Le 17 mars 2016, un groupe de 130 médecins a réclamé « la création d’un plan contre l’infertilité ». En réalité, ils réclament plusieurs changements concernant le don d’ovocyte, le dépistage préimplantatoire, l’auto-conservation ovocytaire, et le don de sperme pour femme célibataire. 
Autrement dit, ils réclament, non pas un plan infertilité qui consisterait à promouvoir des comportements limitant le développement de l’infertilité. Ce qu’ils demandent ce sont des mesures pour faciliter l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA) qui n’est qu’une approche très partielle du problème. Ils y incluent la demande concernant les femmes célibataires, c’est à dire une forme d’infertilité sociale. Et si l'infertilité n'était pas une fatalité? La PMA est-elle la première priorité ?

Commentaire "les2ailes.com"

1- Définition et fréquence de l’infertilité

Il faut distinguer infertilité et stérilité.
La stérilité est l'incapacité de concevoir naturellement un enfant. L’infertilité concerne un couple qui ne parvient pas à avoir un enfant pendant un ou deux ans.
Environ 18% et 24 % des couples ne parviennent pas à avoir un enfant après 12 mois sans contraception. Ils ont souvent recours à la Procréation Médicalement Assistée (PMA) avec 2,9 % des naissances en 2012. Ce taux a doublé en 10 ans !

2- Les allégations non prouvées

Une étude de l’INSERM de Rennes a cherché en 2001 les relations entre l’exposition à certains produits, dont des pesticides, et l’infertilité. Mais le Dr Luc Multigner de l'Inserm, note que plusieurs biais peuvent exister : « les études épidémiologiques n’ont pu établir de manière convaincante... l’existence d’une association entre exposition à des perturbateurs endocriniens et atteintes de la santé ».

3- Les grandes causes de l’infertilité

a) Les causes cliniques, biologiques ou anatomiques

Il en existe hélas de nombreuses
- L'endométriose
- Le SOPK, qui à des degrés divers, touche entre 6 et 10% des femmes. Ce syndrome se caractérise par une augmentation inhabituelle de la production d’androgènes (hormones mâles) dans les ovaires, ce qui perturbe la production d’ovules
-La ménopause précoce (avant l'âge de 30 ans voire avant 25 ans). Elle toucherait 1% des femmes.
- L'azoospermie se manifestant par une absence constante de spermatozoïdes dans le sperme et pour des causes diverses. Elle toucherait 1% des hommes. Elle peut se compliquer par des anomalies des spermatozoïdes présents qu'on appelle le syndrome de l'OATS (ou oligoasthénotératospermie)

Elles nécessitent des diagnostics, précis, pour en mesurer le degré définitif ou la possibilité d'un traitement. par chirurgie ou par la pharmacie, avant d'en arriver à une PMA/ICSI. 

b) Les causes comportementales ou environnementales

Il ne faudrait ici dire que l'infertilité est le plus souvent due à des comportements sociaux, alimentaires, et encore moins immoraux... Ce serait non seulement choquant mais également cruel pour les couples infertiles : double peine de ne pouvoir concevoir sans aide et de se faire taxer de gens "anormaux" ou "immoraux" ou "de mauvais comportement" ou "l'ayant bien cherché". 
Nous en citons malgré tout quelques-unes qui, d'un seul point de vue épidémiologique, ne peuvent pas être considérés comme anodins dans une approche gouvernementale de santé publique. Il ne s'agit pas d'une check-list à opposer à des personnes souffrant d'infertilité, ni pour établir des diagnostics individuels.

  • Le cannabis, l’alcool et le tabac

La combinaison de leur consommation est catastrophique sur la reproduction. Le THC, principe actif contenu dans le cannabis, cause des perturbations des hormones sexuelles.

 

 

  • L’usage de contraceptif pendant les 15 premières années suivant l’adolescence.

Les examens montrent que les ovaires deviennent plus petits avec la prise de contraceptifs et réduit de 14% la fertilité. Par ailleurs, la pilule est trop facilement prescrite à des ados souffrant de règles douloureuses. Or, ce « pseudo-traitement » retarde le diagnostic de maladies qui peuvent toucher 10% des femmes et entraîner une infertilité.

