas, mille ans de relevés sont nécessaires si on veut quantifier des relations de cause à effet.

Olivier Rey- Un certain nombre de sciences sont bien établies : la thermodynamique, la mécanique des fluides, etc. Mais pour étudier le climat, on est obligé de recourir à de multiples sciences. Il n’existe pas une théorie de l’évolution du climat.

Louis Daufresne- Est-ce que ce croisement vous amène à penser que l’origine humaine est une certitude ?

Olivier Rey- Ce n’est pas une certitude. C’est une possibilité. Les modèles sont loin d’être d’une fiabilité à toute épreuve. Mais les climatologues, quand ils cherchent à faire les meilleurs modèles dont on puisse disposer aujourd’hui, en arrivent à des conclusions qui peuvent être assez alarmantes.

DEBAT – LA QUESTION DES PREVISIONS

Stanislas de Larminat- Le seul moyen de juger de la qualité d’un modèle est la question des prévisions.  Certes, on ne peut pas attendre qu’une catastrophe soit arrivée dans vingt ou trente ans et ne rien faire en attendant. Nous devons agir avec prudence.
En mathématiques, un modèle procède de la même manière pour prévoir le futur ou reconstituer le passé. Une fois que j’ai calibré mes modèles, je fais une prévision. Je propose au GIEC de dire : Chiche ! Inversons le propos. Retenons vos modèles, avec vos paramètres. Comment recalculez-vous la température du Moyen Âge, que vous ne preniez pas en compte ?
Le GIEC l’a fait. Il reconstitue une période complètement floue[3]. Selon moi, ce n’est pas crédible. Au Moyen Âge, la température aurait été constante, comme au début du XIXe siècle, puisque tout démarre à partir de cent cinquante ans, tout est la faute de l’homme. À l’époque du Groenland, les Vikings n’avaient pas extrait de pétrole. Forcément, il n’y a pas de cause humaine au Moyen Âge.
Dans les a priori de sensibilité au gaz carbonique, et de sensibilité à l’activité solaire que le GIEC a retenue, il a retenu des choses qui expliquent à partir de cent cinquante ans qu’il y a une corrélation entre l’activité humaine et la température. Mais ces paramètres retenus ne fonctionnent pas pour reconstituer le passé récent.
Je résume cette idée dans une phrase cinglante : un modèle qui n’est pas capable de reconstituer le passé n’est pas habilité à prévoir le futur. 

Olivier Rey- N’étant pas climatologue, je ne suis pas capable d’entrer dans la discussion serrée des mérites et des défauts de tous ces modèles. Dans de nombreux domaines, nous sommes obligés de nous en remettre à des gens plus savants que nous. Je veux bien entendre les reproches qui sont faits aux climatologues.
Cependant, je ne comprends pas qu’il puisse exister une psychose mondiale à partir de modèles absurdes. Il pourrait y avoir un pays particulier où les gens se montent la tête sur telle ou telle question. Mais comment arrivent-t-ils à faire des conférences qui réunissent tous les pays du monde, avec même la Chine. Des pays se font la guerre mais arrivent tout de même à se mettre d’accord sur le fait qu’il y a un réchauffement climatique d’origine anthropique. C’est extraordinaire. C’est unique au monde. Ces pays ne sont d’accord sur rien et parviennent tout même à se mettre d’accord là-dessus. Il y a quelque chose de miraculeux.
Les Américains sont allés sur la Lune en 1969. Très vite, certains on dit qu’en réalité, ils n’étaient pas allés sur la Lune et que les images avaient été filmées dans un studio. À l’époque de la guerre froide, la compétition était énorme entre les Soviétiques et les Américains pour la conquête de l’espace. C’est d’ailleurs en réponse au succès du Sputnik que Kennedy avait voulu absolument que les Américains soient les premiers à envoyer un homme sur la Lune. Quelqu’un a fait remarquer que la meilleure preuve que les Américains y sont arrivés est que les Soviétiques n’ont pas démenti. À l’époque de la guerre froide, si les Américains avaient tourné les images dans un studio, il se serait trouvé un espion russe pour être au courant et pour contester cette réussite américaine.
Concernant le degré de confiance qu’on peut accorder à certaines hypothèses, le fait que des personnes qui ont des intérêts aussi divergents parviennent à se mettre d’accord sur un certain nombre de propositions est un argument de poids. Le consensus ne prouve pas que ces propositions sont vraies, mais leur donne une certaine crédibilité.
Sinon, ces conférences qui réunissent tous les pays du monde sont miraculeuses. Ils peuvent se disputer ensuite sur les mesures à prendre, mais aucun ne conteste l’existence d’un réchauffement d’origine anthropique. Je suis démuni, parce que je ne suis pas capable d’entrer dans le détail des modèles pour les contester ou les approuver. Ce sujet me dépasse. Je ne suis pas climatologue, ni modélisateur. Je ne sais pas. Mais je trouve que ce consensus international entre puissances divergentes donne à penser.

DEBAT – LE CONSENSUS EN SCIENCES ?

