Un cinquième « Sommet de la Terre » doit se tenir à Rio de Janeiro du 20 au 22 juin 2012. Les deux premiers s’étaient tenus  à Stockholm (Suède) en 1972, puis à Nairobi (Kenya) en 1982. Le plus célèbre a été le troisième à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992, et c’est pour commémorer le 20ème anniversaire de ce troisième sommet que les Nations Unies organisent « Rio+20 », après le 10ème anniversaire qui s’était déroulé à Johannesburg (Afrique du Sud) en 2002. L’ONU a retenu des thèmes assez proches de ceux du millénaire « le millenium » . Malheureusement, la sémantique reste confuse, et chacun y trouve ce qu’il veut. Chacun fait la course aux déclarations les plus « humanistes », mais on est parfois bien loin du développement intégral de la personne humaine. Ainsi les thèmes louables retenus par l’ONU :
-    « l’économie verte dans le cadre du développement durable ». On risque de parler encore de cette cause humaine du réchauffement climatique bien qu’il n’y ait pas consensus sur le sujet
-  « l'éradication de la pauvreté », qui passe bien sûr par l’éducation et la santé. Mais on risque de les focaliser sur l’éducation des femmes à maîtriser leur fécondité et la « santé reproductive » qui cache la promotion de l’avortement comme un droit à imposer dans tous les pays
-  « le cadre institutionnel du développement durable ». Il s’agira de la gouvernance mondiale que l’ONU cherche à imposer en oubliant le principe de subsidiarité.
Ces risques de dérives ne sont pas une obsession de l’auteur de ce commentaire.
Nous en voulons pour preuve les prises de positions de deux organismes qui prennent des positions très claires sur « Rio+20 »
- La première, l’Académie des Sciences, met la terre en priorité, quitte à prendre des mesures portant atteinte à la dignité de l’homme :
- La seconde, le Vatican, place l’homme comme une priorité qui, si on respecte sa dignité, permet par conséquence et non comme moyen, de faire alliance avec la planète.
Quel sont les propos tenus ?

Commentaire : « les2ailes.com »

La position prise par l’IAP, Réseau mondial de 105 académies des sciences

L'IAP, est un  réseau mondial de 105 académies des sciences et ONG scientifique, de partout dans le monde, y compris des pays aussi divers que l'Afrique du Sud, les Etats-Unis, la Lettonie, le Japon, le Nicaragua, la Bolivie, le Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande[1]. Il ont publié un communiqué le 14 juin 2012.
On notera que l’académie pontificale des sciences fait partie de ce réseau. A-t-il adhéré au communiqué général ? On peut imaginer que non, et se dire que c’est la divergence de point de vue qui a amené le Vatican à se désolidariser en produisant son propre communiqué.

Que dit Le CIA ? Il appelle à  une action globale coordonnée sur la population et sur la consommation dans ce rapport adressé aux chefs d'Etat. La population et la consommation sont les deux facteurs-clef dont personne ne parle, assure le rapport, sans compter, dit le rapport, que: « la croissance démographique rapide peut être un obstacle pour des niveaux de vie s'améliorant dans des pays pauvres, à l'élimination de la pauvreté et à la réduction de l'inégalité de genre ».
Le rapport propose donc que des mesures soient prises, « dont :
— Prendre en compte la population et la consommation dans tout plan politique, y compris ceux relatifs à la réduction de la pauvreté et au développement économique, la gouvernance globale, l'éducation, la santé, l'égalité de genre, la biodiversité et l'environnement.
— Encourager des stratégies de développement qui aident à réduire la croissance démographique, en particulier celles qui promeuvent l'éducation des femmes et des filles.
S’assurer que chacun a l’accès à la santé reproductive intégrale et aux programmes de planning familial pour tous. Cette question requiert des ressources supplémentaires substantielles  et une attention politique de la part des gouvernement et des donateurs internationaux.
— Développer des politiques qui améliorent la qualité de vie des personnes plus âgées et créer de nouvelles possibilités pour qu'elles puissent continuer d'apporter leur contribution à la société »[2].

