Une "Veggie Pride" s’est déroulée à Paris le 11 juin 2011 rassemblant des personnes qui refusent de manger les animaux. Leur motivation est surtout une opposition aux abattages qu’ils qualifient de lieux de « barbarie » et aux élevages qu’ils qualifient d’ « esclavage »! Ce discours rejoint indirectement celui des écologistes. De leur côtés, ceux-ci se complaisent dans une doctrine, celle que la consommation de viande contribuerait à polluer la planète ou à empêcher l’autonomie alimentaire des peuples. Bien d’autres maux lui sont reproché. Voyons cela de plus près !

Commentaire "les2ailes.com"

Cette note est provisoire. Elle méritera d'être affinée par de nouvelles recherches documentaires et vérifications chiffrées. Nous publions malgré tout ici des pistes de réflexions.

La consommation de viande contribuerait aux pénuries alimentaires

On met en avant le fait que la production d’une Kcal de viande nécessite la consommation par un bovin de 10 Kcal végétale. L’homme serait ainsi en concurrence avec les bovins puisque nous vivons des périodes de pénuries alimentaires.
Réponse
Toute la production végétale n’est pas digérable par l’homme. L’herbivore est le seul à pouvoir digérer la cellulose. L’homme ne peut consommer que des glucoses simples ou de type amidons –présents dans le grain de blé. Or toute production agricole s’accompagne de production de cellulose –par exemple dans la paille de blé.
Par ailleurs, les éleveurs ont le souci de la productivité et mettent en place des programmes de sélection bovine et de nourriture permettant progressivement de ramener à 4Kcal végétale le ratio de consommation / Kcal de viande produite.

Les bovins seraient producteurs de « gaz à effet de serre »

Les bovins sont des ruminants. Leur digestion dégage du méthane CH4 dont le potentiel de réchauffement climatique serait élevé.
Réponse
Cette affirmation a été diffusée à tord dans un document de la FAO qui a ensuite reconnu son erreur et sa précipitation [1].
En tout état de cause, il s'agit de la question des causes humaines sur le réchauffement. Or, il n’y a pas de consensus sur la question. Il faut se reporter sur cette longue question à notre ouvrage « les contrevérités de l’écologisme ».

La consommation de viande serait inutile dans un régime équilibré

On nous explique que le régime végétarien serait le meilleur.
Réponse :
Sans nous engager dans un long discours diététique, rappelons que l’homme est par nature omnivore.
* La viande contribue aux apports essentiels en fer. Quoiqu'en dise Popeye, les végétaux, épinards ou lentilles, ne contiennent que peu de fer, qui plus est modérément "bio-disponible": notre intestin n'en capte en effet que 2 à 3%, alors qu'il sait en capter 10 fois plus issu des viandes.
* La vitamine A est exclusivement animale. Certes, notre organisme sait en fabriquer à partir du beta-carotène présent dans les végétaux, mais avec un rendement modeste qui diminue, de surcroît avec l'âge. La vitamine D n'existe, elle aussi, que dans le règne animal. Notre peau est capable de l'élaborer, mais, de manière insuffisante et environ 70% de la population française en est déficitaire. Cette vitamine D permet l'absorption intestinale du calcium, garant de notre ossification. Deux des oméga-3, indispensables au maintien de bonnes structures cérébrales, sont d'origine strictement animale. [1 bis]
* Par ailleurs, la viande se consomme principalement pendant des repas, au centre des moments de convivialité, et c’est un facteur de limitation du grignotage et de l’obésité.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu’il n’y a pas de lait sans viande. En France, la consommation de viande bovine est issue, pour 45 %, « vaches réformées ».  C'es dire que, pendant son cycle de production,le bovin produit 10 fois plus de lait qu’il ne produit de viande. Il est courant de s’inquiéter de voir les pays pauvres développer leur consommation de viande. C’est oublier que c’est pour eux le moyen, d’abord, de développer leur consommation de lait, facteur essentiel à leur survie dans de nombreuses régions. C’est oublier également seulement « 3% des paysans disposent d’un tracteur … quelle justice et équité peut-il y avoir entre ceux qui récoltent à la machine et ceux qui le font à la main ? »[2]… ou avec une charrue tirée par une vache.

