Le monde s'est réuni à l'ONU pour faire le point, 10 ans après sa mise en place, des objectifs de développement pour le millénaire, On se rappelle de la commission Stiglitz mise en place par le Président Sarkozy. Elle avait pour objectif de réfléchir à de nouveaux critères pour mesurer le développement. L’idée était séduisante d’introduire des Indices dit de Développement Humain. L’ONU avait déjà proposé de prendre en compte des indices mesurant également les critères de développement de la formation, de santé, etc…

Mais comment faire confiance à ces indicateurs dès lors qu’ils sont proposés avec comme arrière pensée politique le développement de la philosophie du « Gender » ?

Commentaire de « les2ailes.com »

L’arrière pensée, souvent méconnue par l’opinion publique, est celle consistant, à l’ONU et dans la plupart des ONG, à faire la promotion de l’idéologie du Genre.

1°) L’idéologie du Genre

Rappelons ce qu’est cette idéologie présente dans la plupart des discours sociétaux de l’ONU et maintenant de l’Union Européenne : C’est un thème qui a été adopté à la Conférence de l’ONU de Pékin en 1995.
Selon la théorie du « Gender », les différences entre l’homme et la femme ne seraient pas biologiques et donc inchangeables, mais seraient socialement construites. Elles seraient donc seulement le résultat de facteurs sociaux, économiques, politiques, culturels et religieux, et n’auraient pas de lien avec une différence de nature. Cette « asexualisation » de la relation homme-femme conduirait l'individu à choisir totalement son rôle social et son comportement sexuel.

A quoi conduit la « théorie du genre » ? A partir de cette idéologie, les ONG ont pu imposer deux autres concepts holistiques : la « santé reproductive » et la « santé sexuelle ».

1.1. Santé reproductive

Très concrètement, la « santé reproductive » a deux volets :

  • L'information et l'éducation qui visent à transformer les mentalités, les valeurs culturelles afin de remettre globalement en cause celles des traditions culturelles et religieuses;
  • La proposition de services pratiques qui aident à mettre en œuvre les informations reçues comme la prise en charge culturelle des enfants à l’école et la distribution de préservatifs. En fait changer les mentalités pour transformer les comportements.

Ce concept de « santé reproductive », nécessairement flou, « constate » que la pratique sexuelle dissocie la vie sexuelle de la maternité : il doit dès lors viser à libérer la pratique sexuelle du cadre familial et de la moralité traditionnelle et religieuse. « Néanmoins, pour rendre acceptable ses objectifs cachés et en éviter le rejet, son objectif inclut à la fois : les soins pour le nourrisson, les soins prénataux et postnataux, la prévention de l’infertilité, mais également un accès complet à tous les contraceptifs -pilule du lendemain, contraception d’urgence, stérilisation volontaire-,  ainsi que les services d’avortement « sans risques » -pour la mère mais par pour l’enfant-, l'information sur la sexualité et les droits sexuels reproductifs » [1].

1.1. Santé sexuelle

La « santé sexuelle » est, au plan idéologique, ce que la « santé reproductive » est au plan pratique. Elle valide l'impératif de laisser aux plaisirs sexuels leur libre expression. Selon l'Office Mondial de la Santé (OMS), la « santé sexuelle » « viserait à l'épanouissement sexuel de l'individu, à son exploration par les jeunes, à l'établissement de relation sexuelles équitables et responsables, l'absence de maladies et de violence, de risque biologique, de grossesses non désirées, mais aussi les facilités pour l'avortement, l'infertilité des dysfonctionnements sexuels, la santé mentale et même les prédispositions génétiques de l'individu, ensemble de termes qui ne sont pas sans faire penser à un projet eugénique » [2].
Cette « santé sexuelle », qui déconstruit la morale sexuelle naturelle, a une orientation éminemment païenne, dionysiaque [3] qui privilégie la vitalité – le plaisir, le bien être individuel, l'harmonie, la satisfaction sexuelle, ainsi que le sentiment narcissique de possession de soi – à toute recherche du bien réel de la personne. « La centralité du plaisir devient systémique, inhérent à tous les concepts évoqués et le tout définissant la nouvelle civilisation non répressive et individualiste » [4].

