Nicolas Sarkozy a proposé le 18 mars 2012 de « supprimer deux normes anciennes à chaque fois qu'une nouvelle est introduite, afin de limiter l'inflation des règlements qui renchérissent le coût de la vie quotidienne ».
Pourtant, en novembre 2012, une circulaire a interdit les « brulis » ! Cela n’a ému personne. Cela touche pourtant plusieurs millions de personnes qui n’auront ni les budgets, ni le temps nécessaire pour mettre en œuvre les mesures alternatives ! Qu’en est-il ?
Source : Circulaire du 18 novembre 2011 relative à l’interdiction du brûlage à l’air libre des déchets verts[1].
Commentaire "les2ailes.com"
Quelques données chiffrées
La France compte plus de 33,6 millions de résidences[2], dont 56,7 % de logements individuels soit un total de 19 millions de maisons avec jardins.
Contrairement à ce qu’on peut imaginer, ce ne sont pas les plus grandes qui produisent le plus de « déchets verts », dans la mesure où, plus un jardin est de petite dimension, plus son propriétaire se protège de son voisinage avec des haies à tailler, et plus il soigne la qualité de ses tontes en pratiquant le ramassage de l’herbe. A l’inverse, les plus grandes propriétés, dont les arbres et arbustes ne souffrent pas de contrainte d’espaces sont plus rarement taillées et les surfaces en herbe sont tondues en prairies sans ramassage. Au demeurant, le facteur limitant est la capacité physique d’un propriétaire à tailler et soigner lui-même son jardin ce qui est indépendant de la taille. Chacun fait l’expérience que plus son jardin est petit, plus il y passe de temps et « produit » du déchet vert. Les exceptions concernent les rares propriétés disposant de jardiniers.
Quel est le tonnage de déchets verts produit par les parcs et jardins individuels ?
Estimons la surface moyenne d’un jardin, hors surface habitée, à ne serait ce que 1500 m², ce qui est probablement inférieur à la réalité. La surface des parcs et jardins concernés est en effet très variable, et peut aller de plusieurs dizaines d’ha pour les propriétés de type « bourgeois » dans les zones rurales, jusqu’à quelques milliers de m² pour les plus modestes.
Estimons la quantité de « déchet vert produit » à environ 1 kg/100 m², déchet d’entretien courant et d’entretien exceptionnel moyen.
La France des jardins produit donc à peu près 300.000 tonnes de déchets verts.
Imaginons que seulement1/3 soit brûlé, ce qui est probablement une hypothèse basse. Voilà donc 100.000 tonnes qu’il va falloir aller livrer dans des déchèteries avec, dans le meilleur des cas, avec des remorques de 250 kg de charge utiles !
On peut donc estimer à 400.000 trajets ce que la mesure d’interdiction va induire, soit au moins 4 millions de km ! Tout cela contribue-t-il à assainir l’air ? Et on ne parle pas ici d’une extrapolation à toute l’Europe !
Résumé de la circulaire
Le résumé publié en tête de la circulaire déclare qu’il s’agit d’une « application de la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement ». Or que prévoyait cette loi ? Simplement une « communication adéquate sur le sujet du brûlage à l’air libre et une circulaire sur cette pratique ».
En fait de communication, on décide une interdiction ! En fait de pratique, on l’interdit purement et simplement !
Est-ce fondé ?
Le résumé l’affirme de manière péremptoire sans donner la moindre référence des études le prouvant : « le brûlage des déchets verts… nuit à l’environnement et à la santé » !
Le résumé dit également que « le brûlage des déchets verts peut être à l’origine de troubles de voisinages générés par les odeurs et la fumée, …et peut être la cause de la propagation d’incendie ». C’est bien pour cela que les brûlis, dans la plupart des régions étaient interdits
- pendant les WE pour éviter les troubles de voisinages, et
- entre les 1er mai et 1er octobre pour éviter la propagation des incendies.
De telles interdictions nationales manquent totalement de nuance. On pourrait comprendre cette disposition dans des jardins au cœur de villes. Mais est-ce vraiment justifié, y compris dans des villages, où il n’y a que deux à trois brûlis par an ?
Pourtant le résumé de la circulaire dit que « la combustion de biomasse peut représenter localement et selon la saison une source prépondérante dans les niveaux de pollution ». Il indique également que les problèmes sont plus sensibles dans un « fond de vallée par exemple » ou selon la « qualité des combustibles ». C’est sous entendre qu’on aurait pu envisager des particularismes selon les « localités » et les « saisons ».