Il y aurait pénurie de terres arables

On nous explique que les bovins seraient en concurrence avec les hommes et que 30 % des terres cultivables seraient utilisées par le bétail.
Réponse:
De nombreux sols ne permettent pas la production de céréales : les zones de montagne, marécageuses ou dont les sols rocheux empêchent tout labour. Seuls les bovins permettent d’exploiter ces zones peu fertiles.
En France, on estime à 5 millions d’ha les prairies à bovins pour la viande dont la plus grosse partie n’est pas convertible. 
Dans ces conditions, on peut dire que la dent du bovin est en quelque sorte le dernier rempart contre la friche.En cela, l'élevage bovin pose moins de problèmes que la consommation de viande porcine ou de volailles, ces animaux consommant des grains qui entrent plus directement en concurrence avec les céréales à destination humaine.
Dans nos élevages, la plupart de nos paysages de campagnes seraient inaccessibles à quelque promeneur que ce soit ! L'élevage constitue donc un véritable "service écologique". [3]

En ce qui concerne l’occupation de terres arables par des élevages extensifs, il faut voir ce phénomène comme une réserve formidable. Nous pensons en particulier à ces zones d’élevages extensifs en Amérique du Sud. Il y a là des possibilités d’intensification agricoles considérables qui sont intégrées dans le modèle « Agrimonde » qui explique qu’il n’y a pas de problèmes pour nourrir une population de 9 milliards d’habitants en 2050.

L’élevage serait très consommateur d’eau

On nous explique que la production d’un Kg de viande nécessite entre 20 et 70 m3 d’eau.
Réponse
Il s’agit d’un débat d’expert où il faudrait comptabiliser la part d’eau de pluie intégrée dans ces chiffres ; En tout état de cause, nous conseillons au lecteur de relire notre page sur l’eau.

Les prairies viendraient en concurrence avec la forêt

On nous explique que, sans bovin, on pourrait utilement reboiser des prairies pour faire contrepoids à la déforestation mondiale
Réponse
Les prairies stockent autant de carbone que les forêts : 500 Kg/ha/an (source INRA). Une forêt arrivée à maturité pourrait même en produire moins. Ce qui compte c’est la surface verte exposée au soleil. Qu’importe que les feuilles soient exposées en hauteur ou au raz du sol ! La surface exposée est toujours, à peu près, d’un ha/ha ! La Palice aurait pu le dire. En fait, il y a des différences dues aux rayonnements obliques et aux rendements différents de photosynthèse selon les espèces végétales. Mais ces différences ne sont pas dans la proportion du volume d’un ha de forêt avec celle du volume d’un ha de foin.

CONCLUSION

La consommation est un indicateur de développement économique. Les motivations de ceux qui tiennent des discours anti-viande ne sont pas éloignées de ceux qui veulent la décroissance à tout prix. Ces discours attaquent toujours la viande, et jamais le lait et cachent soigneusement le fait que la viande est un sous-produit du lait.
L’écologisme attaque rarement le consommateur –difficile à changer- mais plutôt le citoyen car il vote.
Dans cette affaire, la viande se retrouve au centre de beaucoup de questionnement, car, pour qu'il y ait viande, il faut mettre à mort des animaux, et ceci n'est jamais anodin, d'autant plus qu'il s'agit d'animaux supérieurs. On remonte alors aisément à la souffrance animale et aux questionnements éthiques sur les rapports des hommes aux animaux d'élevage.


[1] La FAO a publié en 2006 un ouvrage "Livestock's long shadow" dont le "résumé exécutif" affirmait que "le secteur de l'élevage est un acteur majeur responsable de 18% des émissions de gaz à effet de serre". Curieusement cette affirmation n'était nulle part dans le corps de l'ouvrage et a été supprimée ensuite du résumé. Cette phrase a enflammé les médias du monde entier et elle est, depuis, reprise à l'envi, marquant profondément les esprits. Par la suite, les auteurs de la FAO ont reconnu leur précipitation et leur erreur. Cet épisode constitue une très belle illustration de la complexité des questions. (Source: "les viandes, miroir des contradictions et des interrogations du monde" de Jean Lossouarn, professeur à AgroParisTech, in "Démeter 2012", p.173)

[1bis] Source: Jean-Marc Bourre, neuro-toxicologue et neuro-Pharmaco-nutritionniste "Manger de la viande est-il mauvais pour la santé?"

[2] Source :  film « Home » de Yann Arthus Bertrand

[3] C'en est au point qu'un rapport de Bernard Chevassus-au-Louis, Inspecteur Général de l'Agriculture, propose pour "les prairies permanentes, lorsqu'elles sont gérées de manière extensive, une valeur de référence de l'ordre de 600 € /ha/an".  Cette rémunération serait de nature à compenser la difficulté constatée à "valoriser l'herbe sur le marché". (Source: "les viandes, miroir des contradictions et des interrogations du monde" de Jean Lossouarn, professeur à AgroParisTech, in "Démeter 2012", p.188-189)