La Commission Permanente du Comité National de l'Agriculture Biologique (CNAB) réunie le 8 juillet dernier à l'INAO (Institut National de l'origine et de la Qualité) a accordé une dérogation aux éleveurs bio d’utiliser des fourrages non biologiques. Ces fourrages peuvent être incorporés pour moitié dans la ration des vaches et à 100% pour les génisses.
Qu’en penser ?
Source : La France Agricole du 5 août 2010
Commentaire de «les2ailes.com»
Le "bio" : un label mensonger
Cette dérogation s’appuie sur le règlement européen qui prévoit que l’autorité compétente peut autoriser provisoirement « en cas de perte de production fourragère ou de restrictions liées, notamment, à des conditions climatiques exceptionnelles, à l’apparition de maladies infectieuses, à une contamination par des substances toxiques, ou à des incendies, l’utilisation par des opérateurs individuels d’aliments non biologiques pour une durée limitée et pour une zone déterminée ». [source : règlement européen n° 889-200 (art 47.c)].
Ce type de dérogation n’est pas exceptionnel : Dans un article de « les2ailes.com », nous expliquions combien l’agriculture Bio manque de rigueur :
- La réglementation ne fixe que des optimums vagues et imprécis du genre : « toutes les techniques de production végétale utilisées empêchent ou réduisent au minimum toute contribution à la contamination de l'environnement » . Ce vocabulaire « au minimum » ou « contribution », montre qu’il s’agit d’objectifs non mesurables ni mesurés.
- La réglementation prévoit des clauses de sauvegardes contradictoires par rapport à ce qu’attendent les consommateurs : « en cas de menace avérée pour une culture, des produits phytopharmaceutiques ne peuvent être utilisés que s'ils ont fait l'objet d'une autorisation d'utilisation » .
- La production n’est contrôlée que par les associations professionnelles elles-mêmes ce qui n’est pas un gage d’indépendance : le Comité National de l’Agriculture Biologique. Les professionnels sont juge et partie sur la qualité.
Dans cette décision du 8 juillet 2010, ce sont les professionnels eux-mêmes qui s’auto-accordent cette dérogation, avec la bénédiction du ministère. Le Comité National de l'Agriculture Biologique (CNAB) s’érige, une fois de plus en juge et partie ! Les professionnels cherchent à émouvoir le consommateur pour justifier cette dérogation : « La situation est inquiétante concernant le fourrage : la chambre d’agriculture de l’Orne dresse le constat : il y a 2 fois moins d’herbe cette année dans l’Orne, que les années précédentes. Un déficit fourrager printanier qui pèse lourd dans les élevages laitiers » (source : Normandie-FM)
Notre propos n’est pas de minimiser une difficulté économique pour un secteur donné. La pénurie de fourrages est certaine en cet été 2010. Mais il appartient à chaque secteur de production de prendre ses responsabilités et d’anticiper les problèmes. On imagine mal une industrie polluante, pour faire face à une crise économique, demander une dérogation sur le droit de polluer provisoirement. Les citoyens seraient choqués. Mais l’agriculture dite-biologique a réussi à bercer d’illusion les consommateurs en leur faisant croire aux vieux schémas du « gentil petit agriculteur bio » et du « méchant gros industriel pollueur ».
Pourtant d’autres solutions existent : Certaines chambres d’agricultures ont recommandé « des solutions radicales : trier et réformer dès maintenant les animaux en excès … reporter l’achat de nouveaux animaux … envisager l’ensilage de céréales … retenir des parcelles en achat d’herbe pour y faire du foin » (source : Normandie-FM).
En fait, tout cela relève d’une dérogation à la loi sur les publicités mensongères.
Le bio : des subventions d'exception !
Cette dérogation de circonstance est, en fait, un moyen de palier à une très grave inquiétude du secteur.
Dans un mémento remis au ministre de l’Agriculture le 17 juin 2010, la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB) s’inquiètait de la manière dont évolue l’attribution des aides de la Politique Agricole Commune (PAC) au secteur de l’Agriculture Biologique. A juste titre, le ministère de l’Agriculture a, en effet, décidé de transférer certaines aides accordées à l’agriculture biologique, du « deuxième pilier de la Pac » (c'est-à-dire ce qui est destiné à soutenir le développement rural), vers le « premier pilier » (c'est-à-dire celui destiné au soutien des marchés et des prix agricoles). L’idée du ministère relève d’une saine gestion des budgets français, dans la mesure où les budgets du second pilier sont co-financés par les budgets européens et nationaux, alors que ceux relevant du premier pilier ne le sont que par l’UE.
Bien entendu, « on se rend compte que cela pose des problèmes à presque toutes les fermes », affirme Dominique Marion, président de la FNAB.
Tout cela ne fait que souligner un problème grave : l’agriculture classique est subventionnée, mais l’agriculture biologique réclame un régime financier dérogatoire par rapport au reste de l’agriculture. La Fnab demande que les aides du 1er pilier de la PAC puissent être cumulées avec les aides de soutien à l’agriculture biologique (aides au maintien), ainsi qu’avec les mesures agri-environnementales (MAE).
« Nous demandons un minimum de 5000 euros d’aides par ferme », poursuit le président de la FNAB. (sources : Page 34 AGRA Presse Hebdo – N° 3259 – Lundi 5 juillet 2010).
Ainsi, l’agriculture dite biologique, se révèle être un triple leurre :