Stanislas de Larminat- Ouvrons le dictionnaire Larousse au mot « consensus ». Nous pensons tous que le consensus désigne le contenu d’un accord. Il y aurait un consensus scientifique parce que tout le monde serait scientifiquement d’accord. Le Larousse décrit une deuxième acception du mot, à savoir la procédure pour arriver à cet accord.
L’ONU utilise le mot « consensus », non pas pour dire que nous sommes tous d’accord, mais en tant que principe d’action. Le directeur juridique de l’ONU explique officiellement que dans cette institution, les termes « sans vote » et « par consensus » sont synonymes et donc interchangeables [4].
Rappelez-vous la COP 21. Monsieur Fabius, qui présidait la conférence, a conclu : « Je ne vois pas d’objection dans la salle, je déclare l’accord de Paris pour le climat adopté. » Il n’y a pas eu de vote.
Le GIEC lui-même, dans ses statuts, fonctionne par consensus[5]. Mais le consensus n’est pas une preuve scientifique. C’est un argument d’autorité, qui n’apporte pas d’autorité aux arguments. Je vous ai donné des éléments pour comprendre que la modélisation est un processus plus compliqué qu’il n’y paraît. Il y a d’autres manières de modéliser la réalité. Ce n’est pas parce que des milliers de scientifiques sont d’accord qu’on peut affirmer que nous sommes tous d’accord.
Pourtant, je ne crois pas au complot. Je pense plutôt à des effets d’aubaine. Ce résultat sert les intérêts de beaucoup. On pourrait se demander à qui il est utile.
Sur un sujet similaire, la sécurité alimentaire, le principe est le même. Faisons-nous des études épidémiologiques pour prouver l’existence de réels problèmes de santé ? Pour Bernhard Url, directeur de l’EFSA (European Food Safety Authority), on en arrive à une science qu’il appelle « le Facebook de la science ». On y va avec des évaluations « J’aime ». J’aime le GIEC, parce que — j’hésite à le dire —, ça nous fait peur, alors ça nous plaît. Pourtant, les questions sont sérieuses.
Le consensus ne constitue pas une preuve. En science, je crois au débat contradictoire. De tels débats, tels que nous en avons ce soir, existent-t-il entre modélisateurs, et de façon publique ? C’est impossible, parce qu’il y a une volonté délibérée de faire taire les dissensuels.
Dans les procédures pour établir des consensus, le spécialiste américain Henry Martyn Robert [6] avait établi des règles d'ingénierie du consensus. Pour parvenir à un consensus, on doit éliminer les dissensuels. Je connais des modélisateurs très sérieux. J’en connais un qui a écrit des livres de modélisation en anglais, qui sont utilisés dans toutes les universités américaines pour faire de l’identification des systèmes complexes. Quand il demande à des universitaires de mettre à l’ordre du jour la question climatique, ils répondent : « Il n’en est pas question. Nous n’aurons jamais de budget pour cela. » Ne me demandez pas pourquoi. Chacun répond comme il le veut. 

Olivier Rey- Je suis d’accord avec les arguments de Stanislas de Larminat, jusqu’à un certain point seulement.
En mathématiques, on s’appuie sur des démonstrations. On ne met pas un théorème aux voix pour savoir qui est pour et qui est contre. Dès qu’on passe dans les sciences de la nature, les choses sont plus complexes car elles ne sont jamais démontrées. On a des théories qui se trouvent plus ou moins en accord avec un certain nombre de faits. Quand une théorie rend compte d’un nombre important de faits et n’est jamais démentie par d’autres faits, on a une très grande confiance dans cette théorie. Cela ne signifie pas que n’arrivera pas plus tard une autre théorie qui mettra qui mettra des limites à la théorie qu’on prenait auparavant comme absolue.
L’exemple typique est la physique de Newton, qui donnait toute satisfaction jusqu’à ce que certaines expériences posent problème. Finalement est arrivée la théorie de la relativité d’Einstein, qui résout les problèmes. D’ailleurs, cette théorie n’invalide pas la théorie de Newton, mais montre qu’elle n’était valable que si les vitesses ne sont pas trop grandes, et en particulier ne se rapprochent pas trop de celle de la lumière.
Dans certaines zones, et le climat en est l’exemple par excellence, on n’a pas vraiment de théorie. On bricole avec les modèles, du mieux que l’on peut. On obtient des résultats qui sont sujets à caution.
On peut faire tous les reproches du monde à ces modèles. Si on avait les moyens de faire mieux, je ne comprends pas pourquoi des grandes puissances aux intérêts aussi divergents ne mettraient pas en avant ce qui irait dans leur sens.
Le consensus international actuel autour des modèles du GIEC vient du fait que personne ne sait faire mieux. C’est insatisfaisant, mais malheureusement on n’arrive pas à aller au-delà.
Dans des domaines où il n’existe pas d’expérience décisive, on peut douter de tout, on peut toujours contester. Une personne seule qui conteste peut avoir raison contre toutes les autres. C’est toujours une possibilité.
J’essaie de me placer dans la position du citoyen qui ne maîtrise pas toutes ces questions. Si véritablement il y avait des personnes qui ne sont pas d’accord avec les modèles dominants, comment se fait-il que ces personnes n’arrivent pas à trouver audience auprès de puissances qui auraient intérêt à mettre en cause les conclusions du GIEC ?

DEBAT – COMPLOT CLIMATIQUE OU EFFET D’AUBAINE ?

Stanislas de Larminat- Je ne crois pas qu’il y ait un complot. Mais il y a un effet d’aubaine.