Tous ces concepts qui dérivent de la théorie du genre veulent s’inscrire dans le cadre de ce que les ONG appellent une « éthique du consentement ». Elle bannit du vocabulaire moral tout ce qui est pour l’individu obligation, contrainte, imposition ou coercition. Le libre choix absolu est érigé en vertu universelle avec, en ligne de mire, un développement centré sur le « tout individu » qui ne doit prendre aucun risque.
Or l’opinion publique est très sensible à tout ce qui pourrait éviter les grossesses non désirées ou les violences sexuelles, ce qui promeut l’intégrité physique des personnes et la protection contre les maladies telles que le sida.
Mais ce réflexe sécuritaire développe une culture préventive maximale aux dépens de valeurs [5]. « Il est en fait pervers, car il fuit dans le rêve du tout possible: en recherchant sans cesse l'accès à l'universalité du choix sécurisé, cette nouvelle éthique stipule un libre choix universel, égal, libre et confidentiel, en fait purement individualiste, coupé de ses relations fondamentales avec en son centre la famille. Le mot « Universel » signifie abolissement de toute barrière à la libre décision » [6].
On trouve par exemple, dans ces barrières inacceptables, le qualificatif de « confidentiel » qui rejoint celui du refus de ce qui ressemble à des autorisations parentales ou des avis du conjoint. Le mot « égal » renvoie à l’indifférence des âges, des situations sociales, des orientations sexuelles; le concept de l’acte « libre » dégage les intéressés des contraintes non seulement morales, mais mêmes matérielles, ce qui implique une transformation permanente des mentalités.

Dans cette perspective, c’est le concept de famille qui est déconstruit car il se comprend « sous toutes ses formes », que cela soit la formule classique avec un père et une mère stable, mais aussi la mère célibataire, le couple non marié, les couples homosexuels, les structures familiales polygames, les familles reconstituées suite à plusieurs divorces. La « diversité sexuelle » conduit à la possibilité de choisir son comportement et son orientation sexuelle !
Cette théorie du « gender » sert, malheureusement, de référence aux Organisations internationales  telles que l’ONU, l’OMS, la Commission Populations, l’UNESCO ou l’UNICEF. Elle est également une référence dans les législations européennes depuis le Traité de Maastricht (1992). Personne ne sait qui a introduit des concepts liés à la « théorie du genre » dans ce Traité alors qu'il n'en avait jamais été question. Elles ont été découvertes une fois signé ce Traité composé de plusieurs milliers de pages, et ont été reprises dans le mini-traité de Lisbonne.
L’ampleur du phénomène est considérable : « Nous sommes maintenant en pleine phase d'application. Les agents de transformation exercent sur les pays en voie de développement une pression maximale. Dans de nombreux pays, notamment africains, des ministères du genre ont déjà remplacés les ministères de la famille : même s'il semble s'agir d'abord de promouvoir le développement social de la femme, la porte est désormais ouverte dans les pays en voie de développement à une déconstruction anthropologique opérée par des ingénieurs sociaux radicaux venant d'ailleurs. Le gender avance masqué » [7].

Cet ensemble de concepts génèrent une sexualisation à outrance de la vie humaine. C’est toute une structure anthropologique tenue pour acquise qui en vient à basculer: on passe « de la famille aux individus, des couples aux partenaires, du mariage à la liberté sexuelle, du don de soi à la possession de son corps, de la complémentarité homme-femme au contrat entre les sexes ! … Cette sexualisation généralisée de l'être est en fait une a-sexualisation de son existence » [8].

2°) Les indicateurs composites du Développement Humain

Pourquoi avoir commencé par rappeler ces concepts de l’idéologie du Genre dans cet article évoquant la question des Indices de Développement Humain ? Il est tellement séduisant de se laisser à l’argument selon lequel les critères de Produit National Brut (PNB), ne résument pas la question du développement ! Les questions liées à la santé, à la formation ne sont-elles pas plus importantes que les questions de revenus ?

Malheureusement, dans la mesure de l’Indice de Développement Humain (IDH), le Pnud (Programme des Nations Unies pour le Développement) mesure, dans les différents pays,  le progrès de cette idéologie du Genre à partir de  deux autres indices composites :

  • l'ISDH : « indicateur sexo-spécifique de développement humain ».  appelé en anglais « Gender-related Development Index » (GDI). Il s'agit d’un IDH calculé séparément pour la population masculine et pour la population féminine, avec un facteur de correction pour représenter le fait que la durée de vie des femmes est naturellement plus élevée. La discrimination sexuelle est considérée comme extrême lorsque l'ISDH féminin est inférieur de vingt points à l'IDH.
  • l'IPF : « Indicateur de la Participation des Femmes ».  Il s'agit d'un indicateur essentiellement orienté sur la participation des femmes dans les processus de décision économique.