On nous parle de « particules dont la concentration dans l’air doit rester conforme aux normes ». Mais faudrait-il encore rester sérieux : certaines estimations parlent de milliards de tonnes de poussières fines qui sont émises chaque année par les vents de sables et par la soixantaine de volcans en activité autour de la planète[3]. Les pauvres émissions de particules des brulis sont négligeables ! Ou alors, pourquoi ne pas autoriser, par exemple, que les brulis soient effectués par temps de pluie. C’est parfaitement possible, et cela aurait limité les émissions de poussières et les risques d’incendies !
Par ailleurs, le résumé indique que « le brûlage des déchets verts est une combustion peu performante ». Où est le bilan ? Est-ce vraiment performant d’obliger les détenteurs de jardins ou bien de s’équiper de broyeuses de déchets coûteux ou inefficaces ? Ne va-t-on pas les obliger à faire de nombreux aller et retours avec des remorques dans les déchèteries locales ? Quelle quantité de carburants va être mise en œuvre au niveau national pour approcher les Tout cela a un coût, et, comme d’habitude, c’est auprès des milieux sociaux les plus pauvres que cette norme va peser le plus lourd car ils n’auront ni les moyens de s’équiper, ni celui de sous-traiter le broyage.
On affirme également que « les particules véhiculent des composés cancérigènes comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), dioxines et furanes ». Où sont les études qui prouvent que les cancers correspondants vont diminuer avec l’interdiction ? Quid des émissions de carburants pour transporter les déchets en décharge ? On joue de la « peur » pour justifier une norme nouvelle. Tout cela devient irrespirable ! Comme le disait Benoit XVI, le jour même de l’ouverture du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique : « Il y a une « pollution » tout aussi « dangereuse » que la pollution de l'air : « c'est la pollution de l'esprit »[4].
Certes, il est exact que « la toxicité des substances émises peut être accrue quand sont associés d’autres déchets comme par exemple des plastiques ». Mais n’aurait-il pas suffit, comme le prévoit le grenelle de l’environnement, de faire une « communication adéquate » ? Faut-il vraiment infantiliser les citoyens au point d’interdire une pratique parce qu’ils pourraient manquer de civisme simple. On fait de "la France une grande nurserie" en empêchant ses citoyens d’être responsables ! Pourquoi ne pas interdire l’usage des WC parce que les usagers risquent de les utiliser en y déversant n’importe quoi ?
Tous ces arguments ne sont donc pas fondés ! Mais le résumé en tire une conclusion de cause à effet : « Il convient de rappeler le principe général d’interdiction de brûlage de tels déchets ».
On prétend que « des solutions existent ». On cite : « la valorisation sur place comme le paillage et le compostage, la gestion collective de ces déchets », en oubliant que les usagers n’ont ni les budgets pour s’outiller en machines à broyer, ni le temps de le faire de façon artisanale… Mais qu’importe : il faut suivre le « programme écologiste » ! Il sera le garant de notre bonheur !
Mais le résumé de la circulaire avoue du bout des lèvres qu’il s’agit, en fait, d’une mise en conformité par rapport à une circulaire européenne : « la directive 2008/50/CE concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe » ! Comme si on voulait protéger le sentiment de citoyenneté européenne, on ne met en avant l’argument technocratique qu’au détour d’un résumé.
Concrètement
La circulaire indique que « les déchets biodégradables de jardins et de parcs relèvent de la catégorie des déchets municipaux, entendus comme déchets ménagers et assimilés » (§ Ia). Malheureusement, les communes n’en organisent pas le ramassage !
La circulaire prévoit aussi « la possibilité de déroger à cette règle par le préfet, après avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) » Mais quels sont les préfets qui oseront aller contre cette directive européenne. On est en plein simulacre de subsidiarité !
Que conclure ?
La circulaire prévoit qu’en cas de dérogation, « si brûlage il y a…il soit pratiqué sur des végétaux secs,
- uniquement entre 11h et 15h30 durant les mois de décembre, janvier et février ;
- entre 10h et 16h30, les autres mois de l’année, hors mois déjà interdits vis-à-vis du risque incendie et périodes mobiles d’interdiction ».
Malheureusement, jamais on accordera des dérogations pour 19 millions d’usagers On préfère jouer d’interdictions non fondées !
Et, pour les mêmes motifs, de mesures en mesures injustifiées, on en arrivera à interdire les feux de joie pendant les camps scouts, ou les feux familiaux dans les cheminées à Noël…
Et d’années en années, nos libertés se réduisent au détriment du sens des responsabilités !
[1] http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2011/11/cir_34130.pdf
[2]http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATFPS05201
[3] http://web.stan.free.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=320:l-lattenuation-du-changement-climatique-r-evoque-dans-la-revue-l-science-r-&catid=45:ecologie&Itemid=68
[4] « Hommage place d’Espagne à l’Immaculée Conception » Mardi 8 Décembre 2009 (ZENIT.org)