On pourrait paraphraser Laudato si en disant qu’entre « bioéthique relativiste et écologisme consensuel, tout est lié ». Dans Laudato si, le pape François donne des exemples pratiques liant écologie et bioéthique : "Quand on ne reconnaît pas, dans la réalité même, la valeur d’un pauvre, d’un embryon humain, d’une personne vivant une situation de handicap ..., on écoutera difficilement les cris de la nature elle-même". (§ 117). L’encyclique insiste donc sur l’incompatibilité qu’il y a dans "la défense de la nature ...et la justification de l’avortement" (§ 120). Laudato si cite les encycliques de Jean XXIII avec Pacem in terris , ou de Jean-Paul II avec Redemptor hominis ou laborem exercens. Pourtant aucune allusion n’est faite à Humanae vitae de Paul VI. Peut-être une encyclique ultérieure unira-t-elle les deux doctrines, dans l’esprit d’une véritable herméneutique de la continuité.
En quoi ces deux thématiques sont-elles liées ?

Analyse «les2ailes.com »

1- « Entre bioéthique relativiste et écologisme consensuel, tout est lié »

  • Rapport à la mort et à la fin des temps

La bioéthique est bousculée par des rêves techniques de supprimer jusqu’à la mort elle-même.
L’écologisme prétend, de son côté, qu’en suivant un programme d’éco-gestes, l’homme pourra s’éviter la fatalité d’une apocalypse annoncée. Ce sont là, probablement, deux formes de péchés de toute puissance.

  • Le mépris des plus faibles

La bioéthique, dans ses dérives subjectivistes et individualistes, fait peu de cas des plus faibles : avec les diagnostics préimplantatoires, ce ne sont pas les maladies qu’on éradique, mais les malades eux-mêmes.
Certains, dans l’écologisme, trouve des arguments pour une nouvelle forme de néo-colonialisme qui imposerait aux pays les plus faibles de prétendus modes de développement dé-carboné, « au prix de l’abandon des traditions antiques de la société. C’est du paternalisme à rebours », disait Mgr André Vingt-Trois. En réalité, ces programmes, plus verts que vertueux, risquent, non d’éradiquer la pauvreté, mais d’exclure les plus démunis de toute capacité à émerger de leur pauvreté en les enfermant dans une situation économiquement inviable.

  • Dieu créateur ou homme créateur ?

La bioéthique, telle qu’elle évolue dans nos sociétés, risque de ne répondre qu’à des désirs individuels de l’homme-dieu oubliant l’appel du Dieu fait homme.
De la même manière, dans l’écologisme, existe la tentation de déifier la création, comme pour faire oublier le Créateur.

  • Les faux consensus : quand « mensonge et crédulité s’accouplent pour engendrer l’opinion » (Paul Valéry)

En matière de bioéthique, les constructions internationales de consensus élaborent des stratégies de santé reproductive et sexuelle qui prétendent répondre aux critères de l’essentialité de l’homme. Cette élaboration date des années 70-80 qui -faut-il s’en étonner ?- ont surgi dans la société, et même dans l'Église, sous forme d’agressions sexuelles sur des mineurs, ou sur l’embryon.
L’écologisme, avec les mêmes procédures de consensus, rend l’homme responsable des variations climatiques ou du trou d’ozone sans que ne soient vérifiés, en détail, les critères de scientificité des systèmes naturels.  

  • Un déficit d’anthropologie

En matière démographique, un des experts les plus en vue à l’ONU, Jeffrey Sachs, cheville ouvrière de la rédaction des Objectifs du développement durable (ODD) et invité d’honneur plus d’une quinzaine de fois à l’Académie Pontificale des Sciences, a décrit l’avortement comme une option à faible risque et un low-cost "préférable à de nouvelles vies humaines dans le monde".
Cet appel, contraire à une bioéthique respectueuse de l’anthropologie, vient en écho du volet écologique des objectifs du développent durable qui prévoient de « lutter contre les changements climatiques » (ODD n° 13), alors que la cause anthropique de ces variations climatiques est loin d’être fondée. Ce lien résonne aux oreilles des mouvements « nokids » (1er écogeste : ne pas avoir d’enfant), ou « save the planet : kill yourself » (2nd écogeste : suicidez-vous). On voit se développer les mouvements kikomori (3ème écogeste : enfermez-vous)

 2- Conclusion : le prophétisme de l’écologie intégrale dans Laudato si et de la sexualité intégrale dans Humanae vitae

Une saine écologie et une véritable bioéthique devraient être replacées dans la perspective de l’anthropologique née au fil des siècles récents, depuis l’époque des lumières en passant par la déclaration des droits de l’homme, la philosophie eugénique apparue entre les deux guerres et reprenant corps actuellement avec l’individualisme, la tolérance et la non-discrimination érigés en valeurs relativistes et universelles.

Laudato si est prophétique en développant un concept d’Écologie intégrale destinée à rendre compte de l’humain dans ses quatre dimensions :

  • son rapport à Dieu ;
  • son rapport à la dignité de la personne humaine d’autrui, notamment des plus simples;
  • son rapport à lui-même et à la dignité de l’intimité de chaque personne ;
  • et son rapport aux créatures non humaines.

Humanae vitae a été prophétique en appelant à remettre la sexualité à sa place, la fois

  • son rapport à Dieu
  • son rapport à autrui et en particulier le conjoint et l’enfant dès sa conception
  • son rapport à chacun des conjoints et leur vocation à un épanouissement intégral
  • et son rapport à la loi naturelle