  • Mondialistes. Plus le problème est global, plus il fait les choux gras des partisans de la gouvernance mondiale. Ceux-ci seront enchantés ensuite de tuer la souveraineté de chaque État.
  • Malthusiens. Ils diront que plus nous sommes nombreux sur Terre, plus le climat se réchauffera. Il faut donc réduire la population et les ressources sont à la clé.
  • Financiers. Ils vont créer des normes autour de ce consensus, et donc de la consommation obligatoire. C’est tout le sujet de la croissance verte. Ce phénomène va à l’encontre de ce que j’appelle la subsidiarité du consommateur. Si celui-ci était correctement informé, par exemple par des débats comme nous en avons ce soir, il pourrait se dire : c’est moi qui vais choisir d’installer un double vitrage ou de faire du soutien scolaire à mes enfants. Je ne suis pas nabab, je fais mes choix. La subsidiarité du consommateur s’oppose à des normes et des consommations obligatoires.
  • Scientifiques. Ils ont leurs problématiques de budget. Dans une université de modélisation, si vous voulez obtenir des budgets pour étudier la cause solaire, vous n’y parviendrez pas. Si vous connaissez un scientifique qui parvient à décrocher des budgets, je suis preneur.
  • ONG. Elles n’ont pas gagné le pouvoir électoral, mais elles ont bel et bien gagné le pouvoir d’influence.
  • Matérialistes. Il n’y a rien de mieux, pour tuer le culte au créateur, que de rendre un culte à la créature. Les transhumanistes vont affirmer que l’homme est tout puissant, qui peut même créer l’apocalypse. Ceux qui ont un autre type d’approche que matérialiste vont garder l’idée que l’apocalypse est plus d’origine divine que d’origine humaine.
  • Adeptes des métavers. Ces univers sont virtuels, mais ils sont tellement sophistiqués qu’ils semblent plus réels que le réel. De même, les modèles du GIEC sont tellement compliqués qu’ils sont plus réels que le réel.

Mais je ne crois pas qu’il y ait d’assemblage. Tous ces gens-là ont des cultures différentes et sont incapables de monter un mensonge. Mais ils ont tellement d’intérêt à ce que cela perdure, que les dissensuels sont exclus. Parce qu’ils nuisent à trop d’intérêts..

Olivier Rey- J’entends que pour certaines personnes, cette histoire de réchauffement climatique est une aubaine. Mais dans les conférences internationales, on retrouve les États-Unis et la Chine, qui là s’accordent sur la cause anthropique du réchauffement climatique. Comment les deux grands rivaux du XXIe siècle peuvent-ils trouver tous les deux avantages à la chose, c’est là quelque chose que je ne comprends pas.

Stanislas de Larminat- J’ai une piste. Lors de la crise des euromissiles, Mitterrand avait critiqué les mouvements pacifistes allemands : « Le pacifisme est à l’Ouest et les euromissiles sont à l’Est. » Je pense qu’aujourd’hui, les États-Unis nous envoient leurs écologistes pour nous paralyser.
Pour ce qui est de la Chine, on peut regarder ce qui se passe dans les conférences internationales comme la COP 21. Tout le monde est effectivement d’accord pour mettre en place des quotas d’émissions. Certains vont demander des quotas par pays. La Chine demande des quotas par habitant, ce qui lui permet d’avoir de la marge.
Nous délocalisons nos industries émettrices en Inde et en Chine, ce dont ces pays profitent. C’est une formidable aubaine pour la Chine et pour les États-Unis.

Olivier Rey- Si l’essentiel des pays du monde trouve une aubaine dans cette affaire, finalement ce serait une bonne affaire ?

[Rires]

Stanislas de Larminat- Je pense que c’est toujours une mauvaise affaire lorsque la vérité n’est pas au cœur. La vérité rend libre, le mensonge nous paralyse, en particulier avec la peur. Une accumulation d’effets d’aubaine ne conduit pas à la libération de l’homme.

Olivier Rey- J’en reste à cette chose extrêmement bizarre que dans un monde aussi conflictuel que celui que nous connaissons, on arrive à l’échelle mondiale à avoir une sorte d’accord internationale sur cette question. Il y a là un mystère. C’est peut-être le mystère du mal.

Stanislas de Larminat- C’est ce que je pense.

DEBAT – QUID DU PRINCIPPE DE PRECAUTION ?

Louis Daufresne- Je voudrais aborder la question du principe de précaution. Jusqu’où doit-on aller dans la prise en compte de ce réchauffement ou de ce dérèglement ? On va passer de l’acceptation de l’idée à la manière de changer nos comportements ? Jusqu’où doit-on changer ses comportements ?

Olivier Rey- C’est une grande question. On est dans le cas par excellence d’application du principe de précaution, qui consiste à s’abstenir d’un certain nombre de choses si ces choses sont susceptibles de porter une atteinte grave et irréversible à l’environnement.
Le principe de précaution a été dévoyé dans l’espace public. Aujourd’hui, on l’invoque pour ne pas faire décoller un avion parce qu’il y a de la grêle. Cela n’a strictement rien à voir avec le principe de précaution. C’est de la simple prudence.
Le principe de précaution ne s’applique qu’en cas de potentielle atteinte, grave et irréversible, à l’environnement. Quand on s’occupe du climat, c’est le cas. Même si on n’est pas sûr de la fiabilité des modèles, la possibilité existe de dommages graves à l’environnement. Au nom du principe de précaution, on pourrait déployer toutes les mesures possibles et imaginables.
Mais l’humanité dispose de moyens limités. Tous les moyens que nous dépenserons pour éventuellement contrer un éventuel réchauffement climatique prévu par les modèles, nous ne pourrons pas les employer ailleurs. Par exemple, aujourd’hui, il vaut mieux avoir un bon climat, mais il faut aussi manger. Si on ne mange pas, qu’il fasse chaud ou froid, de toute façon, on va mourir.
Les mesures qu’on prend pour lutter contre le réchauffement climatique ne doivent pas aboutir par exemple à une ruine de l’agriculture.
Même si on prend au sérieux les prévisions climatiques et le principe de précaution, reste la question du dosage. Il faut faire attention à ce que les mesures que l’on prend ne soient pas pires que le mal qu’on pense éviter grâce à elles.
On peut risquer un minuscule parallèle avec le phénomène du Covid-19, sans entrer dans la polémique. On a confiné tout le monde, on a peut-être évité un certain nombre de morts mais on a abîmé aussi la vie de beaucoup d’enfants. Les services de psychiatrie infantile sont débordés depuis deux ans. Il y a de nombreux dommages. Si on faisait la balance entre ce qu’on a évité par des mesures drastiques et tous les dommages que ces mesures ont occasionnés, qui sont plus difficilement mesurables, on s’apercevrait que le bilan n’est pas celui qu’on nous présente.
Si on applique à fond le principe de précaution sur la question climatique, il faut faire attention aussi à ne pas créer des problèmes qui seraient encore pires.

