L'Assemblée nationale le 18 février 2010, à l’unanimité, vient de voter une résolution invitant le gouvernement à présenter devant le Parlement "un rapport présentant les dispositions législatives et réglementaires des Etats membres de l'Union les plus progressistes à l'égard des femmes", suivi d'un "projet de loi visant à aligner la législation française sur ces dispositions".

Un concept de clause de la nation européenne la plus favorisée pour l’IVG a été évoqué par un grand nombre de députés de tous horizons….

Source : Débats- Assemblée Nationale
Texte - Proposition de résolution

Commentaire de « les2ailes.com »

Le texte proposé aux parlementaires était intitulé « Harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes ».
La lecture intégrale des débats ne laisse d’étonner :

Mme Pascale Crozon, députée socialiste de Villeurbanne, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, n’a pas hésité à déclarer : « nous souhaitons que la France défende le principe d’une harmonisation sur les bases de l’égalité la plus élevée et des mesures existantes les plus protectrices, c’est-à-dire sur les principes de ‘la clause de l’Européenne la plus favorisée’. »

La résolution prévoyait §26 à 28 : « L’Assemblée nationale invite le gouvernement … à présenter, à court terme, devant le Parlement un rapport présentant les dispositions législatives et réglementaires des États membres de l’Union les plus progressistes à l’égard des femmes à l’issu duquel sera présenté un projet de loi visant à aligner la législation française sur ces dispositions ».

Mme Anne Grommerch, députée UMP de Thionville, rapporteur de la commission des affaires européennes, a rappelé que : « Le délai le plus favorable, lorsque la décision appartient à la femme, est celui de la Suède, à savoir dix-huit semaines, contre douze semaines actuellement en France ».

On est surpris de voir Mme Nadine Morano, secrétaire d’État chargée de la famille et de la solidarité, participer activement aux débats et d'en jouer le jeu : « C’est une idée séduisante en ce qu’elle vise dans son principe à identifier la clause la plus favorable aux femmes par domaine, en comparant la législation de plusieurs pays, pour la promouvoir au niveau européen… Plutôt qu’une obligation de résultat, nous souhaitons que cette convergence, au lieu d’être automatique, soit une obligation de moyen, et qu’elle s’intègre dans un vrai processus collectif. Il nous semble plus profitable, en effet, d’échanger sur les expériences des uns et des autres à vingt-sept, afin qu’une dynamique européenne s’enclenche de façon globale ».

Mme Danielle Bousquet, député socialiste de St-Brieuc, a insisté en se demandant : « Pourquoi l’exemple suédois serait-il valable lorsqu’il s’agit d’allonger l’âge légal de départ à la retraite, et ne le serait-il plus lorsqu’il s’agit d’allonger la durée légale du droit à l’IVG ? ».
Mme Colette Le Moal, député Nouveau Centre au Chesnay, a soutenu la résolution en disant : « Pour le Nouveau Centre, il est fortement souhaitable de s’inscrire pleinement dans une démarche de convergence des législations européennes. Dans la mesure où cette proposition de résolution va dans le sens d’une harmonisation législative et d’un renforcement des droits des femmes, nous la soutenons ».

Le débat s’engagea autour de discussion d’amendements mineurs mais significatifs de l’état d’esprit de l’assemblée. Par exemple un amendement n°7 « rappelle que la proposition de résolution s’appuie sur un mouvement de réflexion émanant notamment du mouvement associatif luttant pour le droit des femmes en Europe. Il me semblait important de leur rendre hommage ».
Voilà le Planning Familial –car il s’agit de lui- encensé à l’unanimité, avec les applaudissements de l’UMP au moment où M. Pierre Lequiller, député UMP de Versailles, déclare : « Je soutiendrai bien évidemment le texte modifié par les amendements qui ont été proposés par Marie-Jo Zimmermann, présidente de la délégation aux droits des femmes… Je voterai donc, comme j’espère tout le monde ici, cette proposition de résolution amendée, précisée, qui constitue, je le répète, un progrès incontestable ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

L’amendement a été voté à l’unanimité après que Mme Nadine Morano, secrétaire d'État, ait déclaré au préalable que le Gouvernement « est favorable à cet amendement ».

Deux amendements « fourre-tout » (N°2 et N°4), acceptés par le gouvernement, ont également été adoptés à l’unanimité proposant d’insérer l’alinéa suivant : « Considérant, compte tenu des traités en vigueur, qu’il appartient également aux États membres de prendre l’initiative d’agir dans les domaines relevant de leur compétence propre en matière d’égalité femmes-hommes » et appelant le gouvernement à « relancer la politique européenne d’amélioration et d’harmonisation en matière d’égalité entre les hommes et les femmes ».

Le vote s’est terminé par les applaudissements des socialistes qui avaient proposé le texte. Ils avaient de quoi se réjouir puisque tout ce beau travail a permis au texte d’être adopté à l’unanimité. Beau travail ? Eh oui, les deux derniers mots du débat ont été ceux de Mme Nadine Morano, «  Bravo ! » et de Mme Marie-Jo Zimmermann, députée UMP de la Moselle : «  On a bien travaillé ! »

Un festival d’autosatisfaction !

Mais le plus grave, c'est que la résolution a été ensuite votée en séance publique le 23 février. L’analyse du scrutin a donné les résultats suivants :

Sur 471 votants, seuls 7 députés ont voté contre : Il s'agit de MM. Alain Marty (député gynécologue de Sarrebourg), Etienne Pinte (député UMP de Versailles), Jean-Frédéric Poisson (député UMP de Rambouillet), Christian Vanneste (député UMP de Tourcoing), Mme Véronique Besse (député non inscrit de Vendée), Dominique Souchet (député non inscrit de Luçon) et François-Xavier Villain (député UMP de Cambrai).
2 députés se sont abstenus : Hervé Mariton (député UMP de  la Drôme) et Paul Jeanneteau (pharmacien d’officine, député UMP d’Angers).

Ainsi, François Bayrou (MODEM), Jean-François Copé (UMP), Hervé de Charrette (Nouveau Centre), Jean-Marc Ayrault (Socialistes) se sont tous retrouvés ! Jean-Marc Nesme (député UMP de Paray le Monial), Chantal Robin-Rodrigo (député socialiste de Lourdes).

Quel dommage que, sur 3 députés du Parti Chrétien Démocrate, un seul ait voté contre (Jean-Frédéric Poisson), un pour (Jean-François Chossy) et qu'un n'ait tout simplement pas pris part au vote (Dino Cinieri) !

Il y a fort à parier, dans cette affaire, qu'on ait une assemblée bien naïve qui n'a pas la moindre idée de ce que c'est que la "santé sexuelle et reproductive" dans le jargon de l'ONU et de l'UE.
Pourtant, pendant les débats Mme Danielle Bousquet, député socialiste des Côtes d'Armor a été particulièrement claire : "l’harmonisation par le haut doit notamment être l’occasion de faire avancer la question des droits sexuels et reproductifs, c’est-à-dire la maîtrise par les femmes de leur vie". Mme Colette Le Moal a précisé: "Il importe donc de s’intéresser davantage à la santé de la population féminine en prenant également en compte la santé sexuelle et reproductive des femmes – une condition importante pour la maîtrise de leurs corps et, par conséquent, une condition essentielle de l’égalité entre hommes et femmes" . C'est donc bien, derrière cette sémantique, de l'avortement qu'il s'agit et non pas des droits à congé parentaux ou autres droits des femmes à la santé !