En octobre 2016 , la presse titrait : "des bonbons au bon goût de nanoparticules". Du Titane dans des bonbons ! L’émotion nous a envahis ! Le mot de "nanoparticule" fait peur, évoque des techniques qui permettraient de transformer nos cerveaux en robots aux ordres d’un ordinateur central . Quelles réactions avoir ?

Analyse publiée dans « Actuailes n°61 »

De quoi s'agit-il ?

S’informer sur les mots utilisés

Les Nanoparticules sont des objets un million de fois plus petits qu'un millimètre. Elles ne sont ni bonnes ni mauvaises, mais ce que l’homme en fera. Les nanoparticules seront demain des prothèses médicales comme le sont des lunettes. Elles pourraient aussi servir le mal avec le transhumanisme. L’oxyde de Titane est un produit courant qu’on trouve, par exemple, dans les carrières de talc. Dans les bonbons, sa présence est étiquetée sous un nom de code E171 : c’est un colorant alimentaire recherché pour sa blancheur.

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Elle vient en général d’une même source, l’Agence France Presse (AFP). Les journaux en changent le titre pour augmenter l’émotion. L’AFP, elle-même, reçoit un "communiqué de presse" qu’elle reprend tel quel. Dans le cas présent, il était envoyé par "Agir pour l'Environnement - Une association de mobilisation citoyenne nationale en faveur de l'environnement" dont le délégué général se présente lui-même comme un activiste écologiste.

Le communiqué parle d’une "enquête", et non d’une "étude scientifique" au sens propre du mot. Le "laboratoire d'analyse" n’a fait des mesures que sur 4 échantillons. Pourquoi pas d'autres? Ce n'était pas non plus un "laboratoire de recherche". Ce laboratoire public était très bien équipé en instruments de mesure, ce qui permet de trouver toutes sortes de molécules partout, même à des doses infimes.

Qu’en conclure au plan de la santé ?

Le colorant E171 est-il dangereux ? Il est autorisé par la réglementation. Est-ce une raison d’innocuité ? Faut-il les interdire au nom du principe de précaution ? Un risque est-il avéré ? L’ "Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation" (ANSES) s’est posée la question dès 2014 : Son rapport "relatif à l’évaluation des risques liés aux nanomatériaux" a conclu qu’ "il s’avère très difficile d’établir une synthèse des connaissances en matière de toxicologie... Les connaissances concernant tant la toxicité restent parcellaires". La difficulté est d’établir une relation de cause à effet entre telle ou telle allergie ou maladie. Les test en laboratoire ne suffisent pas. Le dioxyde de Titane est présent dans les particules fines qui voltigent à travers les continents en provenance des grands déserts (Sahara et Arizona). Il est également présent dans les implants dentaires. Il faudrait faire appel à de très lourdes études épidémiologiques, seule méthode pour conclure quand plusieurs facteurs sont en jeu. Il faudrait multiplier ce type d’études !

On comprend que l’ ANSES dise "qu’il est encore très difficile de pouvoir se prononcer sur le risque sanitaire lié à l’utilisation de tel ou tel nanomatériau".

Les colorants alimentaires sont-ils indispensables ?

Le Goût d’un produit alimentaire n’est pas seulement celui qui est ressenti par les papilles de notre langue. Tous les sens y contribuent : le caractère croquant (pour l’oreille), l’odeur (pour le nez), la couleur (pour l’oeil), la plasticité (pour le toucher). Chaque recette a ses caractéristiques pour contribuer au plaisir d’une sensation globale, et pour susciter l'appétit, ou la gourmandise. Il serait dommage de s’en passer. Les colorants contribuent à créer cette magie du goût. Est-ce un bien ou un mal ? Chacun se fera son idée. Une chose est sûre : le pire n’est jamais sûr et les émotions bien mauvaises conseillères. De l’importance de savoir prendre du recul sur les titres de journaux.

Pour aller plus loin...

1) Qu'appelle-t-on la "méthode scientifique"?