Stanislas de Larminat- Je me retrouve dans les mots que vous avez employés à propos du principe de précaution. Ce sont ceux de la Constitution : quand on est face à une incertitude en l’état des connaissances scientifiques actuelles, et qui peuvent affecter d’une manière grave et irréversible, il faut prendre des mesures provisoires et proportionnées. Cela rejoint tout à fait ce que vous dites. Les trois mots clés sont :

  • Incertitude. Pour ma part, j’ai la certitude que c’est le soleil. Mais entre nous deux, il reste en effet une incertitude.
  • Grave. Les conséquences graves et irréversibles : desquelles parle-t-on ? Tout le monde a en tête les problématiques d’inondations, de sécheresse, de cyclones. Je lis le GIEC lui-même :
    • Le degré de confiance est élevé que les inondations des cinq derniers siècles était supérieur à celles depuis 1900[6]. 
    • Il n’y a pas de tendance significative dans la fréquence des cyclones[7].
    • Les modèles climatiques sont incapables de prévoir les événements extrêmes à cause du manque de résolution spatiale et temporelle[8]. Je l’évoquais tout à l’heure : le modèle est tellement compliqué qu’il manque de capacité.

De quelle gravité parle-t-on ? Pour ma part, je me réjouis qu’il y ait un peu plus de gaz carbonique, parce qu’il y a plus de photosynthèse. De quelles conséquences parle-t-on ?

  • Mesures proportionnées. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale disent qu’il est urgent de « mobiliser les milliers de milliards de dollars dont la planète a besoin pour enrayer le changement climatique. ». Quelle prétention ! Des milliers de milliards ! Ma conviction est que ces mesures ne sont pas proportionnées :
    • La COP 26 a interdit le financement de centrales énergétiques à partir de fossiles sans technique de capture de carbone. En conséquence, l’Afrique, qui consomme et produit dix fois moins d’énergie que nous, est interdite de faire des centrales à combustible fossile. Les pays pauvres vont devenir encore plus pauvres. Cela me paraît complètement disproportionné. La planète n’est pas en danger à ce point de rendre les pauvres encore plus pauvres.

[Applaudissements]

Il est tellement simple, du haut de l’ONU, de proclamer qu’on va éradiquer la pauvreté. Je me demande parfois si on n’est pas en train d’éradiquer les pauvres, ce qui est une autre paire de manches.
On va supprimer les voitures thermiques en Europe et passer aux voitures électriques. Savez-vous que la mobilité africaine se fait grâce à nos véhicules d’occasion ? 80 % des voitures d’occasion sont exportées vers les pays pauvres. Quand nous n’aurons plus de voitures thermiques et que nous n’aurons que des voitures électriques, on va en plus appauvrir ces pays-là, parce qu’ils n’auront ni l’électricité ni les voitures. Ils vont devenir encore plus pauvres. Tout cela est disproportionné.
Comme j’ai personnellement la conviction qu'on est en train de lutter contre le soleil, je pense que le principe de précaution ne devrait pas s’appliquer.

Olivier Rey- Au départ, nous convenions tous les deux qu’il y a un réchauffement. À la fin, je m’accorde avec vous pour dire qu’il faut faire attention. Il n’y a pas que le réchauffement climatique dans la vie. Il y a aussi beaucoup d’autres choses. Toute l’énergie qu’on met à lutter contre le réchauffement climatique, on ne la met pas ailleurs. Ce comportement peut avoir des effets désastreux.
Ce n’est qu’au milieu qu’il y a un petit passage où nous ne sommes pas tout à fait d’accord. J’ai tendance à faire confiance à mes collègues climatologues, à penser qu’ils font du mieux qu’ils peuvent, même si leurs résultats sont sujets à caution. 
Concernant les conclusions à en tirer, quand bien même il y a un réchauffement climatique d’origine anthropique, il faut faire attention que les efforts qu’on mettrait pour limiter ces émissions ne créent pas des problèmes encore plus graves.
Le caractère de gravité, d’irréversibilité, n’existe pas uniquement sur le plan climatique.

DEBAT –QUELLES PRECONISATIONS ?

Stanislas de Larminat- Je vous remercie d’avoir accepté cette disputatio. Pour revenir au réel, je souhaiterais qu’en science, on organise de réelles disputatio publiques, plutôt que d’en rester à des discussions de cabinets ou de congrès scientifiques.
Le dissensuel ne peut pas être une personne qui a soif d’égo. Il doit être crédible, et donc financé. Aux États-Unis, utilise le système des red teams. Des universités, et même le Congrès, financent des équipes « rouges », de la couleur de la dissension, et des équipes « bleues », de la couleur du consensus.
Il faut un équilibre de budget. À partir du moment où les dissensuels touchent des budgets, qu’ils aient le devoir d’organiser des débats publics. Je plaide pour le financement des dissensuels. 