  • Les troubles alimentaires : anorexie ou surpoids

Une perte de poids importante conduit à des troubles hormonaux de l’ovulation. De nos jours, on retrouve des jeunes filles de moins de 12 ans qui ont déjà suivi au moins un régime. 12 ans!!! N’est-ce pas un peu jeune ?
A l’inverse, l’obésité augmente le taux d’insuline dans le sang, qui perturbe le fonctionnement cérébral impliqué dans la sécrétion des hormones sexuelles.

  • Le stress

Même s'il est vrai que les liens de cause à effet entre stress et fertilité restent mystérieux, ils ne peut être écartés.
Les causes de stress sont multiples : changement de situation sociale, absence de détente, manque d'exercice physique, déficit d’estime de soi, humiliations, bruit, etc... Or, en perturbant le fonctionnement cérébral, le stress modifie les sécrétions de certaines hormones, dont celles de la fécondité.

  • Le recours à l’IVG juvénile

L’IVG est une des grandes causes de traumatisme chez les femmes. Alexandre Minkowski, directeur du Centre de recherches biologiques néo-natales, a déclaré devant les parlementaires français en 1975 : « Il est prouvé de manière absolument certaine qu'après deux à trois avortements, le taux de stérilité augmente". En France, les fausses couches, grande cause d’infertilité, sont 3 fois plus fréquentes après 2 interruptions de grossesse.
La relation entre les fausses-couches spontanées dues à des problèmes utérins et les avortements est indiscutable depuis la dernière méta-analyse réalisée par Saccone et al. (2016).
Une autre cause conduisant à  l’infertilité est l’endommagement du col de l’utérus, qui est ouvert mécaniquement durant un avortement chirurgical. Celui-ci peut devenir dur et fermement fermé, ce qui provoque les problèmes que l’on sait. Lire Hardy et al. (2013) pour une revue sur les insuffisances cervicales.

  • Le report des premières maternité à un âge tardif

Vers 1970, les françaises avaient leur 1er enfant à 24 ans; aujourd’hui, c’est à 28,5 ans. Or, la fertilité baisse naturellement après 25 ans et diminue très fortement à partir de 35 ans.
Il peut y avoir, à ce retard, des raisons professionnelles. Mais, la cohabitation juvénile pousse aussi les jeunes à décaler le choix d’un partenaire stable qui puisse être un « père acceptable ». Les divorces ou séparations de couples sans enfants sont souvent suivis par une 2nde union qui contribue au désir d’enfants à des âges tardifs.

  • L’infertilité sociale

Citons enfin l’infertilité des personnes ayant des comportements homosexuels, qui par nature, sont infertiles... sauf à avoir recours à des interventions artificielles. comme les procréations médicalement assistées (PMA).

4- Le « plan fertilité » réclamé par 130 médecins

Ils réclament en réalité des mesures pour faciliter les PMA. Autrement dit, il ne s’agit pas d’un plan infertilité pour dénoncer les comportements qui en sont responsable, mais d’une approche très partielle du problème. Ils demandent même d’autoriser le don de spermes pour femme célibataire pour faciliter les situation d’infertilité sociale.

Conclusion

Les causes d’infertilité ont, d'un côté,  des causes aléatoires d'ordre biologique ou clinique, et la façon dont les personnes soufrant d'infertilité en souffre. Il ne faudrait pas, pour autant, dans un "plan fertilité" gouvernemental, faire preuve d'incohérence en négligeant un certain nombre de tendances sociétales qui peuvent aggraver sur le long terme, la prévalence de ces situations.
Un « plan infertilité » pour la France pourrait parallèlement à la mise en place de centres de PMA, prévoir ce qui est fait pour la sécurité routière pour éviter que, dans quelques décennies, il ne soit reprocher  aux 130 médecins favorables à la PMA fait penser à des chirurgiens d'avoir négligé ces approches.

Commentaires  

# Claudine 16-05-2017 10:57
C'est vrai que l'infertilité peut être due aux raisons externes mais dans la plupart des cas comme dans le mien cela a des origines internes et même inexpliqués. Faute de possibilité de concevoir naturellement, j'ai fait appel à un don d'ovocytes dans la clinique Biotexcom et ainsi je suis devenue maman d'une fillette:)
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