Le président du groupe de travail du réseau des Académies (IAP), Charles Godfrey, membre de la Royal Society britannique, a déclaré à la presse, à ce propos : « Pendant trop longtemps, la population et la consommation ont été écartées du débat en raison de leur caractère sensible sur le plan politique et éthique. Ce sont des questions qui touchent aussi bien les nations développées que celles en voie de développement, et nous devons en prendre la responsabilité ensemble », a-t-il déclaré.

Est clairement visé le planning familial qu'il s'agit de promouvoir politiquement : « Il faut actionner les leviers qui déterminent la taille des familles. A la base, vous ne pouvez pas sauver l'environnement sans une politique et des programmes de santé reproductive », a commenté Lori Hunter, une démographe déjà présente à Rio[3].
Comme nous le disions en introduction, la dignité de l’homme n’est pas la priorité.

La position prise par le VATICAN

 

La mission permanente d’observation du Saint-Siège auprès de L’ONU a produit le 15 juin un « document dans le cadre de la préparation de la conférence internationale de Rio+20 »dans lequel il précise sa position.
Nous reprenons ici le résumé fait par l’agence Zenit : « L’être humain doit retrouver son alliance avec la nature, qui est son milieu de vie et sur laquelle il a une « responsabilité », déclare le Saint-Siège.

Il met notamment en lumière des principes sur lesquels fonder un nouveau mode de développement durable, et les enjeux de la subsidiarité et de l’économie verte.
En mettant l’accent sur « la dignité humaine des individus et des peuples », le Saint-Siège, rappelle que les hommes « ne peuvent être réduits à des problèmes “techniques” » et que si le processus de développement est traité « seulement par des solutions techniques », il lui manque une « direction éthique ».
« Les êtres humains, poursuit-il, sont premiers : la personne humaine est au centre du développement durable. Cela doit donc conduire les Etats à « réfléchir ensemble sur l’avenir de la planète à court et moyen terme », et à reconnaître leur « responsabilité » pour « la vie de chaque personne ».
Pour le Saint-Siège, « mettre le bien-être de l’être humain au centre de la préoccupation pour le développement est la façon la plus sûre d’atteindre ce développement et d’aider à protéger la création » et sans cela l’homme risque « une confusion existentielle et la perte du sens de la vie ».
La dignité de la personne humaine, poursuit le texte, est liée « au droit au développement, au droit à un environnement sain et au droit à la paix », c’est-à-dire que « les individus, la société et l’environnement » sont inséparables et exigent « un sens plus fort de la responsabilité de chaque être humain pour lui-même, pour les autres, pour la création et, enfin, devant Dieu ».
Cette responsabilité exige une « analyse attentive de l’impact et des conséquences des actions » de chacun, avec un « souci particulier des pauvres et des générations futures ».