Pour l'ONU, il n'existe pas de relation linéaire entre ces deux critères de développement. Bien que le premier puisse être élevé, le second peut être tout autant faible. C'est le cas du Japon ou de l'Italie pour lesquelles les indicateurs IDH et ISDH sont relativement élevés par rapport à d'autres pays, alors que leurs IPF sont faibles aux vues de leurs IDH.

Le PNUD n’est pas la seule institution à utiliser ces indices. Ainsi, le forum économique mondial, (souvent appelée la « fondation Davos »), indique l’écart entre les sexes, dans son rapport de 2007. Il place ainsi la Suède en première.
Pratiquement toutes les grandes agences de l'ONU utilisent ces ratios. D'autres ONG ou universités considèrent que ces indices ne font pas la part assez belles à la culture du Genre.  Dans ce cas, ils proposent de nouveaux indices :

  • Valérie Bérenger, Maître de conférences, Faculté des sciences économiques Université de Nice, regrette « une utilisation limitée de ces indices » et proposent une séries de trois indices.
    • L’ « Indice Composite des Différences de Genre » (ICDG), appelé en Anglais le Global Gender Gap Index (Indice sur l'inégalité des sexes dans le monde) (GGI),  s’inspire de l’indice de Gini et utilise dans sa formulation les différences de performances entre les hommes et les femmes.
    • En adressant la critique liée à l’inclusion du revenu dans les indices du PNUD, l’Indice Relatif de Désavantage des Femmes (IRDF) se calcule sur la base des rapports sociaux de genre.
    • L’estimation de l’Indice de la Qualité de Vie des Femmes (IQVF), appelé en Anglais  repose sur des indicateurs spécifiques aux femmes et aux enfants. Toutefois, le fait que celui-ci soit fortement corrélé aux deux précédents indices de mesure des inégalités de genre permet à l’IQVF de compléter l’information fournie par l’ICDG et l’IRDF. Cet indice, pour son auteur, « sous-entend une relation négative entre inégalités hommes-femmes et bien-être des femmes ». Cet indice inclus un indicateur mesurant chez les femmes leur « capacité exercer leur droit de procréation (indice de politique d’avortement ».
  • le Social Watch, réseau international d'organisations dites citoyennes qui se déclare en faveur d’une « éradication de la pauvreté et d’une justice de genre ». Il propose le « Gender Equity Index » (Indice d'équité de genre) (GEI),
    On est effondré de voir que le siège de Social Watch-France est au secours Catholique ! Avec comme contact Michel Roy, DG du Secours Catholique en charge de l’action internationale.
  • Le Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM) promeut l'émancipation et les droits des femmes, et l'égalité des genres dans le monde entier. En 2000, l'UNIFEM a lancé la série des «Progrès des femmes à travers le monde», qui évalue les progrès réalisés en direction de l'égalité des genres. On a apprit que Mme Bachelet, présidente du Chili, vient d'être nommée directeur général de UNIFEM.
  • Le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), travaille sur le suivi des accords de la Conférence internationale sur la population et le développement, en 1994, et des Objectifs du millénaire pour le développement
  • L'UNESCO a, elle aussi, un "Centre de ressources sur l'intégration du genre" qui mène un travail sur les statistiques et les indicateurs  sensibles à la dimension de genre, sur la parité hommes-femmes et l'égalité en matière d'éducation de base, par exemple.
  • L'OCDE a créé la base de données Genre, institutions et développement (Gender, Institutions and Development Database (GID)) et déploie des efforts constants dans le domaine des statistiques répertoriées par genre et de l’évaluation de l'égalité des genres. Elle héberge également une base de données des organisations travaillant sur les indicateurs et les statistiques: (taper «gender»)
  • La Banque Mondiale, a adopté une stratégie d'intégration du genre et du développement en 2001. Elle a créé la base de données Genderstats et a publié récemment son Rapport de suivi mondial 2007 « Répondre aux défis de l'égalité des genres et des états fragiles".
  • La FAO, a mis en place une « Division pour l'équité entre les hommes et les femmes et l'emploi » au sein du Département économique et social. Cette division est responsable de la coordination du "plan d'action de la FAO pour l'égalité des genres" et a conçu des indicateurs sensibles à la dimension de genre pour la gestion des ressources naturelles et halieutiques, des situations d'urgence et du changement climatique.
  • L’OMS a établi des lignes directrices sur les questions éthiques et de sécurité dans la recherche consacrée à la violence contre les femmes et a mené une étude couvrant plusieurs pays et portant sur l’évaluation de la violence des partenaires sexuels envers les femmes. Ces thématiques apparemment respectables sont développées dans un programme complet intitulé "Gender, Femmes et Santé"
  • La Fédération Internationale du Planning Familial (IPPF) se sert de données sensibles au genre pour produire des  fiches sur la situation des stratégies et des services de prévention du VIH en direction des filles et des jeunes femmes.  En collaboration avec d'autres, la fédération a également conçu un manuel pour évaluer la qualité des soins selon une perspective de genre.
  • Le Forum Euro-méditerranéen des Instituts de Sciences Economiques (FEMISE) [9].  Il s’agit d’une association qui réunit, depuis 2005,  plus de 80 membres répartis dans les pays du pourtour méditerranéen.
    FEMISE est présidé par un égyptien, le Dr. Ahmed Galal, assisté d’un français, Jean-Louis Reiffers, vice-président. Cette association est soutenue financièrement par l’Union Européenne,   et assistée d’un comité scientifique constitué en particulier de personnalités de l’OCDE, la Banque Mondiale, la Banque Européenne d’Investissement.
    FEMISE a réalisé, en décembre 2009, un rapport dont l’objectif consistait à « évaluer l’influence tant directe qu’indirecte d’indicateurs sociaux variés (tels que mesures du capital humain, éducation, inégalité, etc.), ainsi que l’impact de l’ouverture extérieure (en termes d’Investissements Directs Étrangers, et de commerce des biens et services) sur la croissance et la convergence économiques dans la région MENA ».  …. La motivation derrière ce rapport « réside dans le fait que le développement social exerce un impact non négligeable sur la qualité de vie et la cohésion sociale ».
    FEMISE propose un autre indice : le Gender Empowerment Measure (GEM), une autre mesure d’inégalité basée sur le genre.

