Au cours d’une interview le 6 mars 2023 à l’émission « Terres de mission », Stanislas de Larminat a évoqué sa retraite itinérante de 3200 km à pied au cours de laquelle il rencontré une bonne vingtaine d'évêques ou archevêques sur la route pour leur parler de pastorale écologique.
Son ouvrage : « Entretiens avec Monseigneur » relate les messages qu’il a développé auprès d’eux. Même s’il ne partage pas les écrits scientifiques rédigés par l’entourage du Pape, Stanislas de Larminat a rappelé sa fidélité à la personne du Pape.
Il a réfléchi à « l'éternelle question, depuis des siècles, de la lutte de la tiare et du sceptre, donc de l'empereur et du pape. Ce n'est pas d'aujourd'hui, mais, à l'époque de l'empire Romain germanique, comment s'appelait-il, de Grégoire 7 et d’Henri IV de Germanie, qui se battaient, et ça se terminait à Canossa. Bon, et puis plus récemment, vous avez quand même toute l'affaire de Pie XII et d’Hitler… », a-t-il dit, ajoutant : « Est-ce que l'ONU n'est pas un nouvel empire ? Quelles sont les contraintes qui pèsent sur le Pape ? Je n'en sais rien ! Et je pense qu'il faut beaucoup de prudence et de soumission ».

Vidéo : https://youtu.be/QIJOY2MCI5M

Transcription : « Les2ailes.com »

 Guillaume de Thieulloy
Et nous revenons sur le plateau de terre de mission et j'ai le plaisir d'accueillir de nouveau Stanislas de Larminat qui était déjà venu sur ce plateau. Stanislas de Larminat, d’abord Bonjour ; vous venez de publier des « Entretiens avec Monseigneur », Monseigneur étant le nom générique de tous les évêques que vous avez rencontrés au cours d'un périple invraisemblable. En fait, c'est une idée loufoque qui vous est venue ! Racontez un peu comment ? Comment est né ce projet ?

Stanislas de Larminat
Je dirais que ça fait 10 ans que je réfléchis à l’écologie et j'ai vu un jour 200 laïcs accompagner les évêques à lourdes pour réfléchir à la pastorale écologique. Je me suis dit que si je voulais un peu bousculer les lignes, il fallait que je me bouscule moi-même et, à partir de ce jour-là, je suis parti à pied et j'ai fait le tour des archevêchés et des évêchés qui étaient sur la route entre 2 archevêchés. Donc j'ai fait 3200 km à pied et ai rencontré une bonne vingtaine d'évêques ou archevêques sur la route pour leur parler de pastorale écologique.

Guillaume de Thieulloy
Et alors, comment est-ce que vous êtes accueillis quand vous vous pointez dans un archevêché ?

Stanislas de Larminat
Eh bien, il y a un peu d'étonnement : Quelqu'un qui a 75 ans, et 77 à la fin, qui se déplace pour aller les rencontrer à pied ! Mais ce qui m'a surtout intéressé, c'était le message que j'essayais de leur passer. Si je voulais les résumer, c’était de dire « Vous n'avez pas à prendre parti sur les questions scientifiques ». D'ailleurs, c'est dans le Concile ; c’est marqué : « les laïcs n'ont pas à attendre de leurs pasteurs qu’ils aient une réponse à toutes les questions, même graves ». Et même si l'écologie est une question grave, les pasteurs n'ont pas à prendre parti. C'est dans Laudato si, au paragraphe 188, le pape le dit : « J'appelle au débat et l'Église n'a pas à prendre parti sur les questions scientifiques ».
Donc j'aurais envie leur de dire, « Taisez-vous ». Mais d'un autre côté, le Concile dit bien l'inverse, c'est que l'Église a « la mission de discerner les signes des temps ». Alors peut être que l'écologie en est un ! « … et de leur apporter une réponse éternelle ». Alors est ce que le GIEC est une réponse éternelle à cette question ? C'est une autre chose ! Donc je leur disais « Eh bien, la seule solution pour se taire en tout en évoquant le problème, c'est d'organiser des débats contradictoires ». Et puisque le pape dans Laudato si dit : « J’appelle à un débat honnête et transparent », je suis en complètement en ligne avec Laudato si

Guillaume de Thieulloy
Mais, évidemment que vos interlocuteurs comprenaient assez vite que vous n’étiez pas tout à fait alignés sur le GIEC.

Stanislas de Larminat
Tout à fait, mais je me sens très à l'aise dans Laudato si, grâce justement à ces phrases, à son appel au dialogue. Et puis il y a quand même également beaucoup de choses dans Laudato si qui sont très étonnantes :  l'appel à la sobriété, qui n'est pas une « sobriété par précaution », mais à une « sobriété vertu »…

Guillaume de Thieulloy
Oui, parce qu’effectivement, dans Laudato si, il y a des logiques qui sont réellement éternelles, qui sont de l'ordre de l'anthropologie. L’ascèse, c'est un appel qui ne date pas du 21e siècle. On est en carême, ça devrait parler aux chrétiens. Donc, ce n’est pas du tout absurde d'utiliser l’écologie pour refaire surgir des anciennes vertus. Ce qui est un peu problématique, c'est quand même quand on quand on dit que l'homme est devenu un parasite de la création ou des choses comme ça.