Les « priorités politiques et économiques », affirme le Saint-Siège, sont aujourd’hui d’adopter et de promouvoir une façon de vivre qui « respecte la dignité de chaque personne humaine », tout en soutenant « la recherche et l’utilisation de sources d’énergies et de technologies capables de sauvegarder le patrimoine de la création sans être dangereuses pour les êtres humains ».
En ce sens, fait-il observer, « l’approche de la nature doit être revue », car la nature est « le cadre où les êtres humains naissent et interagissent: elle est leur “chez-soi” ». Il n’y a pas de « conflit » entre les êtres humains et leur environnement, insiste-t-il, mais plutôt une « alliance stable » où l’environnement « conditionne la vie et le développement des êtres humains », qui en retour « perfectionnent et ennoblissent l’environnement par leur travail créatif, productif et responsable ».
Cette alliance doit être renforcée, notamment par « le respect de la dignité des êtres humains dès leur conception ». Il invite donc à découvrir « un art de vivre ensemble, qui respecte cette alliance entre les êtres humains et la nature sans laquelle la famille humaine risque de s’éteindre ». Pour cela, avertit le Saint-Siège, la réflexion « ne doit pas être brouillée par une politique partisane aveugle, des intérêts économiques ou idéologiques qui mettraient des intérêts particuliers au-dessus de la solidarité ».
Le Saint-Siège appelle à « trouver une façon de combiner le savoir-faire technique avec une solide approche éthique fondée sur la dignité de la personne humaine ».
« Une subsidiarité juste », estime le Saint-Siège par ailleurs, rend les pouvoirs publics capables « d'agir efficacement pour l’amélioration de la vie de chaque personne, la protection des ressources et la promotion du bien commun ».
Cependant, souligne-t-il, ce principe doit être lié à celui de « solidarité », et vice versa. Car sans solidarité il tombe dans la « privatisation sociale », et la solidarité sans subsidiarité tombe dans une « mentalité d'aide sociale qui dégrade ceux qui sont dans le besoin ».
En ce sens, il faut reconnaître le rôle de la famille, où commence « le processus fondamental d’éducation et de croissance ».
Le Saint-Siège affirme également son intérêt pour « l’économie verte » : si elle est « clairement orientée » vers « l’élimination de la pauvreté au niveau local » et « l’identification de nouveaux cadres de consommation et de production », alors elle peut « donner une contribution importante à la cause de la paix et de la solidarité internationale ».
Par ailleurs, le Saint-Siège insiste sur le lien entre « développement durable » et « développement humain intégral » : en plus du bien-être social et matériel, il encourage à considérer aussi les « valeurs spirituelles et éthiques », car « toute décision économique a une conséquence morale ».
A la lumière de tout cela, le Saint-Siège demande d’ancrer le nouveau modèle de développement en discussion à Rio+20, dans les principes suivants, qui sont conditions de véritable développement :
- Responsabilité, y compris dans les modèles de production et de consommation qui doivent « refléter un style de vie approprié »;
- Promotion du bien commun
- Accès aux biens primaires, (nutrition, éducation, sécurité, paix et santé), en sachant que « le droit à la santé découle du droit à la vie », et que l’avortement et contraception étant « gravement opposés à la vie », ils ne peuvent « jamais être des questions de santé ».
- Solidarité universelle capable de reconnaître l’unité de la famille humaine;
- Protection de la création, liée à la solidarité intergénérationnelle;
- Equité intra-générationnelle, liée à la justice sociale;
- Destination universelle non seulement des biens, mais aussi des fruits de l’entreprise humaine.


[1] Parmi les 105 académies, citons entre autres également :
-       Les Académies des arts, des lettres et des sciences du Canada (SRC)
-       US National Academy of Sciences (NAS)
-       Académie des Sciences, Institut de France
-       Conseil international pour la science (CIUS) - France
-       Académie des Sciences de Lisbonne
-       All European Academies (ALLEA) –Pays-Bas
-       Accademia Nazionale dei Lincei- Italie
-       Académie autrichienne des sciences- Autriche
-       Académie allemande des sciences Leopoldina
-       Académie royale danoise des Sciences et des Lettres
-       Suisse Académies des arts et des sciences
-       Académie nationale des sciences d'Ukraine
-       Académie russe des sciences
-       Académie hongroise des sciences
-       Académie des Sciences de l'Afghanistan (ASA)
-       Académie de la Recherche Scientifique et de la technologie. (ASRT) – Egypte
-       Soudanais National Academy of Science (SNAS)
-       'Académie Hassan II des Sciences et Technologies
-       Académie des sciences d'Afrique du Sud (ASSAF)
-       Cameroun Académie des Sciences
-       Nigeria Académie des Sciences
-       Brésilienne Académie des Sciences
-       Académie australienne des sciences
-       Académie des sciences de la République islamique d'Iran
-       Académie israélienne des Sciences et des Lettres
-       Académie turque des sciences
-       Academia Sinica, Taipei, en Chine
-       Académie de la Société royale de Nouvelle-Zélande
-       Conseil scientifique du Japon (CSJ)

[2] Source: « IAP Statement on Population and Consumption”  http://www.interacademies.net/File.aspx?id=19193

[3] Source : Le Guardian – 14 juin 2012