Dans le débat des OGM, il y a eu un premier mort en France dont personne n’a beaucoup parlé. Ce sera, on l’espère, le dernier car on n’a toujours pas compris quels sont les dangers des OGM. Le 5 aout 2007, un agriculteur du Lot qui cultivait du maïs OGM s’est suicidé. Cela n’a jamais ému grand monde dans l’opinion publique. S’il s’était agi d’un salarié de « la Poste », qu’auraient dit les medias ? Pourtant ce type de drame est toujours un scandale quelque soit la personne qui en est réduit à cet acte de désespoir. Dans le cas en question, le drame avait précédé un « pique-nique » de militants anti-OGM devant son champ. Il n'avait pas, semble-t-il, « supporté l'idée d'être mis en cause par ces militants irresponsables et que ses parcelles puissent être détruites ».
Mais les « manifestations sauvages » se poursuivent sans relâche : fauchages à Colmar en août 2010, et à Feyzin en août 2011, effractions dans une usine Sanders à Saint-Gérand (56) en novembre 2011,…
C’est dans ce contexte que quelques agriculteurs lancent une lettre ouverte aux « faucheurs volontaires ».
Source : lettre ouverte aux faucheurs volontaires du 17.11.2011
Commentaire "les2ailes.com"
Le communiqué met en évidence certains arguments souvent ignorés:
"Nous sommes plusieurs agriculteurs à avoir subi, depuis 2 ans, des destructions (pardon fauchages) de nos champs de tournesol que vous avez menées parfois de nuit selon des méthodes commandos parfaitement rodées. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus accepter votre discours et votre diktat qui relèvent d’une manipulation doublée d’une grande violence. C’est pourquoi, nous prenons la parole.
Vous osez affirmer que nous autres agriculteurs ne connaissons pas les variétés que nous semons. Notre incompétence irait de concert avec notre ignorance ! Laissez-nous vous dire que vous avez une étrange idée des agriculteurs. Nous en avons donc assez que vous nous fassiez la leçon ! En filigrane de vos tracts, nous serions des ignares sujets à manipulation, des rustres sans intelligence, incapables de comprendre ce qu’ils font… Non, messieurs les professeurs, nous sommes capables de nous informer, de comprendre les processus scientifiques des innovations variétales… Nous sommes d’abord des professionnels de l’agriculture et nous revendiquons notre responsabilité à utiliser de nouvelles techniques, lorsque celles-ci sont autorisées. Aussi, votre description des risques que nous ferions courir à la société, par notre méconnaissance (notre inconscience ?), est de la démagogie pure et simple.
Vous nous répétez que les tournesols que vous détruisez sont des OGM. Ces OGM seraient même « cachés ». La belle affaire ! Le grand public doit savoir qu’il n’y a aucun OGM en France. Aucun doute là-dessus. Aussi, le semis de ces tournesols est parfaitement légal. Les semences des variétés de tournesol tolérant à des désherbants que nous utilisons sont inscrites au catalogue officiel des semences et les désherbants sont homologués par les autorités.
Vous n’hésitez pas à faire une lecture partielle et partiale de la législation européenne. Vous brandissez l’article 1 de la réglementation européenne pour imposer votre diktat. Allez, nous vous prenons au mot et suivons votre raisonnement jusqu’au bout : vous devriez exiger l’interdiction immédiate de toutes les variétés issues des biotechnologies que vous considérez comme des OGM, comme par exemple le Triticale (hybride artificiel entre le blé et le seigle) en Europe. Cette plante est une création faite sur des paillasses de laboratoire et issue d’une série de manipulations génétiques pour reprendre votre vocabulaire. Vous devriez faucher dès demain les 350 000 ha de triticale cultivés en France dont une très grande partie en agriculture biologique. Chiche !
