"Jamais, nulle part, l’idéologie n’a résolu les problèmes qu’elle avait contribué à créer"
(Thierry Godefridi)

Des législateurs de l’État du Wyoming ont déposé le 13 janvier 2023 une résolution n° SJ0004 proposant « l'élimination progressive de la vente de nouveaux véhicules électriques dans le Wyoming d'ici 2035 ». Rien ne dit que ce texte sera adopté. Quatre sénateurs et deux représentants justifient leur initiative par une série de onze attendus.
Le principal concerne la défense de l’industrie pétrolière locale. Que voilà un argument simpliste, disent les journaux relayant le lobby des voitures électriques qui raillent la nouvelle en question, la comparant à « une information du 1er avril ! »

Analyse: les2ailes.com

D’autres arguments pourraient pourtant sensibiliser les opinions publiques. Les attendus évoquent en particulier ceci :

  • Les batteries utilisées dans les véhicules électriques contiennent des « minéraux essentiels dont l'approvisionnement …est limité ».
  • La difficulté de recyclage des batteries en fin de vie pour en « éliminer les minéraux de manière sûre et responsable».
  • La nécessité d’investir dans la production de « quantités massives de nouvelle production d'électricité». Le problème, n’est pourtant pas quantitatif. En effet, il faudra recharger les véhicules, même quand les éoliennes seront à l’arrêt pendant les périodes anticycloniques sans vent. Il faudra également les charger pendant la nuit, quand les centrales nucléaires produisent jour et nuit !

Un autre attendu évoque un argument économique :

  • La nécessité d’investir, en particulier le long des autoroutes, dans des « infrastructures de recharge des véhicules électriques».

Pas un mot du réchauffement climatique, s’insurgent d’autres organes de presse : Il est exact que les parlementaires du Wyoming n’évoquent pas la question.

Les auteurs de la résolution auraient pu souligner l’absence de consensus sur le sujet, ce que montre bien la récente publication du livre de Steven E. Koonin « Climat, la part d'incertitude ». Ce best-seller aux États-Unis est aussi dans le classement des meilleures ventes en France. En plus des critiques qu’il formule contre les modélisations du Giec, S. Koonin s’insurge contre un autre projet de loi (n° S.729 du 7 mars 2019) qui voulait interdire « aux agences fédérales d’utiliser des fonds publics …[remettant] en cause le consensus scientifique sur le changement climatique » ! Grand défenseur des débats de type « Red Team / Blue Team », Koonin consacre un chapitre entier intitulé « il faut sauver la méthode scientifique ». Le débat est donc loin d’être clos entre le Giec, tenant d’une cause humaine du réchauffement climatique et ceux d’une explication par les cycles pluri-centenaires magnétiques du soleil, leur impact sur le rayonnement cosmique, donc sur la couche nuageuse terrestre et, donc en définitive, sur le climat.

Etant donné cette part d’incertitude, est-il fondé de rendre obligatoire les voitures thermiques ?

Confondre le cri de la Terre avec le cri des ONG, jusqu’à ne plus entendre le cri des pauvres !

La COP 26 a interdit le financement de centrales énergétiques à partir de fossiles. L’Afrique, qui consomme et produit dix fois moins d’énergie que nous, aura ainsi de grandes difficultés à financer de nouvelles centrales à combustible fossile. Ces pays ne pourront, pourtant, se développer qu’avec des énergies abondantes et bon marché.
Mais supprimer les voitures thermiques en Europe aura également un impact sur la mobilité africaine qui est assurée, pour l’essentiel, par nos véhicules d’occasion dont 80 %, sont exportés vers les pays pauvres. Ceux-ci s’appauvriront de plus en plus : faute d’accès à l’électricité mais également faute d’accès à un marché de voitures d’occasion. Le marché des voitures thermiques disparaîtrait et celui des voitures électriques serait inaccessible aux pays sans disponibilités électriques suffisantes. N'est-ce pas disproportionné dans un tel contexte d’incertitude scientifique ?

Il faudrait aussi parler de l’origine du cobalt et du coltan utilisés dans les batteries des véhicules électriques. Joseph Thouvenel, secrétaire confédéral de la CFTC, appelait le 19 janvier 2022, à veiller « à ce que les personnes travaillant à extraire le cobalt soient correctement traitées et rémunérées et ne soient en aucun cas des enfants », comme c’est le cas au Congo.

Thierry Breton, commissaire européen chargé du marché intérieur, a d’ailleurs plaidé le 4 novembre 2022 pour que « les industriels continuent à produire des voitures thermiques après 2035 en Europe ». Est-ce, pour lui, une manière de gagner du temps, tout en prétendant qu’il ne faut pas y renoncer ! Mais Thierry Breton est, au demeurant, ingénieur de l'École supérieure d'électricité (Supélec) et, comprend peut-être pourquoi les fondements de la voiture électrique sont plus idéologiques que scientifiques et économiques ? Les parlementaires du Wyoming ont certainement omis des arguments, mais elle a peut-être un caractère prophétique.