Une "étude scientifique se doit d'appliquer la "méthode scientifique". On peut résumer la méthode à la succession des étapes suivantes:

  • élaborer une théorie scientifique permettant d'expliquer un phénomène.
  • Construire l'expérience pour vérifier la prédiction résultant de la théorie
  • effectuer l'expérience
  • Valider, modifier ou rejeter la théorie en fonction du résultat.

Il faut en général plus d'une expérience pour changer la façon de penser d'un scientifique, mais au moindre doute, tout résultat doit être ré-expérimenté et répété jusqu'à ce qu'un ensemble solide de preuves soit établi. Ce processus garantit que les chercheurs ne fassent pas d'erreurs ou ne manipulent pas les preuves intentionnellement.

La méthode scientifique pose des problèmes quand on est en face de systèmes complexes ou d'impossibilité de faire une expérience sans modifier le système observé. Il faut alors utiliser des sciences modernes comme les modèles systémiques (avec des tests d'hypothèses) ou les calculs de probabilité.

La disponibilité de données fiables est alors essentielles. Il y a deux façons principales d'obtenir des données: la mesure et l'observation. Elles sont généralement qualifiées de mesures quantitatives et qualitatives.

2) Qu'est ce qu'une étude épidémiologique?

Le mot épidémiologie vient du grec Epidoemia. Il évoque tout ce qui peut influencer la santé des populations. On pense bien sûr aux maladies, mais aussi à l'alimentation. L'épidémiologie consiste à étudier la répartition, la fréquence et la gravité des états de santé de ces populations.

Ces études permettent de définir ce qu'il faut décider pour améliorer la santé et comment modifier ce qui peut augmenter les risques sur la santé.

Or, lorsqu'on est face à des causes multiples et compliquées, il faut essayer de distinguer les causes entre elles. Par exemple, quand on dit que la qualité d'un aliment peut causer un cancer, il faut séparer les consommateurs qui consomme cet aliment et ceux qui n'en consomment pas. Mais il faut aussi les interroger pour savoir si ce sont des fumeurs ou non, s'ils sont des buveurs d'alcool ou non. Il faut étudier leur consommation dans le temps et ce n'est pas toujours facile d'interviewer des consommateurs tous les cinq ans pour savoir leur état de santé. C'est pour cette raison que les études épidémiologiques sont compliquées et coûtent cher. Or elles sont indispensables car il ne suffit pas de faire des études en laboratoire sur des rats pour tirer des conclusions fiables.

3) qu'appelle-t-on le "transhumanisme"? 

Le transhumanisme est une philosophie rationaliste et un mouvement culturel qui a pour objectif de transformer la nature humaine. cette philosophie part de l'idée que notre création serait "ratée" puisque l’homme souffre, tombe malade, et meurt. Dès lors, les transhumanistes s'appuient sur la technologie pour changer non seulement la nature, mais la nature de l’homme elle-même. 

Le journal Actuailes a consacré un article à ce sujet dans le n° 38 du 17 juin 2015 intitulé "la philosophie tranhumaniste"

 


Prothèse

Du latin prosthesis (« addition d’une lettre au commencement d’un mot »). En médecine, c'est un dispositif artificiel destiné à suppléer à un organe ou à le remplacer

Titane

Ce nom proviendrait du grec titanos signifiant "marne", le titane étant abondant dans les terres argileuses.

Talc

Son nom vient du persan : Talq. Il s'agit d'une roche se réduisant en poudre fine et utilisée pour réduire les frottements dans le contact de matériaux divers en mouvement.

Transhumanisme

Le journal Actuailes a consacré un article à ce sujet: n° 38 du 17 juin 2015 intitulé "la philosophie tranhumaniste".

Etude épidémiologique

Le mot vient du grec Epidoemia. Il évoque tout ce qui peut influencer la santé des populations.

Toxicologie

Vient du latin toxicum ("poison"). La toxicologie est la science qui étudie la dangerosité d'un produit por la santé.

Plasticité

vient du grec plássein ("mouler, former"). La plasticité d'un corps est sa capacité à changer de forme pour être moulée.