Messieurs les Faucheurs, vos actions directes relèvent de la manipulation et nous devons constater que vous êtes particulièrement habiles, notamment pour intoxiquer l’opinion publique. Pourquoi ne dîtes-vous pas que le tournesol est le produit d’une innovation génétique majeure, que vous assimilez à des OGM, réalisée par la recherche publique dans les années 70. Cela a permis de créer des hybrides de tournesols et le développement de la culture de tournesol en France ; aujourd’hui 700 000 ha, moins de 30 000 ha dans les années 70. Autre bonne nouvelle : le tournesol produit sur nos territoires permet d’éviter des importations d’huile de palme notamment. Il permet également de produire des tourteaux, ici, en France, et donc de réduire la dépendance de notre élevage en soja d’Amérique du Sud.
En attendant, sur le terrain et dans nos champs, nous rencontrons un vrai problème de désherbage. Vos «faut qu’on » et « y a qu’à» ne sont que des incantations. De notre côté, nous revendiquons bien au contraire la mise en œuvre d’une panoplie de techniques pour maîtriser les mauvaises herbes : rotation des cultures, désherbants, binage, désherbinage… nous recourons à une panoplie de solutions. Nous affirmons notre capacité à optimiser des itinéraires techniques qui respectent l’environnement selon les conditions locales des cultures et éviter le risque de résistance des mauvaises herbes. Nous n’avons pas attendu les faucheurs volontaires pour appréhender ce risque qui est inhérent à toute pratique agricole, à toutes les cultures et cela depuis de nombreuses années. Même si cet argument vous déplaît, il est important d’expliquer que ces tournesols contribuent à la diminution du risque allergique lié à l’ambroisie (jusqu’à 15 % de la population de personnes allergiques dans certaines régions). Cette plante se développe dans nos cultures. Ces nouveaux tournesols tolérants à de nouveaux désherbants que vous pointez du doigt et que vous cherchez à détruire sont une solution pour réduire ce risque. Avons-nous dit qu’il s’agissait de LA solution miracle ? Non, c’est une solution parmi d’autres. Pourquoi donc s’en passer ? Nous vous laissons le soin d’aller l’expliquer aux personnes allergiques.
En réalité, le saccage de nos cultures n’est qu’un prétexte pour développer votre combat politique et idéologique contre la science. Oui, nous affirmons que l’accroissement des connaissances scientifiques est une bonne chose autant que les innovations technologiques. Nous estimons qu’un débat avec l’ensemble de nos concitoyens sur les technologies d’obtention végétale et leurs utilisations en agriculture est sain. Mais celui-ci ne doit pas se baser uniquement sur des arguments faussement juridiques, scientifiques et économiques que vous avancez. Au nom de vos méthodes d’agit-prop dites de ‘désobéissance civile’, parfaitement résumées dans vos manuels, vous vous octroyez le droit de dire ce qui est bien et ce qui ne l’est pas, de jeter l’opprobre sur des producteurs qui, pourtant, respectent à la lettre la réglementation. Saccages, destructions de champs, acte de vandalisme, vos actions sont violentes. N’en déplaise à vos appels au «débat», «dialogue» et votre esprit «non violent» (quelle blague !).
Vous osez parler de la liberté du paysan qui serait en danger. En réalité et en filigrane de votre tract, il faudrait interdire toute innovation au monde agricole. Il faudrait contrôler les fermes et rééduquer sous la contrainte les agriculteurs à ce qui correspond à votre projet politique. Côté liberté individuelle, on repassera…
En prenant publiquement la parole nous prenons le risque de menaces sur nous-mêmes et nos familles comme cela a malheureusement pu arriver dans le passé. Nous n’avons jamais eu l’intention de répondre à la violence par la violence ce qui aurait correspondu à votre «plan média». Mais il est temps de faire la vérité et de distinguer ce qui relève d’un côté de votre projet politique, et de l’autre, de la réalité technique, agronomique et économique du monde agricole.
Mesdames, Messieurs, les destructeurs volontaires, revenez dans le débat en refusant toute nouvelle destruction.
Michel BEAUCHESNE – Indre et Loire, Fabien LABRUNIE- Indre et Loire, Serge FILIPPI – Haute Garonne, Michel GASSON – Allier, Avec le soutien de Micael BORDAS – maire de la commune sans OGM de Saint Martin d’Août – Drôme"