Olivier Rey- J’ai évoqué la polarisation politique qui s’est opérée aux États-Unis entre démocrates et républicains sur la question du réchauffement climatique. Ce sujet est devenu un simple marqueur d’appartenance, déconnecté de la véritable question. Selon qu’on est de droite ou de gauche, nos réflexes peuvent nous amener à trancher sur la question sans même l’examiner. Il faut faire très attention à cela.
À titre personnel, je suis assez révulsé par les tribunes qu’on offre partout à Greta Thunberg, quand on sait l’usage que les régimes totalitaires ont su faire des enfants pour terroriser les adultes. Cette utilisation est typique des régimes totalitaires. Il y a quelque chose de profondément malsain et inquiétant dans les périples de cette adolescente suédoise qui parcourt le monde pour mettre les gens en accusation.Mais il faut prendre garde cependant à ne pas confondre la réalité ou l’irréalité des faits avec la sympathie ou l’antipathie qu’on porte à la personne qui les annonce. J’aime bien rappeler cette phrase de saint Clément d’Alexandrie qui remarquait que même au diable, il arrive de dire des vérités. Il mettait en garde ses co-religionnaires : « Il ne faut pas sottement condamner d’avance les paroles à cause de celui qui les prononce. » Ce n’est pas parce que c’est Greta Thunberg qui le dit que c’est forcément faux.
Nous devons garder notre sérénité sur cette question et ne pas immédiatement partir dans le côté passionnel.
Deuxièmement, je vous dis ma position de citoyen lambda par rapport aux questions climatologiques qui ne sont pas du tout de ma compétence. J’ai tendance, pour en connaître quelques-uns, à penser que les climatologues sont des chercheurs qui essaient de faire leur travail du mieux qu’ils peuvent. Certaines de leurs annonces sont assez inquiétantes. Nous avons des raisons de nous inquiéter.
Mais cela ne répond pas à la question des attitudes à adopter. Je pense que nous devons tenir compte de cette possibilité qu’un rejet inconsidéré de gaz à effet de serre entraîne des problèmes graves, mais qu’en même temps nous sommes confrontés à énormément de problèmes graves et que ce problème-là ne doit pas devenir le problème qui occulte tous les autres.
Il y a peut-être un très grand effet d’aubaine pour les gouvernements. Le réchauffement climatique devient une sorte d’invocation qui permet de faire passer toutes sortes de mesures, à partir du moment où on place les populations sous les menaces monstrueuses qui risquent de s’abattre sur elles. Sur l’effet d’aubaine général, je mettrais l’accent sur ce point-là : créer une atmosphère générale de sauve-qui-peut qui donne une beaucoup plus grande latitude aux gouvernements.

QUESTIONS de la SALLE

Infléchir l’activité humaine

Avec la période Covid, le monde a arrêté sa production humaine pendant près de deux ans. Cela n’a pas infléchi l’action sur le climat. Peut-on penser qu’une action humaine collective peut avoir un quelconque effet pour limiter ce réchauffement ? 

Olivier Rey- Si on accorde du crédit à l’idée que les gaz à effet de serre jouent un rôle important aujourd’hui dans la question du réchauffement climatique, le fait de réguler, de faire décroître ou d’augmenter ces rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère va avoir un effet. Cela étant, du point de vue du climat, ces effets sont toujours à long terme. Ce n’est pas en s’arrêtant un ou deux ans que ça changera quoi que ce soit.
Un argument classique consiste à dire : si on ne peut pas prédire le temps qu’il va faire la semaine prochaine, comment pourrait-on prédire le climat dans cinquante ou cent ans ?
Mais ces problèmes sont tout à fait différents. Le climat est lié grossièrement à la quantité d’énergie dans l’atmosphère. La chaleur, définie comme l’agitation des corpuscules, est liée à la moyenne des vitesses au carré des particules qui composent l’air. La température est directement liée à une quantité d’énergie. On peut évaluer une quantité d’énergie globale sans savoir quelle sera la concentration d’énergie la semaine prochaine à tel endroit.
Vous pouvez dire par exemple que vu son budget, le Paris-Saint-Germain va gagner le championnat de France. Mais est-ce qu’il va marquer un but au prochain match à la 23e minute, on ne sait pas. On pourrait dire : si vous ne savez pas comment va jouer le PSG à son prochain match, comment pouvez-vous dire qu’il sera champion de France ? Ce n’est pas du même ordre. On peut avoir des prévisions climatiques sans prévision météorologique.

Stanislas de Larminat- Je plaide pour qu’on passe de cent cinquante à mille ans, alors sur deux ans on ne peut rien affirmer.

 QUESTION – QUID DE LA PEUR ?

En tant que chrétiens, devons-nous avoir peur du réchauffement climatique et du dérèglement ?

Stanislas de Larminat- Chez les chrétiens, la peur est souvent la conséquence du mensonge. Dans la Genèse, le démon fait des vrais mensonges et des demi-vérités. Immédiatement après ces contre-vérités, Dieu interpelle Adam : « Où te caches-tu ? » Celui-ci répond : « J’ai eu peur ».
Je fais référence à des peurs collectives dont on est incapable d’avoir des expériences personnelles. Quand j’ai peur de me brûler en m’approchant du feu, cette peur est salutaire. Pendant Deuxième Guerre mondiale, quand un Juif voyait son voisin partir dans le fourgon, je comprends qu’il ait eu peur, parce qu’il faisait cette expérience de voir son voisin partir.
On peut faire l’expérience personnelle du réchauffement climatique. Quand je suis vigneron, je vois que les dates de vendanges avancent. En revanche, je maintiens qu’il est impossible de faire une expérience personnelle de la responsabilité humaine dans le réchauffement. Cette peur m’a été mise dans le crâne. Ces peurs collectives sont souvent précédées du mensonge.

Un peu de thermodynamique

Louis Daufresne- Que faites-vous de l’argument selon lequel la quantité d’énergie et la chaleur sont liés ?

Stanislas de Larminat- C’est une réalité physique que je ne conteste pas.

Louis Daufresne - Mais l'homme n'a jamais autant produit d'énergie …

Stanislas de Larminat- La chaleur émise par l’homme n’a rien à voir avec la chaleur qui existe dans la planète.