Stanislas de Larminat
Et puis oui : je vais vous dire un peu que, quand on marche 3000 km comme ça, on lit les textes de l'Évangile du jour, on médite et j'ai pas mal médité sur ce thème, qui d'ailleurs -et c’est une critique que je ne fais pas, une critique qui est faite sur Laudato si : « qu'est-ce que le pape est allé se fourvoyer dans cette affaire-là ? », et en y réfléchissant, je me suis posé, la question suivante qui est l'éternelle question depuis des siècles, de la lutte de la tiare et du sceptre,  donc de l'empereur et du pape. Ce n'est pas d'aujourd'hui, mais, à l'époque de l'empire Romain germanique, comment s'appelait-il, de Grégoire 7 et d’Henri IV de Germanie, qui se battaient, et ça se terminait à Canossa. Bon, et puis plus récemment, vous avez quand même toute l'affaire de Pie XII et d’Hitler… Même si, là, on a beaucoup jasé là-dessus, mais enfin quand même-

Guillaume de Thieulloy
…Il y a la résistance spirituelle en face du pouvoir temporel. …

Stanislas de Larminat
… Pie XII a dit beaucoup de choses ; Il faut voir, que là aussi, il y avait une lutte à mort : Hitler, en tous les cas les nazis, avaient dit que, « après le communisme et le judaïsme et leur défaite, il y aurait le dernier ennemi à abattre, ce serait l'Église ». Et, aujourd'hui, je me pose quand même une question ; Je vous la livre et à tous les auditeurs : Est-ce que l'ONU n'est pas un nouvel empire ? Quelles sont les contraintes qui pèsent sur le Pape ? Je n'en sais rien ! Et je pense qu'il faut beaucoup de prudence et de soumission. Parce que, quand on voit le premier directeur de l'Unesco plaider pour l'eugénisme, quand on voit que le Conseil d'État, quand il en parle du diagnostic prénatal qui éradique quand même beaucoup de trisomiques, dire qu’il y a un risque de dérive eugénique, quand on voit le mouvement européen pour l'éthique dire qu'il faut recommander l'euthanasie pour réduire le nombre d'Alzheimer ! Attendez ! Tout cela, ce n'est pas européen, ce n'est pas français, c'est mondial ! Occidental on va dire. Et l'ONU est derrière !
Comme par hasard, je m'aperçois que Monseigneur Sorondo, qui avait la charge de la négociation et de la rédaction de Laudato si, a dit : « on a négocié, on a discuté pour que, dans les objectifs du développement durable, du comment faire pour réduire l'esclavage et toutes ces questions-là ». Alors on peut ne pas être d'accord avec des négociations et de la manière dont elles ont été menées. Mais qu'est-ce qui pesait sur le Pape ? Moi je pense qu'il faut beaucoup de révérence. On peut critiquer, mais il faut beaucoup de révérence et je suis fidèle à l'Église jusqu'au bout, même si je ne partage pas les idées scientifiques qui ont été abordés.

Guillaume de Thieulloy
Mais alors comment vos interlocuteurs, donc les évêques que vous avez rencontrés ou les collaborateurs d'évêques que vous avez rencontrés ? Ils voient arriver déjà une personne d'âge mûr qui vient chez eux à pied. C'est déjà loufoque ! Et puis vous venez leur dire : « écoutez, il y a quand même 2-3 problèmes dans la prise de position scientifique quasi-officielle de l'Église ». Est-ce est ce que leur premier mouvement, c'est de dire « Dehors ! » ? Est-ce que leur premier mouvement c'est de dire : « Expliquez-nous ce que vous voulez dire » ? Comment ça marche ce genre de discussion ?

Stanislas de Larminat
Eh bien, oui :  à chaque fois ça dure 1 h, quelquefois un peu plus avec les laïcs qui les entourent. Je dirais que, d'une manière générale, à part quelques cas…. - D'ailleurs, vous voyez que le livre est intitulé « Monseigneur au singulier », donc je ne donnerai aucun nom- …

Guillaume de Thieulloy
Non, ça me paraît très sage et en l'occurrence ça ne nous intéresse pas. Ce qui nous intéresse, c’est la discussion

Stanislas de Larminat
Mais, d'une manière générale, à part quelques cas, l'accueil est curieux, l'accueil est à l'écoute, à l'étonnement, quelquefois, et à la prise de conscience que… Il y en a qui m'ont dit, « il est bien difficile d'être prophète ».
Bon! Mon opinion, mais ce n'est pas eux qui me l'ont dit, c'est que le l'Église aujourd'hui a beaucoup de difficultés. Elle a déjà des divergences qui éclatent, au-devant des médias, sur les questions de politique de famille ; ne parlons pas des problèmes de mœurs et de pédophilie. Je pense que l'Église n’a pas du tout envie de se lancer dans un 3ème front, surtout un front qui serait public… Donc, c'est de l'écoute ; je ne sais pas ce qu'il en adviendra. J'ai semé et je suis en paix.

Guillaume de Thieulloy
Eh bien, écoutez, j'espère que vos interlocuteurs feront germer ces semences. En tout cas, c'est vraiment une démarche que je trouve passionnante à tous égards, une démarche de pèleriner jusqu'aux évêques pour leur apporter une voix contradictoire, c’est déjà très beau, mais, par ailleurs, l'entretien pacifique est quand même au cœur nucléaire de la civilisation chrétienne occidentale en particulier, je trouve que c'est très utile et c'est très apaisant aussi de se dire qu’on peut être dans la même église et débattre ensemble.

Merci cher Stanislas de Larminat. « Entretiens avec Monseigneur » ; c'est paru aux éditions « Peuple libre » et c'est un livre que vous devriez absolument acheter, chers amis téléspectateurs. Merci et donc ainsi s'achève notre émission la semaine prochaine, nous nous retrouvons pour le dimanche des rameaux et d'ici là que Dieu nous garde.