3°) Conclusion

Avec « les2ailes.com », on est surpris de lire que FEMISE termine un de ses rapports par les recommandations générales suivante: « Il en découle qu’une politique axée vers un traitement des sexes plus égalitaire dans les pays méditerranéens pourrait conduire à une augmentation du commerce » !

Pour l’opinion ambiante libérale, tout se résume au commerce. Il nous semble quant à nous que le bonheur ne se résume pas à cela. Le bonheur ne se mesure pas non plus par des indices, surtout si leur composition est confiée à des instances politiques.


[1] Projet d’article de Tanguy-Marie Pouliquen (CSJ) pour la Revue Liberté Politique, juin 2009

[2] M. A. Peeters, La mondialisation de la révolution culturelle occidentale. Concepts-clefs, mécanisme opérationnels, Institute for intercultural Dialogue Dynamics de Bruxelles, 2007, p. 58

[3] Qualificatif faisant allusion au Dieu Dyonisos de l’ivresse, et induisant des sentiments de chaos, de démesure, ou d’obscénité qui sont férocement jubilatoires pour ceux qui les ressentent.

[4] Projet d’article de Tanguy-Marie Pouliquen (CSJ) pour la Revue Liberté Politique, juin 2009

[5] Exemple anachronique : le gouvernement brésilien a distribué 53 millions de préservatifs à l’occasion du carnaval 2009. Un petit cadeau pour trois habitants !

[6] Projet d’article de Tanguy-Marie Pouliquen (CSJ) pour la Revue Liberté Politique, juin 2009

[7] Marguerite Peeters, Rédactrice en chef de l' « Interactive Information Services » - Interview Zenit–23 mars 2008

[8] Projet d’article de Tanguy-Marie Pouliquen (CSJ) pour la Revue Liberté Politique, juin 2009

[9] FEMISE est composé de 80 Instituts économiques, dont en France, les instituts suivants :

Agropolis – CIHEAM-IAM.M

Membre Fondateur

Hélène Ilbert

DEFI – Université Mediterranée

Membre Fondateur

Patricia Augier

CEPII

Observateur

Agnès Chevallier

CEPN – CNRS UMR7115, Université de Paris 13

Membre Fondateur

El Mouhoub Mouhoud

CERDI Clermont Ferrand

Membre Fondateur

Patrick Plane

LEAD, Université de Toulon-Var

Membre Actif

Nicolas Peridy

Université de Paris 12

Membre Fondateur

Gérard Duchêne

Faculté des Sciences Economiques, Université de Montpellier 1

Membre Fondateur

Christain Lagarde

ADRESSE-Cemafi

Membre Fondateur

Claude Berthomieu

Institut de la Méditerranée

Membre Fondateur

Jean-Louis Reiffers

CARE, université de Rouen

Membre Actif

Marc Lautier

CATT, Université de Pau

Membre Actif

Jamal Bouoiyour

Euromed Management/CEMM

Membre Actif

Bernard Paranque