Olivier Rey- En effet, ce n’est pas la chaleur même des activités humaines qui réchaufferait la terre. C’est l’émission de gaz à effet de serre qui, à travers un phénomène physique de grande ampleur, arriverait à produire à produire ce réchauffement.

Louis Daufresne- C’est bien l’importante activité humaine qui est en cause : beaucoup de voitures qui roulent, etc.

Olivier Rey- Non, ce sont des rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Il peut y avoir énormément d’activités sans rejet. Une centrale nucléaire produit une énergie énorme mais pas de gaz à effet de serre. 

Louis Daufresne- Il n’y a aucun lien mécanique entre notre activité et le fait que ça se réchauffe ? Si je prends ma voiture, si je chauffe mon appartement, dois-je me culpabiliser en pensant que je contribue au réchauffement climatique ?

Olivier Rey- Si la question touche particulièrement l’humanité contemporaine, c’est que nous vivons depuis quelques siècles avec l’idée que grâce à la science et à la technologie, les êtres humains vont prendre le contrôle de la nature. Il se trouve qu’aujourd’hui, différents signes nous montrent que ce n’est pas si simple. Certes, la technologie permet d’accomplir un grand nombre de choses. Mais elle a des effets qui ne sont pas prévus et qui nous reviennent dessus. Notre maîtrise demeure limitée. Cela se passe dans beaucoup de domaines. On pourrait citer de nombreux phénomènes, par exemple les perturbateurs endocriniens.
Pourquoi l’attention se fixe-t-elle tellement sur la question du réchauffement climatique ? Chez les êtres humains, en particulier depuis le XIXe siècle et le rejet de Dieu, on remarque une culpabilité profonde. Les châtiments divins venaient du ciel. Le réchauffement climatique serait une figure du châtiment qui va toucher la culpabilité de l’humanité.1

Louis Daufresne- Alors nous avons affaire à une croyance ?

Olivier Rey- Je ne parle pas du réchauffement climatique, mais de la sensibilité à la question du réchauffement climatique.
On peut évoquer par exemple la question des perturbateurs endocriniens, qui est extrêmement importante. Dans un certain nombre de pays, de plus en plus de couples ne réussissent pas à avoir d’enfant par les voies naturelles.
Ces questions sont fondamentales, mais génèrent une réaction modérée. Sur le réchauffement climatique, on fait un GIEC, la mobilisation est importante. Je pense que le ressort de type religieux explique l’ampleur que prend le sujet.
Rappelons-nous du discours de l’Insensé : « Dieu est mort, c’est nous qui l’avons tué ». L’humanité était devenue maîtresse d’elle-même, grâce à la rationalité, la science, la technologie. Elle découvre aujourd’hui que la situation est plus compliquée. Ce ressenti a tendance à se fixer sur la question climatique, qui répond aussi très bien à l’imaginaire humain : les châtiments viennent du ciel.

QUESTION – QUID DE L’EFFET DE SERRE ?

Si on suit le modèle du GIEC, selon lequel l’activité humaine est la cause du réchauffement climatique, on devrait voir que les émissions de gaz carbonique de l’homme sont majoritaires et significatives. Pouvez-vous nous donner des ordres de grandeur de la masse de gaz carbonique dans l’atmosphère, des débits des sources diverses de gaz carbonique ?

Stanislas de Larminat -Le gaz carbonique représente 0,03 % de l’atmosphère : c’est epsilon par rapport à la vapeur d’eau, à l’oxygène ou à l’azote. Mais ça ne signifie pas que son influence serait négligeable pour autant. Si on passe de 0,03 % à 0,04 %, ce phénomène mérite d’être quantifié.
Je crois que nous avons besoin de modèles — à condition qu’ils soient bien calibrés.
L’effet de serre est un phénomène complexe à appréhender. Les rayons infrarouges sont absorbés par des gaz à effet de serre. De petites molécules, ayant peu d’atomes, absorbent de la chaleur : CO2, H2O, CH4. Quand un gaz a absorbé un rayon infrarouge, il ré-émet lui-même des infrarouges. L’effet de serre n’est pas ce que l’on dessine dans toutes les classes de secondaire, ni même dans certaines classes préparatoires voire des écoles d’ingénieurs. Ce n’est pas une serre avec une couche de verre très haute et qui bloquerait les émissions de gaz carbonique. L’effet se produit dès l’émission. On trouve du gaz carbonique dans cette pièce. Si la table se réchauffe, il va immédiatement y avoir un effet de serre. Petit à petit, ce rayonnement se diffuse dans toutes les directions, y compris en retournant sur la terre.
La zone des vents alizés est la région la plus chaude de la Terre, où se produit l’effet de serre le plus important. C’est là que la chaleur devrait se bloquer le plus. Mais non seulement ces vents vont d’est en ouest, mais de plus ils partent en altitude. Là où il fait le plus chaud, les vents expédient la chaleur en altitude, là on trouve moins de gaz carbonique. En conséquence, cet effet de serre, qui existe à toutes les altitudes, entraîne un échappement.
Sur les vidéos d’émissions infrarouges, filmées par satellite, on voit que la Terre émet de grandes quantités d’infrarouges [9].
L’effet de serre n’a pas bloqué la chaleur. Au contraire, il a contribué, dans les zones de haute altitude, à refroidir la terre en permettant, grâce en particulier aux alizés, de faire ré-échapper les rayons infrarouges. La Terre émet des infrarouges. Ils ne sont pas bloqués.
L’effet de serre existe. Il est indispensable de quantifier cet effet, par rapport à d’autres effets, et en particulier l’effet magnétique. Je connais des modélisateurs qui le font. Ils arrivent à la conclusion que l’influence majeure est probablement celle du Soleil, et que le gaz carbonique a un effet marginal.

Louis Daufresne- N’est-ce pas la vapeur d’eau qui a une plus grande importance sur l’effet de serre par rapport au gaz carbonique ?

Olivier Rey- La vapeur d’eau a une grande importance. De nombreux autres facteurs que le gaz carbonique ont de l’importance. Mais sur la vapeur d’eau, nous n’avons aucune influence. Nous nous intéressons aux facteurs qui varient. Depuis la révolution industrielle, ce qui a le plus varié dans la composition de l’atmosphère, ce sont les concentrations de certains gaz, émis par les combustibles fossiles qui ont brûlé. En plus du gaz carbonique, le méthane joue un rôle assez important. D’autres paramètres entrent dans l’effet de serre, mais sont complètement indépendants des activités humaines.
« Effet de serre » est un terme malheureux, puisque ce n’est pas ce phénomène qui fait qu’il fait chaud dans une serre. Dans une serre, la paroi sépare l’intérieur de l’extérieur. Les rayons qui entrent chauffent le sol et l’air. L’air devrait se déplacer et partir, selon le principe du chauffage par convexion. Mais il reste piégé à l’intérieur de la serre.
Dans l’effet de serre, il y a une réabsorption des rayons qui arrivent sur la Terre et qui sont réémis vers l’espace. Une partie de ce rayonnement est absorbée par les molécules de gaz « à effet de serre », qui absorbent cette énergie et la ré-émettent : une partie repart dans l’espace, une autre partie retourne vers la terre, etc. 
On devrait utiliser un autre terme, mais l’expression s’est imposée comme telle.

Le réchauffement à venir

Louis Daufresne- Comment peut-on être sûr d’un réchauffement climatique dans les années qui viennent ?

Olivier Rey- Les modèles eux-mêmes ne garantissent rien. Les modèles les plus élaborés dont on dispose aujourd’hui, quand on les fait tourner sur ordinateur, donnent des prédictions. La valeur de ces prédictions dépend du crédit qu’on accorde aux modèles. Ce crédit qu’on accorde aux modèles est tout relatif.

QUESTION – VA-T-ON VERS UNE PLANETE INVIVABLE ?

Louis Daufresne- Pensez-vous que la planète va devenir invivable ?

Olivier Rey- Toutes les prédictions de température en 2050, 2080 ou 2100 sont relatives au modèle. Je ne sais pas tellement quel crédit accorder aux modèles. On fait ce qu’on peut. Vis-à-vis de la question climatique, nous sommes limités.

Stanislas de Larminat- Je suis très optimiste. Imaginons que les modalisateurs auxquels je me réfère se trompent et que l’activité humaine soit responsable de 20 % ou 40 % du réchauffement. Arrondissons à un degré celsius du fait du Soleil et un demi-degré du fait du gaz carbonique. Il se trouve que l’activité solaire depuis deux cents ans n’a jamais été aussi haute. On peut faire l’hypothèse que cette activité solaire va redescendre, selon les cycles des derniers siècles. Si j’ajoute l’effet de serre, nous aurons une température stable.
J’en reviens ici à la proportionnalité des décisions que nous prenons. Je considère que les modèles de GIEC ne sont pas capables de prédire l’avenir. Ils n’ont pas la légitimité parce qu’ils ne sont pas capables de reconstituer le passé. Par ailleurs, je pense que la probabilité que l’effet solaire diminue est assez importante. Tous les milliers de milliards qu’on est en train de mettre sur la table sont disproportionnés.
Ne parlons pas de l’effet sur chacun des hommes que nous sommes, où on nous habitue à ne plus juger par nous-mêmes. Je pense que toutes ces normes deviennent une addiction et que notre réaction est disproportionnée.

QUESTION – QUELS COMPORTEMENTS ADOPTER ?

Louis Daufresne- Ce point de vue vous amène-t-il à considérer qu’il n’y a pas de responsabilité personnelle dans ce domaine ? Ce sujet est-il en dehors du champ de votre conscience ? Refusez-vous d’en faire une priorité dans votre comportement ?
Il y a deux écoles. La première considère que nous devons changer nos habitudes. L’autre affirme qu’il n’y a pas de raison de ne pas continuer comme avant.

Stanislas de Larminat- Fabrice Hadjadj définit la culture de mort comme « ce qui fait que j’oublie que je suis mortel ». Quand je consomme de façon débridée, j’oublie que je suis mortel. Des surconsommations et un déficit de sobriété sont des cultures de mort. Mais ce n’est pas une culture de mort pour la planète.
Je suis favorable à la sobriété, mais au nom d’une vertu et non pas d’une précaution. Il est vital pour l’homme de développer une véritable frugalité. Mais ce n’est pas au nom de cette vertu que je vais sauver la planète.

Olivier Rey- Je me sens totalement en accord avec ce propos. J’ai beaucoup travaillé sur les œuvres de d’Ivan Illich. Il est un peu oublié aujourd’hui, mais il a eu son heure de gloire dans les années 1960 et 1970. Le malheureux, au début des années 1980, a écrit un livre qui montrait que beaucoup des maux contemporains venaient de ce qu’on avait perdu l’idée de la différence entre les hommes et les femmes. Cet essai a coulé son audience. Il est mort en 2002, assez oublié. Le pauvre, il n’avait encore rien vu. Dans La Convivialité, il pense la question des effets de seuil. En dessous de certains seuils de puissance, la technique sert le développement humain. Quand on dépasse ces seuils, elle se met à lui nuire. L’outil est au service de l’homme, alors que la grosse machine enrôle l’homme à son service. 
Heidegger disait qu’aujourd’hui la puissance était seule à être puissante, que l’homme devenait « fonctionnaire de la technique ».
Sans entrer en détail dans toutes ces considérations, on peut garder la question de la mesure.
Dans les années 1960 et 1970, ont commençait déjà à parler beaucoup d’écologie. Illich était assez révulsé par ce discours écologiste de la responsabilité vis-à-vis de « la planète ». En grec, planète signifie « astre errant ». Dans le système de Ptolémée, la terre est au centre et les autres astres qui tournent autour. On les appelle « planètes » parce que ce sont des « astres errants ».
Le système de Copernic a placé le Soleil au centre et a fait de la Terre un astre parmi d’autres, qui tourne autour du Soleil. C’est alors que la Terre est devenue une « planète ». Parler de la Terre comme « planète », c’est se placer à l’extérieur du système solaire. On regarde le système solaire de l’extérieur et on voit des planètes qui tournent autour, dont la Terre. Ivan Illich dit : « Je n’habite pas “une planète”, j’habite la Terre. »
Tout le discours autour de « la planète » est très problématique. Des gens qui prétendent se soucier de cette « planète », en l’appelant ainsi, précisément, s’en déracinent. C’est comme s’ils étaient des gestionnaires extraterrestres. C’est assez curieux. Illich disait : Je ne suis pas responsable de “la planète”. J’habite la Terre. C’est la vertu qui doit dicter mon comportement, et pas la responsabilité vis-à-vis d’une « planète ». C’est exactement ce que vous disiez.
Chaque individu humain se retrouve en charge d’une responsabilité monstrueuse. Ce n’est pas du tout à notre échelle. En revanche, on est responsable du fait de se comporter vertueusement. Un certain type de consommation s’est développé au cours du XXe siècle, qui n’est pas vertueux. C’est au nom de ce manque de vertu que nous devons lutter contre cette consommation débridée, et pas au nom d’une responsabilité que nous aurions vis-à-vis de quelque chose qui nous dépasse.

1:53:03- Louis Daufresne- Merci à tous les deux merci i

[Applaudissements]

 


[1] Giec-IPCC “Most intercomparison studies on RF of greenhouse gases are for clear-sky” IPCC, WG1 Fifth Assestment Report,  § 8.3.1, p. 8-18/124, (ligne 17); “The introduction of clouds would greatly complicate the targets of research”  ibid., (ligne 18).
www.climatechange2013.org/images/report/WG1AR5_SOD_Ch08_All_Final.pdf (consulté le 28/08/19)

[2] «22 of 23 groups reported adjusting model parameters to achive desired properties such as radiation balance at the top of the atmosphere”, source: Frédéric Hourdin, The Art and Science of Climate Model Tuning  (L’art et la science du réglage des modèles climatiques), American Meteorological Society , 9 juillet 2016, https://journals.ametsoc.org/doi/full/10.1175/BAMS-D-15-00135.1 , (consulté le 18/08/19)

[3] Giec-Ipcc, AR5, Working Group 1, The Physical Science Basis, Report Graphics- Technical Summary- Box TS.5, fig 1-b,  http://www.climatechange2013.org/report/reports-graphic/ts-graphics/ (consulté le 28/08/19).

[4] Cité dans le protocole de Montréal, sur les substances qui appauvrissent la couche d'ozone.- rapport d'évaluation technique et économique de mai 2013 - volume 3 - Décision XXIV / 8 Rapport du Groupe de travail - Termes de référence:  
"In United Nations practice, the concept of “consensus” is understood to mean the practice of adoption of resolutions or decisions by general agreement without resort to voting in the absence of any formal objection that would stand in the way of a decision being declared adopted in that manner. Thus, in the event that consensus or general agreement is achieved, the resolutions and decisions of United Nations meetings and conferences have been adopted without a vote. In this connection, it should be noted that the expressions “without a vote”, “by consensus” and “by general agreement” are, in the practice of the United Nations, synonymous and therefore interchangeable"  (référence à une correspondance de juin 2002, M. Hans Corell, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Conseiller juridique de l'Organisation des Nations Unies) - http://conf.montreal-protocol.org/meeting/oewg/oewg-33/presession/Background%20Documents%20are%20available%20in%20English%20only/TEAP-DecisionXXIV-8-May2013.doc

[5] Communiqué de presse du GIEC n° 2015/19 https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/2018/04/151006_election_of_new_chair_fr.pdf

[6] Robert's Rules of Order Newly Revised, (Wikipedia et
http://www.larminat.fr/les2ailes/index.php?option=com_content&view=article&id=49:consensus-vous-avez-dit-consensus-2&catid=53&Itemid=110#_ftn6)

[6] « On peut dire avec un degré de confiance élevé que des inondations plus importantes que celles observées depuis 1900 se sont produites au cours des cinq derniers siècles dans le nord et le centre de l’Europe, dans l’ouest de la région méditerranéenne et dans l’est de l’Asie ». (Rapport GIEC - AR5 § 2.6.2 et 5.5.5)

[7] « La confiance reste faible quant aux changements d’activités sur le long terme des cyclones tropicaux".... "les chiffres actuels n’indiquent pas de tendance significative dans la fréquence des cyclones tropicaux par rapport au passé" (« Rapport pour les décideurs » du Giec p. 2/60)

[8] Les modèles climatiques sont incapables de prévoir les événements extrêmes à cause du manque de résolution spatiale et temporelle:
- "l'incertitude de la réponse des schémas de circulation à grande échelle aux forçages externes peut entraîner une incertitude dans la réponse des extrêmes aux forçages externes" (https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/chapter/chapter-11/ § 11.1.5)
- "En général, il est plus difficile de déterminer les changements à long terme pour les événements d'une durée temporelle assez importante, tels que les " mégapériodes " qui durent plusieurs années ou plus (par exemple, Ault et al., 2014), en raison des limites de la taille de l'échantillon d'observation" (ibid § 11.2.2).

[9] https://www.youtube.com/watch?v=f7QttjGu628